« La France doit urgemment adopter des positions courageuses » sur l’accueil des réfugiés et des migrants. C’est le message porté par une cinquantaine d’organisations associatives et syndicales, dont l’ANAFE, le Centre Primo-Levi, la Cimade, Emmaüs France, la FNARS, le GISTI, Médecins du monde ou encore le Secours catholique, dans une lettre ouverte adressée à François Hollande le 10 septembre. Quelques jours avant la réunion, le 14 septembre à Bruxelles, des ministres de l’Intérieur de l’Union européenne – qui n’ont d’ailleurs pas, à cette date, trouvé d’accord sur la répartition de l’accueil des réfugiés entre les Etats membres (voir ce numéro, page 7) –, elles formulaient trois exigences. Tout d’abord, offrir des conditions d’accueil décentes aux réfugiés et migrants se trouvant déjà sur le sol français : « Aujourd’hui, il faut sortir de la logique d’encampement à Calais. La France a la capacité logistique et économique de proposer des mises à l’abri dans des dispositifs en dur, à Calais et tout au long de la trajectoire migratoire en métropole et notamment à Paris », écrivent les organisations. Dans cet objectif, elles attendent « de l’Etat et des collectivités qu’ils mobilisent des moyens humains et financiers suffisants » pour permettre un accueil digne des éxilés.
Autre préoccupation : le processus de relocalisation des candidats à la protection se trouvant dans des pays « de première arrivée », comme la Grèce, l’Italie et la Hongrie. Pour les signataires, le nombre – conforme aux critères proposés par la Commission européenne – de 24 000 personnes devant être accueillies en deux ans en France, « est inadapté à la réalité immédiate ». Le Haut Commissariat aux réfugiés estimant à « 200 000 au minimum le nombre de personnes à “relocaliser” en Europe, sachant qu’il en est arrivé 350 000 », les organisations jugent que la solidarité européenne « doit être autrement plus ambitieuse ». Elles expriment, en outre, leur inquiétude sur les méthodes qui pourraient être utilisées pour procéder au « tri » entre les demandeurs d’asile et les personnes qui devraient être « raccompagnées ». Alors que « la complexité croissante des causes de départ rend de plus en plus difficile la distinction entre asile “politique” et exil “économique” », ajoutent-elles, rejeter « ceux qui sont déjà plongés dans une extrême précarité, parce qu’ils seraient “pauvres” et non “réfugiés”, n’est pas acceptable ». Elles demandent également au chef de l’Etat d’appeler l’Union à suspendre l’application du règlement de Dublin et préconisent la renégociation avec le Royaume-Uni des règles d’entrée sur le territoire britannique, « à l’origine des problèmes majeurs rencontrés dans le Calaisis depuis bientôt 20 ans ».
Troisième sujet : les mesures qui doivent être mises en œuvre pour éviter de nouveaux drames humains parmi les personnes qui tentent de rejoindre l’Europe. Pour ouvrir des voies d’accès légales et sûres, la « délivrance de visas et la suppression des visas de transit aéroportuaire s’imposent, comme s’imposent le soutien au regroupement familial et la sécurisation des parcours ». Pour faire face à l’urgence, l’Union européenne pourrait aussi « mettre en œuvre le mécanisme prévu par la directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001 relative à l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées », suggèrent enfin les signataires. Ils enjoignent aussi à l’Etat français de « bannir, en matière de migration, toute coopération avec des Etats tiers, d’origine et de transit, qui ne respectent pas les libertés et droits fondamentaux ».