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Migrants à Calais : publication d’un rapport ouvrant des pistes pour sortir de la crise…

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Très attendu, alors que « la situation à Calais se tend à nouveau dangereusement » depuis plusieurs semaines, le rapport de la mission confiée l’année dernière, sur l’insistance de Médecins du monde et du Secours catholique, au préfet honoraire Jean Aribaud, ancien préfet du Nord-Pas-de-Calais, et au président de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, Jérôme Vignon, sur la situation des migrants dans le Calaisis, a été remis le 1er juillet au ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve(1). Destiné à analyser les phénomènes migratoires dans la région, à évaluer les réponses apportées au fil des années par les autorités et à proposer « des solutions réalistes », ce rapport très documenté reconnaît cependant « les limites temporelles et géographiques de ses propositions », au nombre de 17, au vu de la « situation critique » actuelle qui appelle « des solutions de crise ». Elle pourrait même, selon les deux auteurs, conduire « à hâter les solutions de long terme proposées » : engager sans attendre des négociations avec le Royaume-Uni et l’Italie « pour aboutir à un pilotage cohérent et solidaire » des flux migratoires, créer à Calais les conditions d’un dialogue, « y compris avec les communautés de migrants », et ouvrir « plusieurs zones de répit » où les migrants pourraient effectivement demander l’asile s’ils le souhaitent – en plus de la plateforme Jules-Ferry, ouverte au printemps dernier et où les conditions d’accueil soulèvent l’indignation de plusieurs associations.

Bientôt un nouveau centre ?

Dans l’immédiat, l’élément clé des propositions formulées par Jean Aribaud et Jérôme Vignon « réside dans la création, à une centaine de kilomètres de Calais, d’un centre de mise à l’abri [CMA] d’une capacité d’environ 200 personnes », dont la finalité première sera d’assurer « les conditions psychiques et physiques ainsi qu’un véritable répit permettant aux migrants qui auront manifesté le désir de considérer la possibilité d’une demande d’asile, de mûrir ce projet au contact des médiateurs culturels et à l’abri des pressions en tous genres ». Géré « avec souplesse » par l’Etat en fonction de la situation, ce CMA « pourra aussi accueillir transitoirement des demandeurs d’asile agréés par l’OFPRA [Office français de protection des réfugiés et apatrides] ainsi que des “dublinables”[2] en provenance d’Italie ».

Le centre Jules-Ferry et ses abords doivent cependant être confortés « dans leur vocation de premier accueil », affirme le rapport, à condition d’y achever les aménagements prévus, et sous réserve de réaliser impérativement la maîtrise des flux migratoires. « A plus grande échelle », la mission recommande d’ailleurs d’anticiper la question de la relocalisation européenne(3) des migrants depuis l’Italie et la Grèce, et de « traquer efficacement les filières » d’immigration irrégulière. A cet égard, et dans la perspective de la nouvelle législation française sur l’asile(4), elle suggère « d’expérimenter sur le territoire de l’arrondissement de Calais la création d’un opérateur unique auquel serait associée une antenne locale de l’OFPRA ».

Le rapport préconise aussi d’instaurer « une nouvelle gouvernance à Calais », en permettant au préfet de s’entourer d’une nouvelle instance, « à l’image de l’actuel comité de pilotage de la mission »(5), qu’il aura naturellement vocation à présider, avec la participation notamment du conseil des migrants, déjà institué à l’échelle de la municipalité.

Infléchir les projets des migrants

Principalement soudanais, érythréens, afghans, les réfugiés qui échouent dans le Calaisis en espérant pouvoir passer en Grande-Bretagne arrivent aussi de Syrie, du Sénégal, de Centrafrique, du Niger, du Mali, du Sri Lanka ou encore d’Albanie, énumèrent les deux auteurs, qui en dressent un portrait rapide : des hommes jeunes, souvent diplômés, arrivant là au terme d’un périple d’environ 18 mois. « C’est ainsi qu’à Calais, se joue la scène du monde et que se laisse entendre l’écho de conflits, de violences et de misères auxquels il est impossible de rester indifférent », poursuivent-ils. S’y joue aussi « la scène de l’Europe », confrontée « depuis trois à quatre ans » à un flux de populations « engendré par l’arrivée en Italie de vagues migratoires transméditerranéennes, qui se déploient ensuite principalement vers le nord de l’Europe », et qui se traduit par un accroissement moyen annuel des demandes d’asile de l’ordre de 20 %. Si l’attractivité britannique est confirmée par Jean Aribaud et Jérôme Vignon, ils n’en soulignent pas moins « qu’il est possible d’infléchir les projets des migrants », à condition d’assurer leur accès effectif à la demande d’asile en France, comme l’Etat s’y emploie depuis octobre 2014 avec « succès ». Une autre voie, enfin, consiste à « soutenir la mise en place d’un processus européen pérenne de réinstallation de migrants »(6) avec le concours du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies.

Disponible dans la docuthèque sur www.ash.tm.fr

Notes

(1) Rapport sur la situation des migrants dans le Calaisis – « Le pas d’après » – Juin 2015.

(2) Le règlement de Dublin impose à l’Etat où est arrivé en premier lieu le demandeur d’asile de traiter sa demande et de subvenir à ses besoins.

(3) La relocalisation est le transfert de personnes ayant demandé ou bénéficiant déjà d’une protection internationale d’un Etat membre de l’Union européenne vers un autre Etat membre qui lui accordera une protection similaire.

(4) Présenté en conseil des ministres le 23 juillet 2014 (voir ASH n° 2872 du 29-08-14, p. 57), le projet de loi relatif à la réforme de l’asile est en cours d’examen devant le Parlement.

(5) Le comité de pilotage de la mission confiée à Jean Aribaud et Jérôme Vignon est composé de représentants de l’Etat, des institutions locales et des associations, et d’une personnalité qualifiée.

(6) La réinstallation est le transfert de ressortissants de pays tiers à l’Union européenne, identifiés comme ayant besoin d’une protection internationale, vers un Etat membre où ils sont admis soit pour des raisons humanitaires, soit du fait de leur statut de réfugiés.

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