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La Cour des comptes préconise de fusionner les aides au logement avec certains minima sociaux

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Dans un rapport sur les aides personnelles au logement remis le 16 septembre à la commission des finances du Sénat(1), la Cour des comptes formule plusieurs recommandations visant à améliorer l’efficacité de ce dispositif, qui constitue « une composante essentielle de la politique française du logement », mais qui pèse lourd dans les finances publiques sans toujours atteindre ses objectifs.

Ce rapport était d’autant plus attendu que le gouvernement a annoncé, au printemps dernier, son intention de faire des économies sur la politique du logement, éventuellement en rabotant ici et là les aides personnelles au logement que sont l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation de logement sociale (ALS) et l’allocation de logement familiale (ALF). « De nombreuses pistes de réforme ont été avancées ces dernières années », rappellent d’ailleurs les magistrats financiers, mais ils en qualifient la plupart de « guère pertinentes, qu’il s’agisse du pilotage des aides par le taux d’effort, de la fusion des aides ou de l’accélération de la prise en compte des ressources des bénéficiaires ». Pour la Cour des comptes, « c’est dans le rapprochement des aides personnelles [au logement] et des minima sociaux, souvent déjà perçus par les bénéficiaires des aides, que paraît résider la solution permettant d’optimiser la prise en compte des besoins en logement des plus modestes, la limitation des inégalités constatées et la maîtrise des finances publiques ».

Des inégalités persistantes

Les aides au logement représentent en effet plus de 40 % des dépenses publiques consacrées à ce secteur, à hauteur de 17,4 milliards d’euros en 2013(2), pour quelque 6,5 millions de ménages bénéficiaires, « locataires de leur logement pour leur presque totalité ». Ces dépenses, qui n’ont cessé de progresser ces dernières années, à un rythme plus élevé que l’inflation, posent cependant la question de la capacité de l’Etat à poursuivre leur financement. « Dans le contexte budgétaire actuel », souligne le rapport, « les limites de leur efficacité et de leur efficience deviennent moins acceptables ». En effet, « malgré leur caractère globalement redistributif, les aides personnelles au logement laissent subsister des inégalités entre les ménages au regard de leur situation de logement ». Les locataires du parc social, en particulier, peuvent cumuler cette aide avec un loyer plafonné, induisant « une différence marquée des taux d’effort des bénéficiaires » entre parc social et privé. En outre, les étudiants bénéficient des aides au logement sans condition de ressources, tout en restant éventuellement rattachés au foyer fiscal de leurs parents, avec la demi-part qui va de pair. D’où la recommandation de la Cour des comptes de « réformer le régime d’aide au logement des étudiants, en introduisant un droit d’option entre bénéfice de l’aide personnelle et rattachement de l’étudiant au foyer fiscal parental ». Une proposition également faite par un rapport d’inspection au début de l’année(3), mais écartée en mai dernier par le ministre des Finances(4).

Améliorer la connaissance du parc locatif

Selon les magistrats de la rue Cambon, les aides au logement se révèlent aussi coûteuses du point de vue de leur gestion, qui repose « sur un barème excessivement complexe », à l’origine de nombreux indus (à hauteur de 1,57 milliard d’euros en 2013). L’une des préconisations de la cour vise donc à « simplifier les modalités de prise en compte des changements de situation des bénéficiaires (dates d’accès aux droits, calcul des montants mensuels d’aide, impact des changements de situation professionnelle) afin d’améliorer la prévisibilité des aides ». Par ailleurs, le montant des fraudes est estimé autour de 280 millions d’euros. Cela est notamment imputable à « une connaissance très insuffisante des logements par l’ensemble des acteurs concernés », en partie due à l’absence d’échanges entre eux et à l’administration fiscale. Une carence également préjudiciable en matière de « contrôle de l’indécence et du surpeuplement des logements concernés », qui amène la cour à recommander de « renforcer le pilotage budgétaire des aides au logement » et de créer « une base de données sur les logements », pour améliorer la connaissance du parc locatif.

