Recevoir la newsletter

Application de l’accord sur les carrières et les rémunérations : embarras chez les signataires

Article réservé aux abonnés

Les modalités de mise en œuvre du texte, qui prévoit la revalorisation du statut des travailleurs sociaux, restent à définir, sur fond de malaise des partenaires sociaux.

Lors de son discours sur les « états généraux du travail social », à l’occasion de la remise du rapport de Brigitte Bourguignon, le 2 septembre(1), le Premier ministre avait voulu mettre la balle dans le camp des syndicats : l’accord sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations dans la fonction publique ouvrait « la perspective d’un accès des travailleurs sociaux à la catégorie A », à condition qu’il soit majoritaire. Il rappelait ainsi les critères de validité issus des accords de Bercy signés en 2008 sur le dialogue social.

Scores serrés

Bien que les six organisations syndicales représentatives signataires totalisent seulement 46,70 % des voix, l’accord visant notamment la revalorisation salariale des fonctionnaires entre 2016 et 2020 s’appliquera, a fini par annoncer Manuel Valls au terme du délai de signature, le 30 septembre, arguant de scores serrés et d’une réforme « nécessaire et indispensable »(2). La méthode, qui a ulcéré les trois organisations qui ont rejeté l’accord – la CGT, FO et Solidaires –, provoque le trouble dans le rang des signataires. Et les organisations syndicales représentant les professionnels du travail social, qui attendent pourtant depuis des années la revalorisation de leur statut, ne crient pas victoire. Cette décision « déresponsabilise les partenaires sociaux non signataires et porte un coup au dialogue social dans la fonction publique », réagit ainsi la CFDT Santé-sociaux dans un communiqué, se félicitant néanmoins qu’elle permette aux agents de bénéficier des mesures « négociées pendant des mois », dont « l’amélioration des déroulements de carrière et des rémunérations » et le reclassement en catégorie A des travailleurs sociaux. Selon l’accord en effet, « les fonctionnaires relevant de la filière sociale, dans les trois versants de la fonction publique, bénéficieront d’une revalorisation, à compter de 2018, en reconnaissance de leur diplôme au niveau licence et du niveau des missions exercées ». Il précise qu’« à compter de cette date, leur grille sera revalorisée en cohérence avec celles de la filière paramédicale ». Mais les modalités de ce changement statutaire restent à définir.

« C’est maintenant que tout commence », estime la CFDT Santé-sociaux, soulignant que « dans chaque versant de la fonction publique, les négociations doivent s’ouvrir pour construire ce que le texte prévoit ». D’après les termes de l’accord, un comité de suivi réunissant les signataires devrait être installé, chargé de travailler sur la mise en œuvre de certains points. Mais pour l’heure, souligne Nathalie Canieux, secrétaire générale de la CFDT Santé-sociaux, les organisations syndicales sont dans le flou : « Nous n’avons encore aucune information sur comment le ministère compte s’y prendre et quand. Est-ce que c’est ce qui est exactement prévu dans l’accord qui s’appliquera ? A partir du moment où il s’agit d’un texte unilatéral, tout est possible… »

2018, un horizon trop lointain

Du côté du Snuclias (Union nationale des syndicats unitaires des agents des collectivités locales, du ministère de l’Intérieur et du ministère des Affaires sociales)-FSU, la pilule est très dure à avaler. « C’est un marché de dupes, un contournement du dialogue social. Le gouvernement doit prendre acte que l’accord n’est pas majoritaire », commente Hervé Heurtebize, secrétaire national, précisant que la fédération a émis un « avis favorable à l’accord, mais offensif », dans l’objectif « de trouver un point d’appui » pour les carrières et les salaires des agents. « Pas question d’accepter des manœuvres visant à monter les organisations syndicales les unes contre les autres », poursuit-il, rappelant l’appel commun de la CGT, de la FSU, de Solidaires et de la FAFP (Fédération autonome de la fonction publique) à l’occasion de la mobilisation interprofessionnelle du 8 octobre. Au-delà, fait-il valoir, la revalorisation du statut des travailleurs sociaux devrait être une question distincte de l’accord sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations : « C’est une revendication portée depuis 1991, devenue une obligation depuis 1998 », début du processus de rapprochement des systèmes d’enseignement supérieur européens. Lors d’un récent entretien avec le cabinet de la secrétaire d’Etat chargée de la lutte contre l’exclusion, Ségolène Neuville, « nous avons rappelé que 2018 est un horizon trop lointain, qui laisse la possibilité à un autre gouvernement de tout remettre en question, souligne-t-il. Puisqu’il nous a été dit que le processus de réforme des diplômes pourrait durer un an, la reconnaissance au niveau licence doit pouvoir aboutir à la fin 2016 ! »

La revendication non satisfaite du dégel immédiat de la valeur du point, le calendrier des mesures, qu’ils jugent par ailleurs insuffisantes, et certains désaccords ont motivé le refus des non-signataires.Parmi eux, la CGT a particulièrement dénoncé « le chantage du gouvernement » ayant consisté, « faute d’accord, à renoncer à toute mesure de revalorisation du point d’indice et des carrières », l’accord prévoyant une négociation salariale en février 2016. Le texte « concerne l’ensemble des fonctionnaires, et pas seulement les travailleurs sociaux », souligne Corinne Normand, secrétaire nationale de l’UFICT CGT des services publics, rappelant que l’organisation syndicale s’est fortement mobilisée pour la reconnaissance des professionnels du travail social et de leur niveau de diplôme, notamment dans le cadre du système européen LMD. « Nous souhaitons la reconnaissance des qualifications pour tous les professionnels, dans le secteur public comme dans le secteur privé », insiste-t-elle. De plus, quelle serait la valeur d’un texte unilatéral imposé par l’Etat ? « Il n’y a jamais de politique contraignante pour les collectivités locales », note Corinne Normand. Une chose est sûre, la reconnaissance des métiers restera une revendication jusqu’à l’annonce du plan d’action pour le travail social, prévue pour la fin octobre, et sera à l’ordre du jour des « états généraux alternatifs » organisés le 16 octobre par la CGT, la FSU, Solidaires, la FAFP, le collectif « Avenir éducs » et l’UNEF.

Notes

(1) Voir ASH n° 2924 du 11-09-15, p. 22.

(2) Voir ASH n° 2927 du 2-10-15, p. 9.

Côté terrain

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur