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Le projet de loi de finances pour 2016

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Le projet de loi de finances pour 2016

Le projet de budget de l’Etat tend à réduire les dépenses publiques de 16,5 milliards d’euros l’an prochain, tout en finançant les mesures d’urgence décidées en faveur de l’accueil des réfugiés et en poursuivant la baisse de l’impôt sur le revenu ainsi que la mise en œuvre des dispositifs en faveur de la croissance, de la compétitivité et de l’emploi. Le texte réforme également le mode de revalorisation des prestations sociales et les aides personnelles au logement.

Le ministre des Finances et des Comptes publics et le secrétaire d’Etat chargé du budget ont présenté le 30 septembre, en conseil des ministres, le projet de loi de finances pour 2016 par lequel le gouvernement entend poursuivre son objectif de 50 milliards d’économies sur les dépenses des administrations publiques entre 2015 et 2017, dont 16,5 milliards l’année prochaine (après 21 milliards en 2015). Ce qui passe, selon Michel Sapin et Christian Eckert, par une baisse des crédits alloués aux ministères et aux opérateurs (– 5,1 milliards), par une dotation globale de fonctionnement des collectivités locales rénovée et abaissée de 3,5 milliards d’euros et une diminution des dépenses de protection sociale de 7,4 milliards d’euros, dont 3,4 milliards pour l’assurance maladie, prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016(1). L’an prochain, la mise en œuvre des mesures d’économies permettra donc à nouveau « de limiter à un niveau historiquement bas la progression de la dépense publique », affirme Bercy. Qui ajoute que cela ne remet toutefois pas en cause l’ensemble des mesures annoncées en faveur de la croissance, de la compétitivité et de l’emploi : le « crédit impôt compétitivité emploi », le « pacte de responsabilité et de solidarité » et les plans en faveur de l’investissement et des petites et moyennes entreprises seront ainsi mis en œuvre comme prévu pour un total de 33 milliards d’euros en 2016. La baisse de l’impôt sur le revenu, amorcée dès 2014, sera aussi amplifiée l’an prochain, pour un montant total de 5 milliards d’euros. Pour le ministère des Finances, le projet de budget pour 2016 assure aussi « les redéploiements nécessaires pour faire face aux priorités et aux urgences, avec un principe : toute dépense nouvelle doit être financée. La maîtrise de la dépense publique […] s’accompagnera ainsi du financement par redéploiement des mesures nouvelles » en faveur notamment de la sécurité ou de l’accueil des réfugiés.

Malgré les 5,1 milliards d’euros d’économies annoncées sur le budget de l’Etat, reposant en partie sur la maîtrise de l’évolution de la masse salariale (– 0,8 milliard), le projet de loi de finances pour 2016 poursuit le programme de création de postes dans les secteurs prioritaires décidés par le chef de l’Etat en 2012 : 60 000 dans l’enseignement et 5 000 dans les secteurs de la sécurité et de la justice. « Compte tenu des créations d’emplois prévues l’an prochain, 49 185 équivalents temps plein (ETP) dans l’enseignement, 3 391 ETP à la justice et 2 560 ETP dans la sécurité auront ainsi été créés à la fin de l’année depuis le début du quinquennat », indique Bercy. Si les crédits d’intervention de l’Etat baissent de 2,7 milliards d’euros grâce à la mise en œuvre de réformes ciblées sur chaque secteur ministériel (fusion de la prime pour l’emploi et du revenu de solidarité active, réforme des aides personnelles au logement…), certains programmes ministériels échappent aux restrictions budgétaires et voient leurs moyens progresser, comme la justice, l’enseignement scolaire, l’immigration et l’asile, la politique de la ville et la santé.

Le projet de loi de finances pour 2016 comporte par ailleurs plusieurs mesures d’ordre social et fiscal, parmi lesquelles l’amorce de la mise en place du prélèvement à la source pour l’impôt sur le revenu, de nouvelles règles de revalorisation des prestations sociales, une réforme des aides personnelles au logement pour mieux prendre en compte la situation financière réelle des bénéficiaires, la poursuite de la réforme de l’aide juridictionnelle ou de nouvelles mesures en faveur des anciens combattants et de leurs conjoints survivants.

Le texte est examiné par l’Assemblée nationale depuis le 13 octobre et jusqu’au 29 octobre. Il devra ensuite l’être par le Sénat, à une date encore inconnue.

I. Les mesures fiscales et sociales

Le projet de loi de finances pour 2016 comporte, comme en 2015, plusieurs dispositions qui tendent à alléger le montant de l’impôt sur le revenu des ménages aux revenus modestes ou moyens. Il prépare également la mise en place du dispositif de prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Le texte complète par ailleurs à les mesures prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 afin de regrouper les dates de revalorisations des prestations sociales soit au 1er avril, soit au 1er octobre de chaque année.

Il prévoit aussi de revoir les modalités d’attribution des aides personnelles au logement et de créer un Fonds national des aides à la pierre.

Enfin, d’autres mesures concernent les anciens combattants, les fonctionnaires et agents publics victimes de l’amiante et les petites et moyennes entreprises.

A. La fiscalité des ménages

Avec le projet de loi de finances pour 2016, le gouvernement entend poursuivre le mouvement de baisse de l’impôt sur le revenu amorcé en 2014. Selon lui, cela permettra une « baisse d’impôt pour 12 millions de foyers, soit les 2/3 des foyers payant l’impôt sur le revenu, pour un montant total de 5 milliards d’euros » depuis 2014, dont 2 milliards d’euros et 8 millions de foyers concernés en 2016. Il propose également une première étape vers la mise en place du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, au 1er janvier 2018.

1. La modification du barème de l’impôt sur le revenu

En 2016, les limites des tranches du barème de l’impôt sur le revenu devraient être revalorisées comme l’évolution de l’indice des prix hors tabac de 2015 par rapport à 2014, soit de 0,1 %. En conséquence, le barème de l’impôt applicable aux revenus 2015 devrait être le suivant :

2. La hausse du plafond des avantages procurés par le quotient familial

Par ailleurs, le texte gouvernemental prévoit de porter le plafond général du quotient familial de 1 508 € pour chaque demi-part accordée pour charge de famille à 1 510 €. Ainsi, chaque demi-part liée à une personne à charge ne pourra aboutir à une réduction d’impôt supérieure à 1 510 € (755 € pour un quart de part).

Les contribuables qui vivent seuls et supportent effectivement la charge principale ou exclusive de leurs enfants devraient en outre continuer de bénéficier d’une part entière de quotient familial pour le premier enfant, dans la limite d’un plafond qui passerait de 3 558 € à 3 562 €.