Les magistrats financiers reprennent aussi à leur compte le grief souvent adressé aux aides aux logements d’entretenir « un niveau élevé des loyers, notamment dans le secteur privé », sans toutefois « que l’ampleur et l’étendue de ce phénomène n’aient été jusqu’ici suffisamment démontrées », reconnaissent-ils, plaidant pour que soient analysées « la réalité et l’étendue de [cet] effet inflationniste ».

Une fusion s’inspirant du Royaume-Uni

Au final, selon la cour, « au regard de leur portée sociale », les aides personnelles au logement « produisent des effets économiques négatifs ou négligeables », tout en incitant « d’autant moins leurs bénéficiaires à reprendre une activité professionnelle qu’elles ne sont pas articulées avec les minima sociaux dont ils peuvent bénéficier parallèlement ». Evoquant une expérimentation se déroulant depuis 2012 au Royaume-Uni, les magistrats financiers préconisent donc de fusionner à moyen terme les aides personnelles au logement avec les minima sociaux versés aux personnes d’âge actif – revenu de solidarité active (RSA), allocation aux adultes handicapés et allocation de solidarité spécifique. Mais, pour des raisons d’ordre technique, la simulation réalisée par la Haute Juridiction financière s’est finalement concentrée sur la fusion des aides au logement avec le seul RSA, dans toutes ses composantes, et la prime pour l’emploi (PPE), étant rappelé que le RSA « activité » et la PPE vont être fusionnés en une « prime d’activité » au 1er janvier 2016(5).

La cour a échafaudé deux scénarios. Dans le premier, où l’objectif est de maintenir le revenu disponible des personnes sans ressources, « la nouvelle prestation se révélerait tout aussi redistributive qu’auparavant et permettrait de compenser l’absence actuelle de prise en charge des propriétaires occupants pauvres par les aides au logement », relève le rapport. « Les ménages du premier décile de revenus bénéficieraient d’une augmentation de 8 % de leur revenu disponible. Mais cela ne permettra pas de corriger le déficit d’incitation à la reprise d’activité, tel que constaté dans le système antérieur. » Dans le second scénario, l’objectif d’incitation à la reprise d’activité ne serait rempli qu’au prix d’une diminution de 16 % du montant du revenu de remplacement pour les ménages sans ressources. Dans les deux cas, plus des deux tiers des ménages ne seraient pas affectés par la réforme, note la cour. Toutefois, les locataires du premier décile de revenu, les propriétaires occupants et les jeunes actifs de moins de 25 ans en seraient des bénéficiaires nets. Et les locataires du parc social seraient, eux, plus affectés que ceux du parc privé, ce qui contribuerait à la réduction de l’« avantage HLM ».

Consciente des difficultés de mise en place de cette réforme – bénéficiaires et périodicité différents du RSA, de la PPE et des aides au logement, absence de données pour en évaluer l’impact budgétaire –, la Cour des comptes estime toutefois qu’il « convient de ne pas s’arrêter à ces complexités » car, « comme au Royaume-Uni, la perspective de l’intégration des aides au logement dans cette nouvelle prestation fusionnant certains minima sociaux devrait contribuer à une simplification accrue des dispositifs sociaux en faveur des bas revenus ». En outre, « cela rendrait une certaine liberté d’utilisation de la somme versée à l’allocataire tout en limitant la connaissance par le propriétaire bailleur de l’aide versée affectée à la dépense de logement, ce qui permettrait de lutter contre l’effet inflationniste ». Enfin, une fusion pourrait corriger les effets déstabilisateurs liés aux interactions entre des aides multiples et, vraisemblablement, les effets désincitatifs en termes de retour à l’emploi.

Notes

(1) Rapport disponible sur www.ccomptes.fr.

(2) Un montant qui devrait dépasser 18 milliards d’euros en 2015 et 19 milliards en 2017.

(3) Voir ASH n° 2896 du 6-02-15, p. 6.

(4) Voir ASH n° 2910 du 15-05-15, p. 9.

(5) Voir ASH n° 2921 du 21-08-15, p. 36.

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