Conformément à la directive européenne 2012/29/UE du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité(1) – qui doit être transposée en droit interne avant le 16 novembre prochain –, une expérimentation a été menée dans sept tribunaux de grande instance (TGI)(2) en vue de mettre en œuvre une évaluation personnalisée des besoins des victimes d’infractions pénales, notamment en matière de protection. « Le retour est très positif », a souligné la garde des Sceaux lors des 29e Assises nationales des associations d’aide aux victimes du 19 juin dernier, engageant la généralisation du dispositif sans attendre la transposition de la directive. Pour ce faire, ont précisé ses services aux ASH, environ 900 000 € cette année et une dotation prévisionnelle de plus de 2,5 millions pour 2016 seront débloqués. Pour accompagner les évaluateurs dans leurs missions, la chancellerie a publié sur son site Internet(3) un modèle de questionnaire et un guide de l’évaluation.
Plus précisément, l’évaluation, à laquelle la victime doit consentir(4), s’effectue en deux temps, à commencer par une évaluation générale de la victime pour détecter les risques qu’elle encourt pendant la procédure pénale : représailles, intimidations, victimisations secondaires(5), etc. D’après le guide, celle-ci doit être réalisée « dès que possible » et actualisée, le cas échéant, au fur et à mesure de l’évolution de la situation de la victime. Si cette dernière n’est pas en mesure de s’exprimer, les évaluateurs pourront s’adresser à un membre de sa famille, à un travailleur social ou à toute autre personne qualifiée pouvant donner des informations à son sujet.
Les victimes les plus vulnérables ayant besoin d’une prise en charge psychologique feront alors l’objet d’une deuxième évaluation pour déterminer s’il faut mettre en place des mesures spécifiques. D’après le guide, il pourra par exemple s’agir de mesures de sûreté ou de précaution telles que le placement en détention provisoire du suspect, le déménagement de la victime, une escorte policière… Ou encore de mesures ayant pour objet « de rendre le processus judiciaire moins traumatisant » (éviter les longs délais de traitement, minimiser le nombre d’audition des mineurs, éviter le contact avec le suspect…). Ces mesures pourront aussi consister en une prise en charge psychologique – par exemple, pour surmonter la crainte d’actes de représailles ou les sentiments de culpabilité –, en une protection physique (mise en place de systèmes de surveillance au domicile de la victime…) ou encore en des mesures de protection spéciale, notamment en ce qui concerne les victimes de violences conjugales ou intrafamiliales.
(2) Ont été concernés les TGI de Bobigny (Seine-Saint-Denis), de Lyon (Rhône-Alpes), de Nancy (Meurthe-et-Moselle), de Draguignan (Var), de Béthune (Pas-de-Calais), de Pau (Pyrénées-Atlantiques) et de Saint-Martin (Guadeloupe).
(3) Ces documents peuvent être téléchargés sur
(4) Si les victimes ne souhaitent pas bénéficier de mesures de protection, cela ne doit pas empêcher les autorités de prendre des dispositions, « si cela est nécessaire, dans l’intérêt de la Justice ou pour protéger quelqu’un », explique le guide.
(5) La victimisation secondaire peut consister en des réactions négatives à l’égard de la victime ou encore être provoquée par des attitudes de surprotection, de banalisation à la suite du crime, voire par des maladresses en voulant aider les victimes.
Ces réactions ou attitudes peuvent ainsi causer des changements d’ordre physique (troubles du sommeil, de l’alimentation…), psychologique (se sentir menacé, état de choc…) ou environnemental (perte d’un emploi, de la garde de ses enfants…).