De la même manière, le montant du plafonnement général des effets du quotient familial pour chaque demi-part ou part accordée en application de dispositions particulières liées à la situation du contribuable (anciens combattants, invalides, veufs avec enfant à charge) devrait être revalorisé. Ainsi, l’avantage fiscal octroyé à certains titulaires de demi-parts additionnelles à un titre autre que familial – veufs, invalides et anciens combattants – devrait passer de 1 504 € à 1 506 €. Quant à la réduction d’impôt complémentaire mise en place par la loi de finances pour 2013 pour neutraliser l’effet de la baisse du plafonnement du quotient familial sur les personnes veuves ayant des personnes à charge et bénéficiant du maintien du quotient familial, elle devrait s’établir à 1 682 € (au lieu de 1 680 €).

Par ailleurs, le plafond spécifique prévu pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés vivant seuls et ayant des enfants imposés séparément – dispositif dit « vieux parents » – devrait être porté à 902 € (contre 901 €).

Enfin, l’abattement accordé en cas de rattachement au foyer fiscal d’un enfant marié, pacsé ou chargé de famille devrait être fixé à 5 732 € par personne ainsi rattachée (contre 5 726 €).

3. L’aménagement de la décote

Une nouvelle fois, le mécanisme de la décote, qui bénéficie aux foyers faiblement imposés, devrait être aménagé afin de favoriser les ménages aux revenus modestes et moyens. Pour mémoire, la décote est une réduction d’impôt qui bénéficie à l’ensemble des foyers fiscaux dont la cotisation, après application du barème progressif et du quotient familial, est inférieure à certaines limites.

Ainsi, pour l’imposition des revenus 2015, le montant de l’impôt devrait être diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre :

→ 1 165 € (au lieu de 1 135 €) et les trois quarts du montant de l’impôt (et non plus la totalité de l’impôt) pour les célibataires, divorcés ou veufs. Est donc visé le contribuable redevable d’un impôt jusqu’à 1 553 € au lieu de 1 135 € ;

→ 1 920 € (au lieu de 1 870 €) et les trois quarts du montant de l’impôt (et non plus la totalité de l’impôt) pour les couples. Sont donc visés les contribuables redevables d’un impôt de 2 560 € au lieu de 1 870 € auparavant.

(Exemple) Pour un couple marié redevable d’un impôt brut de 2 200 €, la décote devrait être calculée de la façon suivante :

1 920 € − (3/4 × 2 200 €) = 270 €

L’impôt dû après décote serait donc de 2 200 – 270 = 1 930 €.

Selon l’exposé des motifs du projet de loi, l’impôt devrait ainsi être « allégé pour 8 millions de contribuables ». Et le gain moyen par foyer concerné serait de 252 €. « Parmi eux, on compte 3 millions de foyers dont les revenus ne leur auraient pas permis de bénéficier de la suppression de la première tranche [de l’impôt sur le revenu] en 2015 », poursuit le gouvernement.

4. L’amorce de la mise en place du prélèvement à la source

Un article du projet de loi impose au gouvernement de présenter au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2016, les modalités de mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu à compter de 2018. A cet effet, sans remettre en cause « les principes fondateurs de notre système fiscal », une large consultation devrait être conduite en 2016 sur les modalités de mise en œuvre de ce prélèvement à la source.

Selon le gouvernement, « cette réforme de grande ampleur permettra de supprimer le décalage d’un an entre la perception du revenu et du paiement de l’impôt et réduira ainsi les difficultés de paiement de l’impôt lorsque les contribuables subissent des variations de revenus ou changent de situation. Elle constituera une simplification pour les contribuables. »

5. La généralisation de la déclaration en ligne

Afin, selon le gouvernement, « de faciliter les démarches des contribuables » et « d’alléger la charge administrative de traitement de l’impôt », il est proposé une généralisation graduelle de la déclaration en ligne sur 4 ans, de 2016 à 2019, pour les contribuables dont la résidence principale est équipée d’un accès à Internet. Pendant cette phase de transition, seuls seraient visés par cette généralisation les contribuables dont le revenu fiscal de référence est supérieur à un certain seuil : 40 000 € en 2016 (revenus 2015), 28 000 € en 2017 (revenus 2016), 15 000 € en 2018 (revenus 2017). Devraient ainsi être concernés 2 millions de déclarants supplémentaires en 2016, 4 millions supplémentaires en 2017 et 9 millions supplémentaires en 2018.

Les contribuables qui indiqueraient à l’administration ne pas être en mesure de souscrire cette déclaration par voie électronique conserveraient néanmoins la faculté de le faire sur formulaire papier.

Le non-respect de cette obligation de déclaration en ligne entraînerait l’application d’une amende forfaitaire de 15 € par déclaration à compter de la deuxième année au cours de laquelle un manquement est constaté.

Les économies estimées sont de 68,5 millions d’euros par an à la fin de la période de mise en œuvre du dispositif, notamment grâce à une diminution des frais d’affranchissement.

(A noter) Le paiement dématérialisé (paiement en ligne ou par prélèvement mensuel ou à l’échéance) de l’ensemble des impôts des particuliers devrait également être favorisé avec un abaissement progressif du seuil le rendant obligatoire à 10 000 € (au lieu de 30 000 € actuellement) pour les paiements effectués à compter du 1er janvier 2016, à 2 000 € pour ceux qui seront effectués à compter du 1er janvier 2017, à 1 000 € à compter du 1er janvier 2018 et à 300 € à compter du 1er janvier 2019. Comme aujourd’hui, en cas de non-respect de cette obligation, une majoration de 0,2 % de l’impôt dû serait appliquée, mais avec un montant minimal de 15 € au lieu de 60 € pour les paiements effectués à compter du 1er janvier 2016.

B. De nouvelles règles de revalorisation des prestations sociales

Dans un souci de meilleure lisibilité et de clarification, le projet de loi tend à appliquer, à compter du 1er janvier 2016, de nouvelles modalités de revalorisation aux principaux minima sociaux et prestations à la charge de l’Etat ou des conseils départementaux. Cette réforme devrait permettre « une amélioration des finances publics de l’ordre de 500 millions d’euros en 2016 », relève le gouvernement.

(A noter) Il est prévu des dispositions similaires dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 s’agissant des prestations relevant des organismes de sécurité sociale(2).

1. La simplification des dates de revalorisation

A compter du 1er janvier 2016, le projet de loi prévoit qu’il n’y aura plus, chaque année, que deux dates de revalorisation :

→ le 1er octobre pour l’aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine, dont les modalités de mise en œuvre viennent d’être fixées par décret (voir ce numéro, page 36) ;

→ le 1er avril pour :

– l’allocation supplémentaire d’invalidité,

– l’allocation aux adultes handicapés,

– le revenu de solidarité active et la prime d’activité,

– l’allocation de solidarité spécifique,

– l’allocation temporaire d’attente.

