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France Stratégie définit les contours du compte personnel d’activité

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Jean Pisani-Ferry et Selma Mehfouz, respectivement commissaire général et commissaire adjointe de France Stratégie, ont, le 9 octobre, remis au Premier ministre et à la ministre du Travail et de l’Emploi leur rapport sur la mise en œuvre du compte personnel d’activité (CPA)(1). Annoncé en avril dernier par le gouvernement(2) et inscrit dans la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi(3), le CPA doit permettre à chaque personne de rassembler, à partir du 1er janvier 2017, dès son entrée sur le marché du travail et tout au long de sa vie professionnelle, les droits sociaux personnels utiles pour sécuriser son parcours professionnel. Afin de mieux appréhender ce dispositif, la commission de réflexion de France Stratégie propose trois scénarios possibles en termes de périmètre et de fonctionnement de ce compte.

Manuel Valls, qui ne privilégie pour l’heure aucun scénario, a indiqué, dans un communiqué du même jour, que le rapport servira à alimenter les débats de la conférence sociale du 19 octobre prochain ainsi que les travaux de concertation menés avec les partenaires sociaux sur le contenu et le calendrier de mise en place du compte personnel d’activité. Ce dernier sera inscrit dans un projet de loi que Myriam El Khomri présentera au début 2016.

Objectifs

Depuis la fin des Trente Glorieuses, le marché du travail a profondément changé. « En près de 40 ans, de 1975 à 2009, la part des actifs qui connaissent une année donnée un changement d’emploi, un passage de l’emploi au chômage ou l’inverse est ainsi passée de 12 % à près de 20 % », constate la commission. Les plus touchés par l’instabilité du marché du travail sont les jeunes, les moins qualifiés, les seniors et les femmes affectées par les situations de temps partiel subi. Dans le même temps, de nouvelles formes d’emploi émergent, « à la frontière du salariat et du travail indépendant » (auto-entrepreneurs, portage salarial…). Or notre modèle social « n’a pas été pensé initialement pour ceux qui alternent les contrats très courts, cumulent deux emplois ou changent de statut, de salarié à indépendant par exemple », relève le rapport. Le compte personnel d’activité vise à mieux protéger ceux qui se trouvent dans ces situations et à leur éviter de perdre des droits.

A moyen terme, le CPA peut aussi être « un facteur de modernisation de notre système de protection sociale et de droits professionnels. En permettant aux actifs d’avoir accès simplement à leurs droits, il peut contribuer à la résorption des lacunes dans les droits actuels et être porteur d’une adaptation globale du système de protection sociale aux mutations du travail et de la société, ainsi qu’aux aspirations nouvelles des personnes », estime France Stratégie.

Publics visés

Selon la commission, « l’ambition universelle du CPA est évidente ». La loi vise « clairement » à couvrir l’ensemble des actifs (salariés, demandeurs d’emploi, indépendants…) résidant en France. S’agissant des conditions d’ouverture et de fermeture du compte, le rapport propose qu’il soit ouvert automatiquement dès l’âge de 16 ans et clos au moment du décès. Les droits acquis seraient donc transportables d’une entreprise à l’autre. France Stratégie envisage, au moment du départ à la retraite, de clore certains droits devenus inutiles (comme les congés), mais d’en maintenir d’autres ou de favoriser leur conversion.

Trois scénarios

Pour donner une idée concrète de la forme que pourrait prendre le compte personnel d’activité, le rapport présente trois scénarios qui peuvent être combinés entre eux. Dans tous, le CPA est universel, ouvert à toute personne résidant en France, et permet des abondements en points corrigeant les « risques d’inégalités de chances ou de circonstances » (jeunes non qualifiés, chômeurs de longue durée, longue maladie…). Ces scénarios répondent à trois logiques principales :

→ le CPA orienté vers « la capacité d’évolution professionnelle ». Le fil conducteur est ici un accès renforcé à la formation et donc une mobilisation des droits en ce sens, et plus généralement un accompagnement dans la levée des obstacles à l’emploi (aides à la création d’entreprise, à la garde d’enfants, à la mobilité…). En ce sens, les droits à la formation sont au cœur du dispositif. Ils peuvent être complétés par d’autres droits acquis par l’individu dans son travail (compte personnel de prévention de la pénibilité, compte épargne-temps, épargne salariale), et qui peuvent être mobilisés pour développer cette « capacité professionnelle ». Ce scénario permet également de prévoir des « dotations individuelles compensatrices pour les personnes considérées comme les plus fragiles » (par exemple les jeunes sortant sans qualification du système de formation initiale ou les chômeurs de longue durée). « Ces dotations donneraient ainsi un contenu au droit à la formation différée […] ou à un droit ciblé à l’accompagnement » ;

→ le CPA orienté vers « la liberté de l’usage des temps au long de la vie ». L’objectif principal de ce scénario est la liberté des individus dans et par le travail grâce à une meilleure articulation de leurs différents temps de vie et une reconnaissance de leurs activités, y compris non marchandes (soins aux proches, engagement syndical et associatif, service civique). Le compte personnel d’activité pourrait alors être un « moyen d’alléger certaines tensions et souffrances associées au travail (pénibilité, risques psychosociaux, burnout) en répartissant mieux les périodes d’emploi tout au long du parcours de vie », précise le rapport. Les droits venant alimenter le CPA seraient ainsi le compte personnel de formation, le compte personnel de prévention de la pénibilité, le congé individuel de formation, le compte épargne-temps, l’épargne salariale, les allocations de chômage (comme dans le premier scénario) et les droits à congés (congés annuels et jours de réduction de temps de travail, dans la limite des obligations internationales) ;

→ le CPA orienté vers « l’accès aux droits et la sécurité des transitions ». Ce scénario constitue une extension du premier, centré sur la formation et le développement de la capacité professionnelle. Il inscrit le compte personnel d’activité dans une vision plus large visant à donner à chacun une meilleure connaissance et un accès plus simple à l’ensemble de ses droits sociaux (y compris ses droits d’assurance maladie, chômage et vieillesse), afin de lui permettre d’être davantage acteur de son parcours.

Notes

(1) Le compte personnel d’activité, de l’utopie au concret – Rapport disponible sur www.strategie.gouv.fr.

(2) Voir ASH n° 2905 du 10-04-15, p. 5.

(3) Voir ASH n° 2923 du 4-09-15, p. 44.

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