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Claudine Rossetti : « Les choses ne bougent pas assez vite dans le secteur psychiatrique »

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Claudine Rossetti, présidente déléguée de l’Union nationale des familles et amis de personnes malades et ou handicapées psychiques (Unafam) en Ardèche, souhaite aider au développement du modèle des Invités au festin dans son département.
Comment avez-vous connu Les Invités au festin ?

J’ai commencé par lire l’ouvrage de Marie-Noëlle Besançon, On dit qu’ils sont fous et je vis avec eux, comme bien d’autres bénévoles de l’Unafam. Puis je suis allée passer trois jours à La Maison des sources de Besançon, en mai dernier. J’ai vécu trois jours fabuleux et ce qui est écrit dans le livre est réellement vécu sur le terrain. Les gens se croisent sans savoir qui est accompagné et qui est accompagnant. J’ai eu l’occasion de participer aux repas, aux activités et notamment à un café philo, avec des réflexions d’une grande qualité. On observe beaucoup d’entraide entre les personnes et beaucoup de chaleur humaine. J’ai d’ailleurs été accueillie à bras ouverts et j’ai été très vite embarquée dans le mouvement. J’ai enfin ressenti beaucoup de légèreté, ce qui est rafraîchissant dans le domaine de la maladie psychique.

En quoi ce modèle de psychiatrie citoyenne se différencie-t-il des autres prises en charge ?

Au-delà de ses valeurs humanistes, dans lesquelles nous nous reconnaissons, le modèle économique de l’association est intéressant. Contrairement à beaucoup de structures, Les Invités au festin [IAF] ne vivent pas uniquement des fonds de l’Etat. La puissance publique a évidemment son rôle à jouer, mais si l’on veut donner un rôle de citoyen aux personnes en situation de handicap psychique, il faut aussi qu’elles soient parties prenantes. La friperie de l’association, par exemple, est un bon moyen de faire entrer de l’argent. Chacun fait sa part. Cette activité permet aussi de retrouver ou découvrir des compétences. Les participants ne sont plus des malades, mais des personnes avec un potentiel. Les bénévoles font également un travail extraordinaire. Ils y mettent énormément d’énergie mais gagnent autant qu’ils donnent.

Pourquoi cette expérience suscite-t-elle du scepticisme chez certains psychiatres et certaines familles ?

La méfiance provient du monde médical de manière plus large. Certains médecins sont dans la toute puissance. Pour ce qui est des familles, je peux comprendre cette méfiance, étant moi-même parent d’un enfant en difficulté psychique. Quand un proche rentre dans la maladie et subit sa première hospitalisation, c’est un véritable tsunami pour toute la famille. Après deux ou trois hospitalisations, on n’a pas envie d’en revivre une quatrième. On a tellement peur que cela arrive de nouveau que cette peur nous fait peut-être « infantiliser nos proches ». A l’Unafam, on mène cependant tout un travail pour aider nos proches à trouver petit à petit leur place d’adultes pleinement acteurs de leur vie.

Quels sont les besoins en matière de prise en charge des personnes souffrant de troubles psychiques dans votre département ?

Nous avons récemment produit un livre blanc avec le centre hospitalier Sainte-Marie-de-Privas et sept autres structures. Ce document répertorie tout ce qui existe en termes d’accompagnement, d’hébergement et de travail dans le département. Des logements accompagnés, des appartements collectifs et des appartements thérapeutiques sont bien en projet, mais le manque de solutions d’hébergement est patent. Les choses ne bougent pas assez vite. Je souhaite désormais accompagner des projets, de type accueil de jour ou groupe d’accueil mutuel, sur le modèle des Invités au festin. Pour ce faire, nous souhaiterions programmer la venue des représentants des IAF d’ici à la fin de l’année, mais aussi, pourquoi pas, les solliciter pour mettre en place des formations professionnelles.

Ce modèle vous semble-t-il généralisable à plus grande échelle ?

Il faut du temps avant que les gens osent faire évoluer leurs pratiques. Même si ces dix dernières années, la psychiatrie a déjà beaucoup progressé. Ce qu’il faudrait, c’est davantage de passerelles entre le sanitaire, le médico-social et le social, pour éviter les ruptures dans le parcours de vie des malades. L’hôpital psychiatrique a quelque chose de sécurisant pour les patients et leurs familles mais on peut le penser autrement. Il faudra encore malheureusement, je pense, 20 ou 30 ans pour que les choses avancent vraiment.

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