Dans une longue lettre adressée le 14 octobre au défenseur des droits, le ministre de l’Intérieur conteste vivement les conclusions de son rapport très critique sur l’accès aux droits fondamentaux des migrants à Calais, rendu public quelques jours plus tôt(1). Il regrette notamment que le gouvernement n’ait jamais été consulté au cours de la préparation de ce document et que, « sur ce sujet sensible et difficile », l’institution « n’ait pas davantage pris le temps de l’expertise approfondie et de l’analyse des causes et se soit bornée à une compilation d’éléments, souvent imprécis, voire inexacts ». Revenant « sur certains des points » soulevés par Jacques Toubon dans son rapport, le ministre de l’Intérieur estime que ce document « méconnaît une situation exceptionnelle », en ne faisant « aucune mention du contexte migratoire actuel, alors qu’il constitue à l’évidence un élément déterminant tant de la crise que de la stratégie suivie par l’Etat ».
Que ce soit sur la politique de sécurisation de la frontière et des infrastructures calaisiennes (port, tunnel), sur l’hébergement d’urgence, sur l’accès à la procédure d’asile, sur les évacuations de campements illicites, sur l’offre de soins ou sur les violences imputées aux forces de l’ordre, Bernard Cazeneuve réfute longuement les griefs formulés par le défenseur, en relevant au passage des « inexactitudes factuelles » concernant le nombre de points d’eau sur la lande – qui compte, selon lui, 15 robinets et non trois – ou la présence effective de quatre et non pas deux bennes à ordures réparties sur le terrain.
Plus précisément, en matière d’hébergement d’urgence, « le gouvernement ne s’est pas dérobé à ses responsabilités », défend le ministre de l’Intérieur, en évoquant en particulier, au-delà de la création controversée du centre Jules-Ferry, l’ouverture en mars dernier d’un centre dédié aux femmes et aux enfants, d’une capacité d’accueil de 100 places, qui doit être doublée d’ici à la fin de l’année. « Dans l’attente, mes services travaillent à l’organisation d’un hébergement temporaire des femmes et enfants présents sur la lande, qui ne trouveraient pas de solution ailleurs et ne souhaiteraient pas quitter Calais », poursuit Bernard Cazeneuve.
Il promet aussi que « des dispositifs exceptionnels seront mis en place dans le cadre de la période hivernale », alors que les associations à l’œuvre dans le Calaisis craignent « une catastrophe humanitaire »(2) et que, selon diverses estimations, le nombre de migrants vivant actuellement tourne autour de 4 000 personnes. A cet égard, « je ne peux laisser dire, comme le suggère votre rapport, que l’Etat organiserait délibérément des conditions matérielles de vie indécentes », martèle le ministre dans son courrier à Jacques Toubon, en déplorant des « insinuations […] au mieux injustes, au pire malveillantes ».
Quant à l’accès à la procédure d’asile, alors que le nombre de demandes enregistrées ne cesse d’augmenter pour atteindre « près de 100 nouvelles demandes recevables par semaine » en septembre, le ministre renvoie à la réforme du droit d’asile votée l’été dernier(3), qui doit permettre, selon ses dires, « par une réduction drastique des délais et un hébergement directif, une amélioration substantielle de notre dispositif ».
S’agissant, enfin, de l’accès aux soins, Bernard Cazeneuve rappelle la présence d’une infirmerie au centre d’accueil Jules-Ferry (de 10 heures à 17 heures) et les moyens mis en œuvre par la permanence d’accès aux soins de santé située près de l’hôpital de Calais, « qui a bénéficié de différents renforts soignants depuis un an afin d’assurer la présence quotidienne de deux infirmiers par jour tout au long de la journée ».
Dans une tribune publiée le 19 octobre sur