2. L’unification du critère de revalorisation

Par ailleurs, à partir de 2016, les revalorisations annuelles de l’ensemble des prestations sociales devraient être effectuées sur la base de l’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les 12 derniers indices mensuels de ces prix publiés par l’INSEE l’avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées (soit août pour une revalorisation au 1er octobre et février pour une revalorisation au 1er avril). La revalorisation devrait donc être effectuée sur la base de l’inflation constatée, et non pas de l’inflation prévisionnelle comme c’est actuellement le cas pour certaines prestations.

Par ailleurs, un bouclier garantissant le maintien des prestations à leur niveau antérieur en cas d’inflation négative devrait être mis en place. Ainsi « une éventuelle évolution négative des prestations [serait] neutralisée », explique l’exposé des motifs.

C. Le financement du RSA « jeunes »

En 2016, l’Etat, via le Fonds national des solidarités actives (FNSA), devrait continuer à financer, à la place des conseils départementaux, les dépenses de revenu de solidarité active (RSA) « socle » versé aux jeunes actifs de 18 à 24 ans.

Contrairement au dispositif de droit commun qui prévoit un partage du financement du RSA entre les départements (RSA « socle ») et l’Etat (RSA « activité »), l’intégralité du RSA versé aux jeunes de moins de 25 ans a été prise en charge par le FNSA depuis l’élargissement de ce dispositif aux moins de 25 ans en 2010. Dans le contexte de la mise en place de la prime d’activité à compter du 1er janvier prochain(3), et dans l’attente d’une éventuelle réforme du RSA « jeunes » après l’évaluation de l’expérimentation de la « garantie jeunes »(4), il est apparu au gouvernement « préférable d’attendre les résultats définitifs de cette expérimentation avant de procéder à un éventuel transfert de la charge du “RSA jeunes” aux départements », explique l’exposé des motifs.

D. Les mesures sur le logement

Le projet de loi de finances pour 2016 met en œuvre une réforme des aides personnelles au logement visant, selon le gouvernement, « à assurer une plus grande équité de ces aides, par une meilleure prise en compte de la situation financière réelle des bénéficiaires dans le calcul de l’aide ». Ce faisant, l’exécutif suit les préconisations récentes d’un groupe de travail de l’Assemblée nationale présidé par le député (PS) du Val-d’Oise et maire de Sarcelles, François Pupponi(5). L’économie nette pour l’Etat est évaluée à 185 millions d’euros en 2016 et à 274 millions d’euros en 2017.

Par ailleurs, le texte propose de réformer le financement du logement social « en impliquant davantage les bailleurs sociaux dans le financement et la gouvernance du système des “aides à la pierre” ».

1. La réforme des aides personnelles au logement

Afin, selon l’exposé des motifs, de mieux prendre en compte « la situation financière réelle des bénéficiaires » des aides personnelles au logement, le texte comprend des mesures concernant l’appréciation des ressources retenues, l’introduction de plusieurs plafonds de loyers et la disparition de la minoration des ressources prises en compte pour les moins de 25 ans. En parallèle, il est proposé de supprimer la réforme des aides au logement « accession » votée dans le cadre de la loi de finances pour 2015.

A Suppression de la réforme des aides au logement « accession »

Introduite par l’article 93 de la loi de finances pour 2015, la réforme des aides au logement « accession », qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2016, devrait être supprimée. S’appuyant sur les conclusions du groupe parlementaire conduit par le député François Pupponi, le gouvernement propose en effet de revenir sur le texte adopté l’an dernier selon lequel, lorsque la demande d’aide concerne certains logements occupés par des propriétaires ou par des titulaires de contrats de location-accession, l’aide n’est accordée qu’à la condition d’une baisse de ressources des intéressés de plus de 30 % entre la signature du prêt immobilier et la demande d’aide.

B Prise en compte du patrimoine du demandeur

Le projet de loi prévoit que, pour l’octroi de l’aide personnalisée au logement (APL) et de l’allocation de logement sociale (ALS) ou familiale (ALF), seront prises en compte à l’avenir non seulement les ressources du demandeur, mais aussi la valeur en capital de son patrimoine. « Certains bénéficiaires peuvent [en effet] détenir un patrimoine pouvant générer des revenus, ce qui a vocation à être intégré dans l’évaluation de leur situation financière », explique l’exposé des motifs.

Selon le texte, la détermination et les conditions de prise en compte de la valeur du patrimoine devraient être définies par décret, étant précisé que cette réforme devrait entrer en vigueur au 1er octobre 2016 pour les prestations dues à compter de cette date.

C Diminution de l’aide au-delà d’un certain plafond de loyer

Autre mesure proposée : la création de plusieurs plafonds de loyers à compter du 1er juillet 2016, pour les prestations dues à compter de cette date. En effet, souligne le gouvernement, « certains bénéficiaires assument des loyers d’un montant particulièrement élevé par rapport aux revenus qu’ils déclarent : une diminution progressive de l’aide au-delà d’un certain plafond de loyer permet alors de mieux prendre en compte leur capacité financière effective et de ne pas subventionner des logements dont la taille serait trop grande par rapport aux besoins réels du ménage ou dont le loyer rapporté à la taille du ménage serait excessif ».

D Suppression de la minoration des ressources en faveur des moins de 25 ans

Le projet de loi propose d’abroger, dès le 1er janvier 2016, les dispositions prévoyant que les ressources prises en compte (celles de l’année N – 2) sont minorées lorsque le demandeur est âgé de moins de 25 ans et bénéficie d’un contrat de travail autre qu’un contrat à durée indéterminée. Cette minoration accordée sur critère d’âge est « sans lien avec les revenus réels des personnes concernées », estime le gouvernement dans l’exposé des motifs.

E Financement des aides au logement

Le projet de loi de finances pour 2016 revoit le financement des aides au logement pour les droits constatés à compter du 1er janvier 2016 dans un objectif d’unification du financement. Il prévoit ainsi de transférer le financement de l’ALF, qui pèse actuellement sur la caisse nationale des allocations familiales et la caisse centrale de mutualité sociale agricole, vers le Fonds national d’aide au logement pris en charge par l’Etat et qui finance déjà l’APL et l’ALS.

Les caisses d’allocations familiales et de mutualité sociale agricole continueraient toutefois à assurer la gestion de l’ALF comme aujourd’hui.

