Rencontrer un tout-petit, « paradigme de la fragilité humaine », est une incitation au questionnement éthique, estime Marie Garrigue Abgrall, philosophe, éducatrice de jeunes enfants et formatrice. A partir de son expérience dans le champ de la périnatalité et de la petite enfance, notamment au sein d’une unité de prévention et de soin des troubles de la relation précoce pour les enfants de la naissance à 3 ans, l’auteure constate que, même lorsque le bébé est attendu et désiré, « il crée toujours la surprise de l’altérité, de la violence qui peut faire effraction ». A fortiori dans le cas de parents vulnérabilisés par des problèmes psychologiques et sociaux, qui les mettent dans l’incapacité de répondre aux besoins de leur enfant dans la continuité. Appelant à une attention particulière pour ces jeunes familles et à un soutien, voire un étayage, afin de les aider à instaurer les premiers liens avec leur nouveau-né, Marie Garrigue Abgrall dénonce la brièveté des séjours en maternité, même lorsque la mère est seule et sans grandes ressources pour subvenir à ses besoins. « Jetés dans le monde » plus qu’accueillis, certains enfants connaissent ainsi des conditions d’arrivée dans la vie particulièrement brutales. Ils ont tout à gagner à fréquenter les espaces d’accueil parents-enfant, inspirés de la Maison verte créée à la fin des années 1970 par la psychanalyste Françoise Dolto, développe l’éducatrice. Dans ces lieux de prévention autant que de « prévenance », bébés et adultes expérimentent des interactions positives, nouvelles et variées, à même de leur permettre de développer leurs compétences respectives.
Pour une éthique de l’accueil des bébés et de leurs parents
Marie Garrigue Abgrall – Ed. érès – 26 €