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La CEDH valide le refus des prestations familiales pour des enfants entrés hors regroupement familial

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La décision, qui était très attendue, a douché les espoirs des milliers de familles concernées : la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a, dans un arrêt du 1er octobre, jugé non discriminatoire le refus de verser à des parents étrangers des allocations familiales pour leurs enfants venus en France en dehors de la procédure de regroupement familial.

Au cœur du litige : l’article L. 512-2 du code de la sécurité sociale aux termes duquel un enfant étranger doit, pour ouvrir droit aux prestations familiales, produire un document permettant de démontrer la régularité de son séjour en France. L’article D. 512-2 du même code en dresse une liste limitative où figure le certificat de contrôle médical délivré par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) à l’issue de la procédure de regroupement familial.

Dans cette affaire, les requérants – des familles congolaises qui avaient chacune des enfants les ayant rejointes postérieurement dans l’Hexagone sans respecter la procédure de regroupement familial – se battaient depuis des années avec la justice française pour bénéficier des prestations familiales pour ces enfants. Chose qui leur était refusée compte tenu de l’impossibilité pour elles de produire le certificat de contrôle médical de l’OFII. Déboutées de leurs contestations à différents stades de la procédure par les juridictions nationales(1), elles avaient fini par se tourner vers les juges européens en faisant valoir une discrimination et une atteinte à la vie familiale.

Dans sa décision, la Cour européenne des droits de l’Homme reconnaît, en premier lieu, qu’il y a bien une différence de traitement entre les requérants et les autres parents recevant des prestations familiales, fondée sur un critère lié à la nationalité et au respect des dispositions légales applicables au regroupement familial. Mais, ajoute-t-elle, cette différence n’est pas exclusivement fondée sur la nationalité, les requérants s’étant vu refuser les prestations familiales en raison du « caractère irrégulier de l’entrée en France de leurs enfants, conséquence d’un comportement volontaire contraire à la loi ».

Aux yeux des juges européens, le fait de réserver des prestations familiales aux enfants nés en France ou venus sur le territoire par le biais du regroupement familial constitue « une différence de traitement reposant sur une justification objective et raisonnable ».

Enfin, la Cour souligne l’existence en France d’une faculté de régularisation effective permettant aux personnes s’étant vu refuser des prestations de les obtenir finalement par la procédure de regroupement familial pour un enfant se trouvant déjà sur le territoire français… mais, note-t-elle, en l’espèce, aucun des requérants n’avait justifié avoir entrepris des démarches sérieuses pour bénéficier de ce « regroupement familial sur place ».

A noter : les ressortissants de pays liés à l’Union européenne par un accord d’association (comme l’Algérie, le Maroc, la Turquie ou la Tunisie) ne sont pas concernés par ces restrictions, la Cour de cassation ayant jugé en 2013 que, en vertu de ces accords, ils doivent bénéficier des mêmes prestations familiales que les Français(2).

Dans un communiqué diffusé le jour même, le défenseur des droits a pris acte de cette décision, en relevant toutefois que la CEDH n’a pas précisé les conditions dans lesquelles ont lieu les regroupements familiaux, «  soumis à des procédures très longues  ». A cet égard, rappelle-t-il, ce sont les jugent européens eux-mêmes qui ont condamné la France en 2014 pour les délais excessivement longs de délivrance de visas dans le cadre du regroupement familial(3). «  Ces délais ont, de fait, une incidence sur le droit des enfants à vivre en France auprès de leurs parents.  » Jacques Toubon réitère par ailleurs ses recommandations tendant à ce que le gouvernement engage une réforme législative mettant un terme définitif aux différences de traitement entre enfants étrangers selon leur nationalité, différences confortées de fait par la décision de la CEDH.

Notes

(1) Saisie de cas similaires, la Cour de cassation avait donné raison en 2004 à des familles étrangères, avant d’opérer un changement de jurisprudence en 2011. C’est ce revirement que les familles contestaient en l’espèce – Voir ASH n° 2715 du 24-06-11, p. 19.

(2) Voir ASH n° 2806 du 19-04-13, p. 36.

(3) Voir ASH n° 2869-2870 du 18-07-14, p. 42.

[CEDH, Okitaloshima Okonda Osungu c. France et Selpa Lokongo c/France, 1er octobre 2015, requêtes n° 76860/11 et 51354/13, disp. sur http://hudoc.echr.coe.int]

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