2. La création d’un Fonds de financement du logement social

Au plus tard le 1er juillet 2016, un Fonds national des aides à la pierre (FNAP) devrait être instauré par décret, sous la forme d’un établissement public administratif à caractère national afin « de contribuer […] au financement des opérations de développement, d’amélioration et de démolition du parc de logements locatifs sociaux appartenant » aux bailleurs sociaux, précise le projet de loi. Ce, explique l’exposé des motifs, « afin de répondre à la demande croissante de logements sociaux et au renouvellement du parc ancien ».

A titre accessoire, ce fonds pourrait également participer au financement de dépenses de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale qui ont pour objectif de promouvoir l’accès au logement des personnes et familles défavorisées, du système d’enregistrement national des demandes de logements sociaux, ainsi que de diverses dépenses d’ingénierie et d’accompagnement visant à moderniser le secteur du logement social.

« La gouvernance de cet établissement public sera exercée par un conseil d’administration composé de représentants de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale et des bailleurs sociaux, ce qui permettra une gouvernance partagée entre l’ensemble des acteurs du monde HLM pour assurer la gestion des aides à la pierre », assure le gouvernement dans l’exposé des motifs.

Le FNAP devrait être doté de ressources pérennes, notamment une fraction de la cotisation versée par les bailleurs sociaux pour le financement des aides à la pierre qui, pour 2016, devrait être relevée à 270 millions d’euros. De son côté, l’Etat devrait lui verser 250 millions d’euros l’an prochain, a annoncé le président de la République le 24 septembre dernier(6).

En parallèle, le projet de loi prévoit de supprimer, au plus tard le 1er août 2016, le fonds de péréquation actuellement dédié au financement des aides à la pierre (mentionné à l’article L. 452-1-1 du code de la construction et de l’habitation) et le Fonds national de développement d’une offre de logements locatifs très sociaux. Leurs missions et ressources devraient être affectées au FNAP.

E. La réforme de l’aide juridictionnelle

Le projet de loi de finances pour 2016 relève les plafonds de ressources pour l’octroi de l’aide juridictionnelle et poursuit la réforme du financement de l’aide entreprise depuis quelques années.

1. La hausse des plafonds d’octroi

Les plafonds de ressources à ne pas dépasser pour bénéficier de l’aide juridictionnelle devraient être portés en 2016 à :

→ 1 000 € par mois pour l’aide juridictionnelle totale (au lieu de 941 € en 2015) ;

→ 1 500 € par mois pour l’aide juridictionnelle partielle (au lieu de 1 411 €).

Sans changement, ces plafonds seront affectés de correctifs pour charge de famille.

Selon l’exposé des motifs, près de 100 000 nouveaux justiciables devraient ainsi être éligibles à ce dispositif.

En outre, ces plafonds devraient à l’avenir être « révisés chaque année en fonction de l’évolution constatée des prix à la consommation hors tabac » et non plus « comme la tranche la plus basse du barème de l’impôt sur le revenu ».

2. Un nouveau mode de financement

Le gouvernement propose de réformer le mode de rémunération des avocats commis d’office, de créer de nouveaux cas de rétributions de ces professionnels et de diversifier encore les sources de financement de l’aide juridicitionnelle.

Cette réforme ne satisfait pas le président du Conseil national des barrreaux, Pascal Eydoux, qui a déploré, lors du congrès des avocats le 9 octobre, que les propositions de financement de la profession – taxation des actes juridiques alimentant un fonds d’aide juridique, extension de l’assurance de protection juridique… – n’aient « toujours pas été étudiées de bonne foi par les pouvoirs publics ». Selon lui, « le veto gouvernemental sur le financement par le budget de l’Etat ou par des taxes parafiscales prive de tout intérêt les discussions sur une réforme d’envergure ».

A Rémunération de base pour les avocats

Le projet de loi met en place une rémunération de base pour les avocats, assise sur une unité de valeur généralisée à toute l’aide juridictionnelle et revalorisée à 24,20 € hors taxe (HT), soit 8 % de plus par rapport au montant actuel.

Cette rémunération de base devrait être complétée par une rétribution complémentaire qui remplacerait, pour les faits générateurs postérieurs au 31 décembre 2015, la modulation géographique actuelle de l’unité de valeur. Elle serait « destinée à prendre en compte les charges et contraintes spécifiques liées à certaines missions d’aide juridique, la longueur et la complexité des procédures au titre desquelles l’aide est accordée ainsi que les conditions particulières d’exercice de ces missions dans le ressort de la juridiction au sein duquel elles sont réalisées », précise le texte. Les missions susceptibles d’ouvrir droit au bénéfice de cette rétribution complémentaire devraient être définies par décret. Ce texte devrait fixer également les conditions dans lesquelles, dans le ressort de chaque tribunal de grande instance, une convention conclue entre les chefs de juridiction et le bâtonnier, après avis du premier président de la cour d’appel et du procureur général de cette cour, arrêtera le montant ou le mode de calcul de la rétribution complémentaire. A défaut de convention passée dans le délai de 3 mois suivant la publication de ce décret, le montant ou le mode de calcul de la rétribution complémentaire applicable dans le barreau concerné serait fixé par arrêté.

B De nouveaux cas de rétribution des avocats

Le projet de loi prévoit que les avocats seront à l’avenir rétribués lorsqu’ils assistent une personne éligible à l’aide juridictionnelle :

→ dans le cadre d’une médiation ordonnée par le juge ;

→ lorsque le juge est saisi aux fins d’homologation d’un accord intervenu à l’issue d’une médiation qu’il n’a pas ordonnée.

(A noter) Le texte permet également à une partie éligible à l’aide juridictionnelle d’obtenir, à certaines conditions, la prise en charge d’une part de la rémunération du médiateur.

C Diversification des sources de financement

Le projet de loi poursuit la diversification du financement de l’aide juridique, avec notamment :

→ le relèvement de la taxe sur les contrats d’assurance de protection juridique (+ 10 millions d’euros en 2016 et + 10 millions supplémentaires en 2017) et de la taxe sur les actes d’huissier (+ 10 millions d’euros en 2016 et + 10 millions en 2017) ;

→ l’introduction d’une contribution des avocats par le biais d’une affectation au Conseil national des barreaux d’une partie des produits financiers des fonds placés dans les caisses des règlements pécuniaires des avocats(7) (+ 5 millions en 2016 et + 5 millions en 2017).

F. Le financement des mesures de protection juridique des majeurs

Le projet de budget 2016 transfère à l’Etat, à partir du 1er janvier 2016, une partie du financement du dispositif de protection juridique des majeurs jusqu’alors pris en charge par les organismes de sécurité sociale. Ces transferts de financement s’inscrivent dans le cadre de la compensation par l’Etat à la sécurité sociale des pertes dues à la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité. Des pertes estimées à 5,3 milliards d’euros et liées notamment au renforcement des allégements de cotisations sociales patronales.

