Le centre Enfants en justice s’est transformé en fête foraine, le temps d’une exposition thématique ambitieuse sur les « Mauvaises filles ». Chamboule-tout, miroirs déformants, tir à la carabine, photomaton, cabinet noir, buvette et stand de confiseries… chaque attraction risque de mener sur les chemins de la « mauvaise vie » ! Tout commence par le jeu de l’oie blanche. Le visiteur-joueur devra s’emparer du dé pour accéder, de cases en cases, aux différentes thématiques et parvenir, à la fin du plateau, soit à la Liberté soit à l’Enfermement. Chaque visite de l’exposition est donc unique puisqu’elle dépend de l’avancée du pion et de la réussite des épreuves. Cette scénographie ludique, les professionnels du centre d’exposition l’ont imaginée avec l’aide d’un comité scientifique composé d’historiens et d’éducateurs, avant d’en confier la réalisation à la graphiste Alix Miquel et aux décorateurs de l’association Phényx. « L’idée était de montrer à travers un jeu de l’oie la difficulté de rester une “bonne fille” et l’importance des normes sociales imposées aux jeunes filles à travers les trois derniers siècles, explique la responsable du centre, Véronique Blanchard, qui assure les visites médiatisées. Plus globalement nous abordons, au long du parcours, la question du regard posé sur la déviance juvénile féminine par la justice et la société. Qui considère-t-on comme de mauvaises filles ? Quelle différence entre une mauvaise fille et un mauvais garçon ? Dans quels lieux les enferme-t-on ? Autant d’interrogations qui permettent de parler de l’évolution du droit des femmes, de la question du corps et de la sexualité, des addictions, de l’errance au féminin… » L’exposition présente aussi une grande variété de documents : des extraits de films, des photos d’archives, et même un exemplaire du Livre de la jeune fille, qui détaillait, en 1922, « les connaissances pratiques nécessaires dans la vie ». Au mur, également, des posters présentant des portraits « types » de mauvaises filles : Albertine la rebelle, Dan la chef de bande, Amélie l’Apache, Simone la mère abandonneuse, Christiane la toxicomane, Solenn l’anorexique ou Elise la vagabonde. Une salle à part est consacrée aux lieux d’enfermement, et plus spécifiquement aux institutions du Bon Pasteur, ces congrégations religieuses auxquelles étaient confiées les « filles perdues » dans les années 1950-1960.
Ces établissements où l’on culpabilisait les mineures qui avaient perdu leur virginité, où elles étaient enfermées sans qu’elles aient commis de délit, ces zones de non-droit où les filles étaient exploitées par des sœurs fanatiques, c’est aussi ce qui a inspiré la troupe du Théâtre du Fil. Implantée comme Enfants en justice sur le site de la Ferme de Champagne, à Savigny-sur-Orge, la compagnie s’est appuyée sur l’exposition pour monter sa nouvelle création, Les mauvaises filles. Une quinzaine de comédiens enthousiastes représentent dans une première partie le lieu de perdition qu’est la fête foraine, où s’amusent et se dévergondent quelques jeunes filles dans des scènes de danses et de chants. On les retrouve, après l’entracte, entre les murs du Bon Pasteur, où elles sont censées oublier leur vie passée et se restreindre à « silence et prière, lecture pieuse, piété et pénitence » …
Mauvaises filles. Déviantes et délinquantes. 19e/21e siècles
Jusqu’au 18 décembre au centre d’exposition Enfants en justice – Ferme de Champagne, rue des Palombes – 91600 Savigny-sur-Orge – Réservation : 0169542419 ou
Les mauvaises filles
Théâtre du Fil – Pour soutenir la tournée estivale :