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Projet de loi sur l’immigration : le défenseur des droits s’inquiète du sort des étrangers malades

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Le projet de loi « relatif au droit des étrangers », au menu duquel figurent, notamment, des dispositions visant à améliorer l’accueil et l’intégration des étrangers régulièrement admis au séjour, mais aussi à lutter plus efficacement contre l’immigration irrégulière(1), a été adopté par la commission des lois de l’Assemblée nationale le 1er juillet(2). L’avant-veille, parce que, à l’instar de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH)(3), il estime que le texte « doit être amendé », le défenseur des droits adressait aux députés dix recommandations « sur certains points du texte »(4).

Le projet permet pourtant « une certaine avancée pour les étrangers en termes d’accès aux droits », reconnaît Jacques Toubon, saluant également « l’objectif affiché de sécurisation du droit au séjour des étrangers par la délivrance de titres plus pérennes ». Mais « ces avancées sont contrebalancées par des mesures beaucoup plus restrictives ». Le défenseur demande ainsi des retouches pour que « l’objectif de sécurisation du droit de séjour soit pleinement mis en œuvre et ne soit pas réduit à néant par des modalités de contrôle qui peuvent paraître disproportionnées ». Dans son collimateur, notamment : les dispositions relatives aux droits particuliers des étrangers malades ou en situation de handicap.

L’évaluation de l’état de santé

Comme la CNCDH avant lui, il fustige ainsi le futur transfert de la mission d’évaluation médicale aux médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Actuellement, la tâche de procéder à cette évaluation revient aux médecins des agences régionales de santé (ARS). Pour Jacques Toubon, « un tel transfert comporte le risque que l’OFII, sous tutelle exclusive du ministère de l’Intérieur, s’éloigne de l’objectif de protection et de prévention en matière de santé (individuelle et de santé publique) pour privilégier un objectif de gestion des flux migratoires et de contrôle des étrangers puisqu’aucune garantie d’indépendance de ses acteurs n’est assurée ». Le défenseur des droits y voit en outre « un signe supplémentaire du désengagement du ministère de la Santé qui considère les personnes malades étrangères comme étrangères avant d’être malades et qui accepte depuis 2012 de réduire son propre champ de compétence en la matière ».

Jacques Toubon relève pourtant une avancée importante dans le projet de texte pour les étrangers malades : la référence à la notion « d’effectivité des traitements » dans le pays d’origine pour décider de l’admission au séjour en France (là où la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration avait remplacé cette notion par celle d’« absence de traitement approprié » dans le pays d’origine). Mais il craint que ce progrès « soit à relativiser dans l’hypothèse d’une évaluation médicale menée par l’OFII ». Il recommande par conséquent que les médecins des ARS demeurent les personnes compétentes pour évaluer l’état de santé des personnes en vue de l’obtention d’un droit au séjour pour raisons médicales et préconise, au surplus, que cette évaluation se fasse de manière collégiale.

Les accompagnants d’enfants malades

Le défenseur des droits déplore également que le projet de loi initial soit muet sur le séjour des accompagnants d’enfants malades, « dont le statut mériterait pourtant d’être réformé ». En l’état actuel du droit, une autorisation provisoire de séjour (APS) peut être délivrée à l’un des parents étrangers d’un enfant nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et sous réserve de l’absence d’un traitement approprié dans le pays dont il est originaire(5). Renouvelable, l’APS n’autorise en principe pas son titulaire à travailler. « Dans l’impossibilité de travailler, ces accompagnants ne disposent pas de ressources suffisantes pour subvenir dignement aux besoins de leurs enfants », explique Jacques Toubon. Par ailleurs, « les durées extrêmement brèves des autorisations qui leur sont délivrées les contraignent à des démarches longues et répétitives en préfecture ». Il recommande en conséquence une modification de la législation afin de contraindre le préfet à délivrer une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » lorsque, après le premier renouvellement de l’APS, il apparaît que l’état de santé de l’enfant nécessite de longs soins en France. Il préconise également que cette APS soit assortie d’une autorisation de travail.

Les étrangers bénéficiaires de l’AAH

Le défenseur des droits réitère ses recommandations tendant à réformer le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, afin d’exonérer de la condition de ressources actuellement exigée tous les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) qui sont candidats au regroupement familial et à la carte de résident et qui, en raison de leur état de santé ou de leur handicap, ne sont pas en mesure de remplir cette condition.

Notes

(1) Voir ASH n° 2872 du 29-08-14, p. 5.

(2) Le projet de loi devrait être débattu en séance plénière à l’Assemblée nationale à la fin du mois de juillet.

(3) Voir ASH n° 2912 du 29-05-15, p. 12.

(4) Jacques Toubon promet un avis plus global à l’occasion de l’examen du texte au Sénat, pour aborder notamment les nouvelles règles en matière d’assignation à résidence ou bien encore l’articulation de l’intervention des juges administratif et judiciaire dans le contentieux de la rétention et de l’éloignement. En attendant, son avis du 29 juin est disponible sur www.defenseurdesdroits.fr.

(5) Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public.

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