Cinq nouveaux arrêtés prévus par la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile(1) viennent de paraître. L’un d’eux détermine le contenu du questionnaire relatif à la détection des vulnérabilités, auquel doit répondre dorénavant tout demandeur d’asile. Un autre donne vie à la nouvelle procédure de domiciliation pour les demandeurs d’asile en établissant le modèle de formulaire de déclaration de domiciliation. Quant aux trois derniers, ils concernent les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et fixent le cahier des charges que les gestionnaires doivent respecter, le contrat de séjour type conclu entre la structure et le demandeur d’asile ainsi que le règlement de fonctionnement type affiché dans l’établissement.
Désormais, à la suite de la présentation d’une demande d’asile, l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) doit, dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d’asile, procéder à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer ses éventuels besoins particuliers en matière d’accueil. Les agents de l’office procèdent à cette appréciation à l’aide d’un questionnaire d’évaluation. Les données ainsi collectées font l’objet d’un traitement informatique géré par l’OFII et sont transmises à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Le questionnaire est divisé en deux parties : les besoins d’hébergement et les besoins d’adaptation.
Dans la première partie, le demandeur indique s’il est sans hébergement ou, s’il est logé, précise la nature de son hébergement : est-il accueilli par la famille ? Par un tiers ? S’agit-il d’un hébergement stable ou précaire ? Bénéficie-t-il d’un hébergement d’urgence et, si oui, pour quelle durée ? La seconde partie du questionnaire porte davantage sur la personne du demandeur d’asile. S’agit-il d’une femme enceinte et si oui, quelle est la date prévue du terme ? A-t-il un handicap sensoriel et, si oui, de quelle nature (visuel, auditif, mutisme, difficultés à verbaliser) ? Un handicap moteur ou une mobilité réduite (appareillage ? chaise roulante ?) ? A-t-il besoin d’un tiers pour les actes essentiels de la vie quotidienne ? A-t-il fait spontanément état d’un problème médical ? Le cas échéant, a-t-il déposé des documents à caractère médical ? A noter : l’échange ne peut pas porter sur les motifs de la demande d’asile. Ceux-ci relèvent en effet de l’examen effectué par l’OFPRA.
Par ailleurs, s’il a transmis des documents à caractère médical, le demandeur doit avoir été informé des règles de protection du secret médical et de la confidentialité ainsi que de l’usage qui sera fait de ces pièces, « dans son strict intérêt (évaluation de la prise en charge médicale, adaptation de l’hébergement si nécessaire) ».
Enfin, l’intéressé doit être informé que ses réponses au questionnaire font l’objet d’un recueil sur support informatique.
La loi du 29 juillet 2015 a instauré une nouvelle procédure de domiciliation pour les demandeurs d’asile. Ainsi, tout demandeur qui ne dispose ni d’un hébergement, au sens du nouvel article L. 744-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et de l’asile(2), ni d’un domicile stable, bénéficie du droit d’élire domicile auprès d’une personne morale conventionnée à cet effet pour chaque département. Concrètement, les organismes ainsi conventionnés ou hébergeant de manière stable des demandeurs d’asile doivent remettre aux intéressés une déclaration de domiciliation. L’arrêté qui devait en fixer le modèle est paru. Délivrée aux demandeurs d’asile en possession d’une attestation de demande d’asile, la déclaration de domiciliation précise notamment le nom et l’adresse de la personne morale, sa date ainsi que l’énumération (des) droit(s) et prestation(s) sociale(s) ouverts pour lesquels le document peut être utilisé (accès à la couverture maladie universelle, ouverture d’un compte bancaire…).
Le décret du 21 octobre 2015, pris en application de la loi relative à la réforme du droit d’asile, a renvoyé au ministre de l’Intérieur le soin d’établir, par arrêté, trois documents types « aux fins de la gestion des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile [CADA et structures d’hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile] autres que les établissements hôteliers » : le cahier des charges de ces structures, leur règlement de fonctionnement et le contrat de séjour signé entre le gestionnaire de ces lieux et les demandeurs d’asile accueillis. Trois arrêtés sont parus pour fixer ces documents types pour les CADA.
On retrouve dans le cahier des charges un certain nombre de règles édictées par la circulaire du 19 août 2011 relative aux missions des CADA, avec toutefois des variantes. En termes de moyens humains, par exemple. A l’époque, le taux d’encadrement dans les CADA – auparavant d’au moins un équivalent temps plein (ETP) pour 10 personnes accueillies – avait été assoupli, pour être « compris entre 1 ETP pour 10 personnes et 1 ETP pour 15 personnes ». Le cahier des charges précise, pour sa part, que 1 ETP pour 15 personnes constitue la « norme applicable ». Cependant, « le seuil pourra […] être de 1 ETP pour plus de 15 résidents, tout en maintenant un niveau de prestations permettant d’assurer la qualité de l’accompagnement […] et dans la limite d’un ratio d’1 ETP pour 20 personnes hébergées ». A contrario, « en fonction des caractéristiques des centres et des publics accueillis et avec l’accord du préfet de département, un nombre moins important de personnes hébergées pourra être suivi […] par chaque ETP, dans la limite du ratio d’1 ETP pour 10 personnes hébergées ». On notera par ailleurs que, sans changement, il s’agit de retrouver, dans les CADA, un effectif composé d’au moins 50 % d’intervenants socio-éducatifs. « L’équipe doit présenter les qualifications professionnelles requises (animateur socioculturel, conseiller en économie sociale et familiale, éducateur spécialisé, moniteur éducateur, etc.) et avoir reçu une formation relative à la procédure d’asile », rappelle le document.
Au-delà, le cahier des charges détaille entre autres les missions des CADA (hébergement, accompagnement, scolarisation des enfants, gestion de la sortie du centre). Dans ce cadre, il indique notamment que les locaux d’hébergement mis à la disposition du demandeur d’asile doivent comporter des lieux d’habitation « adaptés, équipés de sanitaires, de mobilier, de cuisines collectives ou individuelles aménagées ainsi que de salles communes si possible ». La cohabitation de plusieurs personnes isolées ou ménages impliquant le partage des pièces à vivre « peut être organisée », indique-t-il encore. Toutefois, le cas échéant, un espace de vie individuel suffisant pour chaque résident – « un minimum de 7,5 m2 » – devra être ménagé. Autre précision : le CADA n’est pas tenu de proposer une prestation de restauration. Les frais de nourriture seront couverts par la nouvelle allocation pour demandeur d’asile(3).
Le cahier des charges évoque également le contrat de séjour et le règlement de fonctionnement du CADA – qui font donc, par ailleurs, chacun l’objet d’un arrêté distinct. Il indique que ces deux documents doivent être communiqués au demandeur d’asile dès son arrivée au centre. Pour résumer, le contrat de séjour formalise le cadre institutionnel de la prise en charge proposée, les prestations d’ordre social et administratif offertes par le lieu d’hébergement et les engagements attendus du demandeur d’asile durant son séjour. Le règlement de fonctionnement du CADA explicite, pour sa part, les obligations et les procédures liées à l’organisation du séjour dans le centre : usage des locaux, entretien, hygiène et sécurité, règles de vie collective, absences, suivi médical, accès au téléphone et au courrier, sanctions, motifs d’exclusion. « Complément essentiel au contrat de séjour », il vise à présenter au demandeur d’asile le fonctionnement de la structure et « à éviter des malentendus quant aux règles de vie en collectivité et de prise en charge ».
(2) Cet article vise les « lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile », formule qui recouvre les CADA et les structures d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile. Ces lieux valent élection de domicile pour les demandeurs d’asile qui y sont hébergés.