Après une première alerte publique en juin dernier(1), le Collectif des associations unies pour une nouvelle politique publique du logement des personnes sans abri et mal logées a, le 28 août, écrit au ministre des Finances et au secrétaire d’Etat au budget pour dénoncer les coupes budgétaires prévues dans le projet de loi de finances pour 2016. Une décision confirmée par Michel Sapin et Christian Eckert lors du débat d’orientation des finances publiques, le 9 juillet à l’Assemblée nationale. Au menu, une réduction de 300 millions d’euros des crédits affectés au logement, « soit une baisse de 800 millions d’euros par rapport au tendanciel ». Ces économies s’appuieront principalement, selon le ministère, sur deux leviers : « renforcer les incitations à construire auprès des bailleurs sociaux, notamment en réorganisant les circuits financiers pour une péréquation accrue du secteur », et « maîtriser la dynamique des aides personnelles au logement dans un objectif d’équité et de simplification », en tenant compte, notamment, des pistes proposées par le groupe de travail de l’Assemblée nationale présidé par François Pupponi (PS)(2).
Ces coupes, qui se concentrent donc « sur la baisse des aides au logement et des aides à la pierre, dispositifs indispensables pour contenir les effets de la crise du logement en France », inquiètent vivement les 33 organisations du collectif, écrivent ses porte-parole, Florent Gueguen, directeur général de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, et Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé-Pierre. Et de dénoncer leur incompatibilité « avec les engagements du président de la République » et « les objectifs énoncés dans le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ».
Le collectif rappelle que « les aides au logement touchent plus de 6,3 millions de ménages (un ménage sur cinq en France), soit 13 millions de personnes », à qui elles permettent d’accéder à un logement et de s’y maintenir. Les ménages bénéficiant des APL sont des ménages à bas revenus (76 % des locataires bénéficiaires ont des revenus inférieurs au SMIC) et « l’évolution du nombre des ménages aidés, passant de 6 millions en 2007 à près de 6,3 millions en 2012, témoigne d’une fragilisation de leurs ressources due aux effets de la crise économique et sociale », relève-t-il. Citant l’inspection générale des affaires sociales, les associations soulignent encore que « les loyers moyens des bénéficiaires ont augmenté de 32 % entre 2000 et 2010, tandis que les loyers-plafonds pris en compte dans le calcul des aides n’ont été valorisés que de 15 % ». Dans ce contexte, le nombre des expulsions locatives ne cesse d’augmenter.
« Lors de la campagne présidentielle, le président de la République s’est engagé à doubler le budget de l’Etat consacré aux aides à la pierre, pour atteindre un objectif de production de 150 000 logements sociaux par an », mais « seuls 117 000 logements sociaux ont été financés en 2013 et 106 000 en 2014 selon les estimations », ajoute le collectif. Face au coût du logement pour les locataires les plus pauvres, « il importe de rétablir l’aide à la pierre pour la production de PLUS [prêt locatif à usage social] et d’augmenter celle dédiée au PLAI [prêt locatif aidé d’intégration] », plaide-t-il. En outre, « la production de PLAI adaptés à des ménages très modestes peine à monter en charge », pointent les signataires, déplorant là aussi des renoncements sur certains arbitrages budgétaires.
Autre grief : la sortie de la logique d’urgence peine à se concrétiser dans les territoires. Le collectif sera donc particulièrement attentif « à ce que la prochaine loi de finances retranscrive les engagements pris dans le cadre du plan triennal de résorption des nuitées hôtelières, nécessitant un réel rebasage du BOP [budget opérationnel de programme] 177, la création de places en pensions de famille, en intermédiation locative et en hébergement familial ». Il réclame également une réponse rapide à la baisse du financement de l’accompagnement vers et dans le logement (AVDL), « dispositif pour lequel les autorisations d’engagement sont en baisse de 65 % par rapport aux crédits consommés en 2014, sous l’effet du manque de liquidités du fonds national ». Avant que le projet de loi de finances soit présenté en conseil des ministres, à la fin septembre, le collectif demande à être reçu par le ministère des Finances pour faire entendre ses revendications.