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Manuel de la probation : la CGT défend les principes de l’intervention sociale

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La CGT a, le 26 juin, claqué la porte de la dernière réunion de discussion entre l’administration pénitentiaire et les organisations syndicales sur le projet de manuel de mise en œuvre de la contrainte pénale. En gestation depuis plusieurs mois, ce guide vise, en plus de 60 pages, à préciser les procédures et pratiques professionnelles applicables par les personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) pour mettre en œuvre les dispositions prévues par les textes de référence, dont la note de cadrage du 26 septembre dernier. La CGT regrette que le projet, dont la version définitive devrait être présentée en comité technique paritaire des SPIP le 16 septembre, ne reprenne pas ses principales propositions de modifications. « L’administration pénitentiaire se focalise sur le modèle anglo-saxon “Risque Besoins Réceptivité” [RBR] qui ne doit pas être l’unique référence, explique Delphine Colin, l’une des secrétaires nationales du collectif CGT insertion probation. Par ailleurs, nous estimons que l’objectif de notre intervention est en premier lieu la réinsertion, dont la prévention de la récidive est un bénéfice. Mais l’administration pénitentiaire campe sur ses positions et le fossé idéologique se creuse. » Entre une approche centrée sur le travail social et une autre fondée sur la criminologie, les divergences ne sont, en effet, pas nouvelles.

L’avant-propos du projet de manuel, réaffirmant que la finalité de l’action des SPIP « consiste à accompagner les personnes qui lui sont confiées vers une sortie de la délinquance, notamment en favorisant leur intégration au sein de la société », semble pourtant inviter au compromis : « Considérons à présent que les approches tendant à souligner le travail sur l’insertion sociale et celles mettant en exergue la nécessité d’interroger la motivation et le comportement sont complémentaires. » Il précise que les règles européennes relatives à la probation reposent « sur un modèle fondé sur les principes du risque, des besoins et de la réceptivité, augmenté de la prise en compte des facteurs de protection de la personne et/ou de son environnement ». L’administration pénitentiaire, rappelant qu’une recherche-action est en cours sur l’évaluation des personnes placées sous main de justice, évoque le « corpus de données très vaste » issu des travaux européens et internationaux – dont ceux sur la désistance ou les « core correctional practices » – et considère que « les agents doivent pouvoir bénéficier durant les trois années à venir de sessions dédiées à ces connaissances et techniques nouvelles ».

Dérive « scientiste » ?

Le manuel décline toutes les étapes de la mise en œuvre de la contrainte pénale : constitution du dossier individuel, évaluation initiale, commission pluridisciplinaire, mise en œuvre du projet d’accompagnement et d’exécution de la mesure, évaluation continue de la situation. En matière de méthodologie, il liste les « champs à investiguer » : facteurs de risques, principaux besoins en lien avec la délinquance, « facteurs de désistance et de protection », « indices de réceptivité », analyse par la personne de ses besoins… Pour l’application du projet d’accompagnement sont évoqués des axes de travail portant sur « la motivation au changement » ou l’action sur les « besoins criminogènes ». Des logiques bien trop éloignées du travail social aux yeux de la CGT, qui craint la perte de l’identité professionnelle des SPIP au profit d’une dérive « scientiste » et, dans une contribution, avait proposé de se référer aux pratiques de l’intervention sociale. « Si les préoccupations se rejoignent, les finalités ne sont pas les mêmes. Ce n’est pas la même chose de replier une profession sur une logique de gestion du risque – celle du RBR – que de l’ouvrir sur une logique plus vaste de réinsertion sociale – qui intègre cette gestion du risque », souligne son document. « On pourrait enrichir le métier de techniques diverses et faire du modèle anglo-saxon un outil parmi d’autres, souligne Morgan Labey, également secrétaire national du collectif CGT insertion probation. Mais après plus de trois mois de négociations, l’administration n’a repris que des choses marginales parmi nos propositions. Et le problème, c’est qu’elle est déjà mobilisée sur son projet et qu’il sera difficile de revenir en arrière ! »

Dans un courrier du 20 mars aux directeurs interrégionaux, auquel est joint le projet de manuel, la directrice de l’administration pénitentiaire présente en effet la démarche et ses principes, dont « l’association de la personne à tous les stades », ou « l’opportunité pour le SPIP d’engager une action sur les besoins externes de la personne (insertion sociale, intégration) » et « un travail individuel et/ou collectif sur son comportement et ses représentations, facteurs de répétition de l’acte délictuel ou criminel ». La lettre indiquait alors que la version amendée du projet, notamment à la suite des rencontres avec les organisations syndicales, serait « mise à disposition de tous les personnels au cours du dernier trimestre ».

Le Syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire (Snepap)-FSU signale, pour sa part, certaines modifications allant dans le sens de ses propositions sur le déroulement de la mesure, tout en soulignant les difficultés à discerner, dans le manuel, ce qui relève de la pratique et de la théorie. Estimant que, au sein des SPIP « les questions du rapport à la règle, du passage à l’acte et des habilités sociales sont traitées en lien avec une infraction, et en sus de problématiques d’insertion », il considère que les travaux menés vont permettre de « conforter, consolider, enrichir » les pratiques des services. Sans toutefois les révolutionner, puisque « mettre en œuvre une relation positive avec les publics suivis, repérer les facteurs de risque et de protection, collecter et analyser les informations recueillies » font déjà partie des habitudes professionnelles des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation.

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