Actuellement, le financement public des mesures de protection juridique des majeurs, qui complète le cas échéant la participation financière de la personne protégée, est fonction de la nature de la mesure et des mandataires qui les mettent en œuvre (services, personne physique à titre individuel…). Il est pris en charge par l’Etat, la sécurité sociale ou le département, selon l’origine des prestations sociales versées à la personne protégée(8).

S’agissant du financement des mesures juridiques de protection des majeurs, le projet de loi prévoit que les services mandataires à la protection juridique des majeurs (hors ceux qui sont gérés par certains établissements de santé ou par des établissements médico-sociaux pour personnes âgées ou handicapées) seront financés, déduction faite de la participation financière du majeur protégé, sous forme de dotation globale à la charge du département du lieu d’implantation du siège de l’organisme gestionnaire du service à hauteur de 0,3 % et de l’Etat pour le solde (9). Les organismes de sécurité sociale ne devraient donc plus faire partie des financeurs potentiels.

En ce qui concerne la rémunération des mandataires judiciaires exerçant à titre individuel, elle devrait être prise en charge par l’Etat.

Par ailleurs, les agents des organismes de sécurité sociale devraient être habilités à transmettre au représentant de l’Etat dans le département les informations dont ils disposent sur les ressources de leurs allocataires et les prestations qu’ils leur servent afin de permettre aux services de l’Etat dans le département de vérifier le montant de la participation de la personne protégée au financement du coût des mesures de protection.

G. Les dispositions concernant les anciens combattants

Le projet de loi de finances pour 2016 contient deux dispositions concernant, d’une part, les conjoints survivants des grands invalides de guerre et, d’autre part, les anciens supplétifs et leur conjoint survivant.

1. Pour les conjoints survivants de grands invalides de guerre

Actuellement, d’après l’article L. 52-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, une majoration spéciale est attribuée, pour les soins donnés par eux à leur conjoint décédé, aux conjoints survivants des grands invalides de guerre qui étaient bénéficiaires de l’allocation spéciale n° 5 bis/b (allocation accordée aux aveugles, aux amputés de deux ou plus de leurs membres et aux paraplégiques) ou n° 5 bis/a (allocation accordée aux autres invalides) lorsqu’ils sont titulaires d’une pension et qu’ils justifient d’une durée de mariage et de soins donnés d’une manière constante pendant au moins 10 années.

Montant de la majoration spéciale aux veuf(ve)s de grands invalides de guerre

Déjà revu par la loi de finances pour 2015(10), le dispositif devrait faire à nouveau l’objet de modifications à compter du 1er juillet 2016.

Ainsi, la condition de mariage requise devrait être ramenée de 10 à 5 ans et le pacte civil de solidarité (PACS) devrait être pris en compte pour la même durée. En outre, un « principe de proportionnalité de la majoration spéciale […] en fonction du nombre d’années de mariage ou de pacte civil de solidarité et de soins donnés de manière constante par le conjoint survivant » devrait être introduit (pour les montants, voir tableau ci-dessous).

2. Pour les anciens supplétifs et leur conjoint survivant

A Allocation viagère pour les conjoints survivants

A l’heure actuelle, la reconnaissance du service rendu à la Nation par les harkis et les anciens membres des formations supplétives est principalement fondée sur une allocation de reconnaissance de la Nation en faveur des Français rapatriés, prévue par l’article 6 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation. Toutefois, en application de l’article 52 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale, les demandes d’octroi de l’allocation de reconnaissance « sont forcloses depuis le 20 décembre 2014 », explique l’exposé des motifs. C’est pourquoi, le projet de budget 2016 propose l’instauration d’une allocation viagère d’un montant annuel de 3 415 €, indexé sur le taux d’évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation de tous les ménages (hors tabac), au profit des seuls « conjoints et ex-conjoints, mariés ou ayant conclu un pacte civil de solidarité, survivants de harkis, moghaznis et personnels des autres formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie qui ont fixé leur domicile en France ».

Le bénéfice de cette allocation devrait être ouvert dès lors que le conjoint ou l’ex-conjoint survivant :

→ n’est pas remarié ou n’a pas conclu un PACS ;

→ ne perçoit pas l’allocation de reconnaissance ni n’a perçu un capital remplaçant, en tout ou partie, l’allocation de reconnaissance ;

→ présente sa demande dans le délai de 1 an suivant le décès de l’ancien membre des formations supplétives.

Les demandes d’attribution de l’allocation présentées par les conjoints et ex-conjoints survivants d’anciens membres des formations supplétives décédés avant la date d’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif – conditionné à la publication d’un décret – seront recevables jusqu’au 31 décembre 2016, sous réserve de remplir les deux premières conditions d’octroi, précise le projet de loi.

Le texte prévoit également les modalités selon lesquelles l’allocation sera, le cas échéant, répartie entre les conjoints et ex-conjoints survivants non remariés ou n’ayant pas conclu un PACS, en fonction de la durée effective de leur union avec l’ancien membre des formations supplétives décédé.

Cette nouvelle allocation viagère devrait être exonérée d’impôt sur le revenu.

B Amélioration de la retraite des anciens combattants d’Afrique du Nord

Le texte gouvernemental propose d’étendre le bénéfice de la campagne double aux civils et militaires ayant participé à des actions de feu et de combat en Afrique du Nord entre 1953 et 1962 et qui ont liquidé leur pension avant le 19 octobre 1999.

Pour mémoire, les bénéfices de campagne constituent une bonification d’ancienneté prévue par le code des pensions civiles et militaires de retraite et par certains régimes spéciaux de retraite. Ce sont des avantages particuliers accordés aux ressortissants de ce code et de ces régimes, c’est-à-dire aux militaires ainsi qu’aux fonctionnaires et assimilés. L’attribution de la campagne double signifie que chaque jour de service effectué est compté pour 3 jours dans le calcul de la pension de retraite. Ces bonifications s’ajoutent dans le décompte des trimestres aux périodes de services militaires ou assimilées au moment de la liquidation de la pension de retraite.

Actuellement, seuls ceux qui ont liquidé leur pension après le 19 octobre 1999 peuvent bénéficier de ce dispositif en vertu d’une loi du 18 octobre 1999. « Or, la grande majorité des appelés et la quasi-totalité des militaires ayant combattu en Afrique du Nord ont liquidé leur pension avant cette date, explique le gouvernement. Afin que la mesure puisse profiter à tous, il convient de ne pas restreindre le champ des bénéficiaires. Dès lors, le bénéfice de la mesure doit être ouvert aux civils et militaires ayant liquidé leur pension avant le 19 octobre 1999. »

H. Les mesures en faveur des agents publics victimes de l’amiante

Actuellement, les fonctionnaires et les agents contractuels des ministères chargés de la mer et de la défense atteints de certaines maladies professionnelles provoquées par l’amiante peuvent demander à bénéficier d’une cessation anticipée d’activité et percevoir, à ce titre, l’allocation de cessation anticipée d’activité qui peut se cumuler avec une pension militaire de retraite et une allocation temporaire d’invalidité.

