Comme à son habitude, après chaque modification de la liste des pays d’origine sûrs, le ministère de l’Intérieur tire les conséquences, dans une note du 17 octobre adressée aux préfets, de la décision du conseil d’administration de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 9 octobre dernier, qui a retiré la Tanzanie de la liste et y a réintégré le Kosovo(1).
Pour mémoire, les demandes d’asile formulées par les ressortissants des pays d’origine sûrs sont examinées par l’OFPRA dans le cadre d’une procédure prioritaire (dite, désormais, « accélérée »). Une procédure qui, depuis le 1er novembre – et c’est un effet de la loi du 29 juillet dernier relative à la réforme du droit d’asile(2) – a des conséquences moins importantes qu’auparavant sur les demandeurs d’asile en termes de conditions d’accueil (admission au séjour, éligibilité au dispositif national d’accueil, caractère suspensif du recours devant la Cour nationale du droit d’asile [CNDA]). Simplement, l’examen de la demande d’asile par l’OFPRA se fait en accéléré – 15 jours à compter de l’introduction de la demande – et, en cas de recours devant la CNDA, celui-ci sera jugé par un juge unique et dans un délai plus bref que dans le cadre d’une procédure normale – cinq semaines.
Pour présenter les conséquences de la révision de la liste des pays d’origine sûrs, le ministère distingue selon que la demande d’asile a été déposée avant le 1er novembre 2015 – date d’entrée en vigueur des dispositions de la loi du 29 juillet 2015 relatives à la mise en œuvre de la procédure accélérée – ou après cette date.
Les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) qui, dans leur version en vigueur avant le 1er novembre, permettent de refuser l’admission au séjour et de placer en procédure prioritaire l’examen de la demande d’asile, restent applicables jusqu’au 1er novembre aux ressortissants kosovars dont la demande a été présentée à compter du lendemain de la date de publication de la décision du conseil d’administration de l’OFPRA, soit à compter du 18 octobre. Ces dispositions s’appliquent plus précisément :
→ aux demandes d’admission au séjour au titre de l’asile dont les préfets ont été saisis et sur lesquelles ils n’ont pas encore statué au 18 octobre ;
→ aux demandes d’admission au séjour au titre de l’asile dont les préfets ont été saisis à compter du 18 octobre et jusqu’au 1er novembre.
Le ministère rappelle toutefois que les préfets ont la possibilité, dans des cas relevant de leur pouvoir d’appréciation, d’admettre les intéressés au séjour provisoire et de ne pas appliquer la procédure prioritaire. En outre, l’OFPRA peut, depuis le 20 juillet dernier, reclasser en procédure normale des demandes que les préfectures auraient classées en procédure prioritaire.
Les demandes d’asile de Kosovars encore en cours d’examen devant l’OFPRA ou la CNDA à la date du 18 octobre, doivent pour leur part être traitées selon la procédure de droit commun jusqu’à la décision de l’office ou, si un recours a été formé ou est formé dans le délai réglementaire,jusqu’à la décision de la CNDA.
Enfin, s’agissant des demandes d’asile enregistrées à compter du 1er novembre 2015, les nouvelles dispositions relatives à la procédure accélérée et celles qui sont relatives au droit au maintien sur le territoire du demandeur – qui empêchent que, en cas de recours devant la CNDA, contrairement à auparavant, le demandeur d’un pays d’origine sûr puisse être renvoyé dans l’attente de la décision – leur sont applicables.
Les préfets doivent par ailleurs, immédiatement, ne plus mettre en œuvre à l’égard des ressortissants tanzaniens la procédure prioritaire d’examen en vigueur avant le 1er novembre 2015. Ces personnes doivent être « admises au séjour » selon la procédure de droit commun en vigueur avant cette date. Autrement dit, ils doivent être traités, sous le régime antérieur, comme des ressortissants de pays ne figurant pas sur la liste des pays d’origine sûrs.
S’agissant des Tanzaniens dont la demande d’asile a déjà été enregistrée en procédure prioritaire mais n’a pas encore fait l’objet d’une décision de l’OFPRA ou de la CNDA en cas de recours, le ministère indique qu’ils pourront se voir délivrer un récépissé d’admission provisoire au séjour, renouvelable jusqu’à la notification de la décision définitive sur leur demande d’asile. Les préfets pourront convoquer les intéressés pour procéder à ces changements de statut ou le réaliser lorsqu’ils se présenteront en préfecture.
Autre hypothèse : si une décision de refus de séjour assortie d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), non encore exécutée, a été prise à l’encontre d’un Tanzanien et qu’un recours est pendant devant la CNDA, les préfets doivent retirer cette OQTF et, s’il en remplit encore les conditions, délivrer à l’intéressé un récépissé qui sera renouvelé jusqu’à la notification de la décision de la CNDA.
Le retrait de la Tanzanie de la liste des pays d’origine sûrs n’exclut toutefois pas la possibilité, si les conditions sont remplies, de maintenir ou de décider du placement des ressortissants de ce pays en procédure prioritaire pour d’autres motifs que l’appartenance de la Tanzanie aux pays d’origine sûrs, conformément aux 3° et 4° de l’article L. 741-4 du Ceseda en vigueur avant le 1er novembre 2015(3).
Quant aux demandes enregistrées en préfecture après le 1er novembre 2015, les règles sont simples : les nouvelles dispositions relatives à la procédure normale d’examen par l’OFPRA et la CNDA ainsi que celles qui sont relatives au droit au maintien sur le territoire du demandeur leur sont applicables. Toutefois, là encore, l’application de la procédure accélérée, dans les conditions de la loi du 29 juillet 2015, reste possible pour d’autres motifs que l’appartenance à la Tanzanie aux pays d’origine sûrs.
(3) Si la présence en France de l’étranger constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’Etat. Ou si la demande d’asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d’asile ou n’est présentée qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement prononcée ou imminente.