Le projet de loi propose d’étendre le bénéfice de cette cessation anticipée d’activité et de l’allocation afférente à l’ensemble des fonctionnaires et agents contractuels de droit public des trois versants de la fonction publique, dès lors qu’ils sont reconnus atteints d’une maladie professionnelle liée à l’amiante.

« Cette mesure permettra de traiter à égalité les salariés des secteurs publics et privés, les salariés du secteur privé bénéficiant d’ores et déjà du dispositif en question. Elle fait partie des mesures décidées par le gouvernement et annoncées par la ministre en charge de la fonction publique le 26 novembre 2014 » (11), explique l’exposé des motifs.

Cette allocation devrait être cumulable avec une pension militaire de retraite, une allocation temporaire d’invalidité et une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

Parallèlement, les dispositions spécifiques concernant les ministères de la mer et de la défense devraient être supprimées.

I. Des assouplissements pour les PME et TPE

Pour répondre aux « besoins concrets » des petites et moyennes entreprises, le texte gouvernemental entend encourager l’embauche de salariés supplémentaires en limitant les effets du franchissement de seuils d’effectifs applicables à certains prélèvements fiscaux et sociaux et de favoriser le dispositif des groupements d’employeurs.

1. Le relèvement de certains seuils d’assujettissement

« Conformément aux engagements pris par le gouvernement en faveur de l’emploi dans les très petites entreprises (TPE) et dans les petites et moyennes entreprises (PME) le 9 juin 2015 » (12), le projet de loi de finance pour 2016 cherche à limiter les effets des passages de seuils d’effectifs qui déclenchent des charges sociales et/ou fiscales supplémentaires. Il est ainsi notamment proposé de relever les seuils « 10 salariés » ou « plus de 9 salariés » à 11 pour, notamment :

→ l’application du taux réduit (0,55 % au lieu de 1 %) de la contribution unique pour la formation professionnelle (contribution due au titre de 2016) ;

→ l’exonération de forfait social sur les cotisations patronales de prévoyance ;

→ le paiement du versement transport.

Par ailleurs, un gel des prélèvements supplémentaires en cas de passage d’un seuil est prévu pour les recrutements effectués entre 2016 et 2018 par les entreprises de moins de 50 salariés. Sont notamment concernés :

→ le forfait social sur la prévoyance ;

→ la participation au Fonds national d’aide au logement ;

→ la déduction forfaitaire sur les heures supplémentaires ;

→ la contribution unique pour la formation professionnelle.

2. Les mesures en faveur des groupements d’employeurs

Le projet de budget 2016 vise également à modifier la règle de déduction des bénéfices imposables que peuvent appliquer les groupements d’employeurs. Rappelons qu’il s’agit de structures à forme associative ou coopérative, créées à l’initiative d’entreprises ou d’associations pour mettre à la disposition de celles-ci du personnel et leur apporter des conseils en matière de gestion des ressources humaines et de formation professionnelle. « Ils constituent un outil au service de l’emploi et de la qualité de gestion des ressources humaines des TPE et des PME car ils permettent à ces entreprises de recourir à des salariés en contrat à durée indéterminée que les membres du groupement, pris séparément, ne pourraient pas embaucher », estime le gouvernement dans l’exposé des motifs.

Solidairement responsables des dettes à l’égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires, ces groupements d’employeurs sont autorisés à constituer une provision déductible de leur résultat imposable à hauteur de 10 000 € au titre d’un exercice, afin de couvrir une partie au moins de cette responsabilité solidaire pour le paiement des dettes salariales face aux éventuelles défaillances de leurs membres.

Le texte propose une alternative à cette limite de 10 000 € – qui est maintenue – en permettant aux groupements de provisionner une somme supérieure à 10 000 € dans la limite toutefois de 2 % du montant des rémunérations versées à leurs salariés. En effet, le plafond de 10 000 € « peut s’avérer trop faible dans le cas de groupements d’employeurs employant plus d’une vingtaine de salariés et qui sont confrontés à des défaillances de paiement de plusieurs de leurs membres sur plusieurs mois », justifie l’exposé des motifs.

II. Les dépenses de politiques publiques

Le budget de l’Etat est, pour mémoire, présenté principalement sous forme de missions, qui sont gérées par un ou plusieurs ministères et qui regroupent des programmes, eux-mêmes divisés en actions.

A. La mission « travail et emploi »

La mission « travail et emploi » regroupe l’ensemble des crédits consacrés aux actions en faveur de l’emploi et de la lutte contre le chômage. Outre des dispositifs de soutien direct à l’emploi, elle finance ainsi l’allocation de solidarité spécifique ainsi que les moyens de fonctionnement des différents acteurs du service public de l’emploi (Pôle emploi en particulier). Elle se décline en quatre programmes budgétaires, dont deux seulement donneront lieu à traitement dans ce dossier : « accès et retour à l’emploi » et « accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi »(13).

Les crédits de paiement alloués à la mission en 2016 sont en légère hausse : 11,44 milliards d’euros sont ainsi prévus, contre un peu moins de 11,37 milliards d’euros inscrits en loi de finances pour 2015. En revanche, les autorisations d’engagement diminuent un peu : 11,28 milliards d’euros, contre 11,95 milliards. Bercy entend consolider les outils de la politique de l’emploi mis en place depuis 2012 (emploi d’avenir, contrat de génération…) et poursuivre le déploiement de la « garantie jeunes » et le ciblage renforcé des contrats aidés vers les personnes les plus éloignées de l’emploi. De plus, les moyens du service de l’emploi, en particulier de Pôle emploi, devraient être stabilisés.

1. L’accès et le retour à l’emploi (programme 102)

Le programme « accès et retour à l’emploi » regroupe l’ensemble des politiques publiques visant à favoriser l’insertion professionnelle des personnes rencontrant des difficultés pour se maintenir ou accéder au marché du travail. Doté en 2016 d’un peu plus de 7,25 milliards d’euros en autorisations d’engagement et d’un peu plus de 7,51 milliards d’euros en crédits de paiement, il finance deux actions : l’amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi et l’amélioration des dispositifs en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail.

A Amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi

1) Pôle emploi et les maisons de l’emploi

En 2016, l’Etat devrait allouer près de 1,51 milliard d’euros au titre des dépenses de fonctionnement de Pôle emploi, soit un peu moins que le montant accordé en 2015 (1,52 milliard d’euros). Il reconduirait ainsi les crédits accordés en 2015 au titre de la subvention pour charges de service public, destinée à financer les 2 000 emplois supplémentaires pour Pôle emploi en place depuis septembre 2013.

En revanche, les crédits accordés au financement des maisons de l’emploi (MDE) devraient être en forte baisse l’an prochain : 13 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (contre 26 millions en 2015). Par ailleurs, depuis 2015, les MDE ne bénéficient plus d’actions contractualisées dans le cadre de la nouvelle génération de contrats de plan Etat-région (2015-2020), ni dans le cadre d’appels à projets dédiés aux MDE sur les actions d’anticipation des mutations économiques.

2) Les allocations de solidarité

L’Etat devrait attribuer en 2016 un peu plus de 1,6 milliard d’euros (contre près de 1,7 milliard en 2015) de subvention au Fonds de solidarité qui, pour mémoire, rassemble les moyens de financement des allocations de solidarité versées par Pôle emploi aux demandeurs d’emploi qui ne peuvent bénéficier du régime d’assurance chômage. Au-delà de cette dotation de l’Etat, le fonds perçoit aussi des ressources propres.

Dans ce cadre, 2,64 milliards d’euros devraient être alloués au financement de l’allocation de solidarité spécifique (ASS), contre 2,62 milliards en 2015. L’ASS est versée, sous conditions, aux bénéficiaires de l’allocation d’aide au retour à l’emploi arrivés en fin de droits à l’assurance chômage. Le gouvernement table, pour établir ce budget, sur un effectif prévisionnel de l’ordre de 464 020 bénéficiaires l’an prochain.

Environ 22 millions d’euros devraient également servir au Fonds de solidarité pour financer la prime forfaitaire mensuelle d’intéressement à la reprise d’activité de 150 € par mois versée aux bénéficiaires de l’ASS reprenant sous conditions une activité professionnelle d’une durée d’au moins 78 heures par mois, après une période de 3 mois de cumul complet entre ASS et revenus d’activité. Ses conditions de versement seront révisées pour 2016 afin de prendre en compte l’impact de la création de la prime d’activité au 1er janvier prochain(14), indique le ministère des Finances. Près de 12 228 personnes pourront en bénéficier l’an prochain. En outre, 46,8 millions d’euros devraient être consacrés à l’ACCRE-ASS qui permet le versement pendant 1 an de l’ASS à taux plein à ceux de ses allocataires qui bénéficient du dispositif d’aide à la création ou à la reprise d’entreprise (ACCRE).

Le Fonds de solidarité devrait aussi réaliser une dépense de 17 millions d’euros au titre de l’allocation équivalent retraite (AER) qu’il continue de financer pour les cohortes antérieures au 31 décembre 2008. L’Etat, lui, devrait consacrer 30,7 millions d’euros au titre des cohortes de l’AER 2009 et 2010.

Le budget de la mission « travail et emploi » réserve aussi 73,5 millions d’euros pour la prime transitoire de solidarité – prime d’un montant de 300 € par mois versée depuis le 1er juin 2015, sous certaines conditions, aux demandeurs d’emploi bénéficiaires de l’ASS ou du RSA(15) – et 40,1 millions d’euros au financement de l’allocation temporaire d’attente.

B Accompagnement des publics en difficulté

1) Les emplois aidés

En 2016, les objectifs de prescription des contrats aidés du secteur non marchand (CUI-CAE) devraient être de 200 000 contrats, dont près de 20 % cofinancés par les conseils départementaux car conclus avec des bénéficiaires du RSA. Les contrats aidés du secteur marchand (CUI-CIE) devraient être au nombre de 60 000 et seront ciblés en priorité sur les demandeurs d’emploi de longue et très longue durée, les allocataires de minima sociaux, les travailleurs handicapés et les seniors. En outre, afin d’améliorer l’insertion professionnelle des bénéficiaires, plusieurs actions « qualitatives » seront maintenues et mises en œuvre, telles que le maintien de contrats de longue durée dans le secteur non marchand, indiquent les documents budgétaires.

Parallèlement à ces contrats, 35 000 nouveaux emplois d’avenir devraient être mis en œuvre en 2016.

Au total, l’an prochain, 2,43 milliards d’euros en crédits de paiement seront, selon Bercy, consacrés à l’insertion dans l’emploi au moyen des contrats aidés :

→ un peu plus de 1,27 milliard d’euros ira aux contrats uniques d’insertion (CUI) : plus de 1,08 milliard aux contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) du secteur non marchand et 196,50 millions aux contrats initiative-emploi (CIE) du secteur marchand ;

→ plus de 1,18 milliard d’euros seront dédiés aux emplois d’avenir ;

→ 6,36 millions d’euros financeront les contrats aidés dans les départements d’outre-mer (DOM) tels que les contrats d’accès à l’emploi (CAE-DOM), et les contrats d’insertion par l’activité. La loi « Macron » du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques prévoit la suppression par ordonnance, d’ici au 6 août 2016, du CAE-DOM qui sera remplacé par le contrat initiative-emploi(16). L’ordonnance est en cours de validation et devrait être publiée avant le 31 décembre 2015 pour une application à compter du 1er janvier 2016, précise Bercy.

(A noter) L’Agefiph participera au financement des emplois aidés à hauteur de 29 millions d’euros.

2) L’accompagnement renforcé des jeunes vers l’emploi

L’année prochaine, le gouvernement entend poursuivre ses efforts en faveur de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes les plus en difficulté. Le projet de budget pour 2016 prévoit donc que 493,79 millions d’euros en crédits de paiement (contre 406,95 millions d’euros cette année) et 520,39 millions d’euros en autorisations d’engagement (contre 422,01 millions d’euros) seront consacrés à l’accompagnement renforcé des jeunes vers l’emploi.

Dans ce cadre, la contribution de l’Etat au financement des missions locales et des permanences d’accueil, d’information et d’orientation devrait s’élever à 188,80 millions d’euros (contre 180,80 millions d’euros cette année).

Le total des crédits attribués en 2016 au titre de l’allocation versée dans le cadre du contrat d’insertion dans la vie sociale devrait s’élever à 10 millions d’euros, soit une diminution de 30 millions d’euros par rapport à 2015. Cette baisse est due à la montée en charge de la « garantie jeunes », explique le ministère des Finances.

Le Fonds pour l’insertion professionnelle des jeunes sera, quant à lui, abondé par l’Etat de 8,10 millions d’euros, assurent les documents budgétaires de Bercy. Sur ce montant, 6,98 millions seront consacrés aux aides indirectes permettant le financement d’actions de prise en charge des jeunes (forums emploi, prospection d’entreprises, préparation aux concours…) ainsi que le soutien à l’innovation, à l’expérimentation et à l’évaluation des bonnes pratiques. Et 1,12 million aux aides directes (logement, transports, achat de vêtements de travail, alimentation, garde d’enfants…). Ce fonds est couplé à d’autres leviers d’accompagnement, auxquels est allouée une enveloppe de 7,5 millions d’euros, comme les actions de parrainage qui visent à faciliter l’accès ou le maintien dans l’emploi de personnes rencontrant des difficultés d’insertion professionnelle, en particulier les jeunes, en les faisant accompagner par des personnes bénévoles disposant d’un réseau professionnel actif. Cette mesure a été renforcée lors du comité interministériel égalité et citoyenneté du 6 mars 2015, l’objectif étant de passer de 30 000 actions de parrainage en 2014 à 60 000 d’ici à 2017, indiquent les documents budgétaires. Pour 2016, cet objectif est fixé à 50 000.

Par ailleurs, comme en 2015, 24 millions d’euros devraient être alloués par la mission « travail et emploi » au titre du financement des écoles de la deuxième chance, ce qui correspond à un tiers de leur coût de fonctionnement (hors rémunération des stagiaires de la formation professionnelle). Ainsi, 12 000 places seront financées pour un coût moyen de 6 000 € par place et par an, indique Bercy.

Enfin, 272,83 millions d’euros en crédits de paiement et 299,43 millions d’euros en autorisations d’engagement devraient être consacrés l’an prochain à la « garantie jeunes ». Lancé à titre expérimental en octobre 2013 dans 10 territoires, le dispositif, qui couple à la fois un accompagnement social et professionnel renforcé et une garantie financière, s’adresse en priorité aux jeunes âgés de 18 à 25 ans en situation de grande précarité qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni étudiants(17). Bercy prévoit de développer ce dispositif auprès de 60 000 jeunes d’ici à la fin 2016.

3) L’insertion professionnelle des personnes handicapées

Le financement de l’Etat en faveur de l’emploi des personnes handicapées devrait augmenter pour s’établir à 364,30 millions d’euros.

Sur ce budget, les entreprises adaptées seront, selon le projet de loi, financées à hauteur de 317,30 millions d’euros pour l’aide au poste et de 40 millions d’euros pour la subvention spécifique d’accompagnement et de développement. Les mesures en faveur de l’emploi des personnes handicapées – programmes régionaux pour l’insertion des travailleurs handicapés et aides individuelles – bénéficieront, elles, de 7 millions d’euros.

4) Le soutien de l’Etat au secteur de l’IAE

A la suite de la récente réforme du financement du secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE), le soutien financier de l’Etat à ce secteur devrait fortement augmenter en 2016 et s’élever à 802,99 millions d’euros (contre 252,53 millions d’euros cette année), répartis entre les différentes structures de l’IAE :

→ 133,01 millions d’euros pour les entreprises d’insertion ;

→ 36,78 millions d’euros pour les entreprises de travail temporaire d’insertion ;

→ 22,90 millions d’euros pour les associations intermédiaires ;

→ 589,50 millions d’euros pour les ateliers et chantiers d’insertion ;

→ 20,80 millions d’euros pour le fonds départemental d’insertion, qui peut être mobilisé pour différents types d’actions (aide au démarrage d’une nouvelle structure, aide au développement, aide à la professionnalisation…).

5) Le soutien de l’Etat au secteur de l’aide sociale

Les structures d’insertion agréées au titre de l’aide sociale bénéficient d’une exonération de la totalité des cotisations patronales de sécurité sociale soit sur une base forfaitaire de 40 % du SMIC, soit sur la rémunération réelle inférieure au SMIC. En 2016, l’Etat compensera à la sécurité sociale ces exonérations de cotisations sociales à hauteur de 12,58 millions d’euros (contre 12,07 millions d’euros en 2015).

2. L’Accompagnement des mutations économiques et le développement de l’emploi (programme 103)

A Anticipation et accompagnement des mutations

Dispositif donnant-donnant, le contrat de génération vise, dans son principe, à augmenter le taux d’emploi des jeunes et des seniors et à agir sur la qualité de l’emploi en privilégiant les recrutements en contrats à durée indéterminée pour les jeunes et en facilitant le maintien en emploi des salariés seniors jusqu’à leur départ en retraite en aménageant leurs conditions de travail. En 2016, l’Etat y consacrera 164,34 millions d’euros en crédits de paiement et 240 millions d’euros en autorisations d’engagement, ce qui doit permettre de financer 20 000 nouveaux contrats de génération en 2016.

Par ailleurs, 1 million d’euros, comme en 2015, devraient financer l’aide de 2 000 € accordée aux employeurs qui recrutent des chômeurs de longue durée âgés de plus de 45 ans en contrat de professionnalisation.

Enfin, 88,8 millions d’euros devraient être alloués en 2016 par l’Etat pour financer le contrat de sécurisation professionnelle, ce qui doit permettre l’accompagnement de 100 000 nouveaux salariés. Pour mémoire, depuis le 1er septembre 2011, le dispositif favorise le reclassement professionnel des salariés des entreprises de moins de 1 000 salariés licenciés pour motif économique.

B Amélioration de l’insertion par les qualifications et les compétences

Pour l’an prochain, l’Etat devrait financer 404 931 contrats d’apprentissage et 180 052 nouvelles entrées en contrats de professionnalisation. Il devrait ainsi y consacrer respectivement 1,248 milliard et 16,32 millions d’euros (contre 1,275 milliard et 17,79 millions en 2015). Ce financement correspond à la compensation des exonérations de charges sociales dont bénéficient ces contrats.

De plus, afin de soutenir les entrées en apprentissage dans les très petites entreprises (TPE), et dans le cadre du plan de mobilisation pour l’apprentissage(18), Bercy prévoit de consacrer 221,84 millions d’euros en crédits de paiement et 308 millions d’euros en autorisations d’engagement pour financer l’aide « TPE – jeunes apprentis » en 2016. Cette mesure, en vigueur depuis le 1er juin 2015, consiste en une aide forfaitaire de l’Etat d’un montant de 4 400 € pour la première année du contrat d’apprentissage signé par un mineur employé dans une entreprise de moins de 11 salariés(19).

Par ailleurs, une enveloppe de 23,63 millions d’euros devrait être consacrée l’an prochain au financement par l’Etat de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle (certains demandeurs d’emploi en formation non indemnisés par le régime d’assurance chômage, publics spécifiques). Un

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