Prime à la première embauche, indemnités prud’homales plafonnées, gels des seuils sociaux, contrats à durée déterminée (CDD) renouvelables deux fois… le Premier ministre a annoncé, le 9 juin, une série de 18 mesures pour favoriser l’emploi, en particulier dans les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME). Objectifs, selon Manuel Valls : « répondre aux préoccupations quotidiennes et aux besoins concrets des TPE et des PME afin de lever les freins à l’emploi, développer l’activité, faciliter la création et la reprise d’entreprise [et] alléger les formalités ». Tour d’horizon des principales mesures annoncées qui, pour celles qui relèvent de la loi, seront intégrées dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques – dit projet de loi « Macron » –, le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi et les lois financières de fin d’année.
Pour lever les freins à l’emploi dans les TPE et les PME, le gouvernement a tout d’abord décidé de mettre en place une aide temporaire à la première embauche de 4 000 € sur deux ans, avec un premier versement de 2 000 € dès la fin de la période d’essai. Sont concernés tous les contrats de travail à durée indéterminée et les CDD de plus de 12 mois signés entre le 9 juin 2015 et le 8 juin 2016. Cette aide sera entérinée par un décret pris « dans les prochaines semaines », a précisé le ministre de l’Economie, selon qui elle devrait permettre de créer de 60 000 à 80 000 emplois.
Le plan présenté par le chef du gouvernement prévoit par ailleurs de consolider la relation employeur-apprenti dès le début du contrat. En l’état actuel du droit, les contrats d’apprentissage prévoient une période de deux mois durant laquelle le contrat peut être rompu unilatéralement par les deux parties. Passé ce délai, la rupture du contrat ne peut survenir que dans certaines conditions (accord écrit des deux parties, résiliation à la seule initiative de l’apprenti en cas d’obtention du diplôme). « Or cette période intègre le temps passé en formation. De facto, la phase de découverte réciproque en entreprise est très réduite », souligne Matignon qui propose donc de conserver la phase des 60 premiers jours durant laquelle le contrat peut être rompu simplement, mais de ne prendre en compte que la durée de présence effective de l’apprenti au sein de l’entreprise pour la calculer, les périodes de formation théorique n’étant plus prises en compte. Cette mesure s’appliquera à compter de l’entrée en vigueur de la loi relative au dialogue social et à l’emploi.
Le gouvernement entend lancer, à compter du second semestre 2015, un plan complémentaire de 40 000 formations prioritaires pour les demandeurs d’emploi, ciblées sur les métiers en tension dans les TPE-PME. Ce plan viendra compléter les 60 000 formations annoncées par le Premier ministre le 12 mai dernier, qui concernaient l’abondement du compte personnel de formation des demandeurs d’emploi(1). « Il mobilisera des moyens exceptionnels dans le cadre de la préparation opérationnelle à l’emploi et d’achats individuels de Pôle emploi », précise Matignon. Autre mesure : permettre d’expérimenter le remplacement gratuit des salariés des TPE-PME qui partent en formation par des demandeurs d’emploi de longue durée dont le salaire sera pris en charge par Pôle emploi (à hauteur de l’allocation qu’ils percevaient) et un organisme paritaire collecteur (pour le reste à charge).
Actuellement, dans la plupart des cas, les CDD et les contrats d’intérim ne peuvent être renouvelés qu’une seule fois, y compris lorsque l’employeur et le salarié ne sont pas allés au bout de la durée maximale cumulée prévue par le code du travail, à savoir 18 mois pour le droit commun. A l’avenir, il sera possible de renouveler deux fois au lieu d’une seule le CDD ou le contrat d’intérim du salarié dès lors qu’est respectée la durée totale maximale de recours à ce type de contrat. « Cette mesure s’appliquera dès l’entrée en vigueur de la loi relative au dialogue social et à l’emploi, avec un effet sur les contrats en cours », précise les services de Manuel Valls.
Le gouvernement souhaite, par ailleurs, simplifier et réduire les effets provoqués par le franchissement des seuils d’effectifs. En effet, par exemple, « en passant de 1 à 50 salariés, une entreprise peut se voir imposer plus d’une soixantaine d’obligations nouvelles et changements de normes ». Et le franchissement de certains seuils « entraîne une hausse des prélèvements fiscaux ou sociaux, susceptible faire hésiter certaines entreprises à embaucher ». Aussi le Premier ministre a-t-il annoncé que, au cours des trois prochaines années (jusqu’à la fin 2018), les recrutements des entreprises jusqu’à 50 salariés inclus ne déclencheront pas de prélèvements fiscaux et sociaux supplémentaires. En outre, et de manière pérenne, tous les seuils de 9 et 10 salariés (notamment en matière de cotisations « formation professionnelle » et de versement transport) seront relevés à 11 salariés. De plus, « les méthodes de calcul des seuils seront simplifiées et, chaque fois que cela est possible, harmonisées ». Ces nouvelles règles seront introduites dans les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 et s’appliqueront aux effectifs de 2015.
Parce qu’« un employeur a besoin de savoir dans quelles conditions, dans quels délais et à quel coût il peut se séparer d’un salarié », le gouvernement veut encadrer, avec un minimum et un maximum, le montant les indemnités prononcées par les conseils de prud’hommes pour la réparation de l’absence de cause réelle et sérieuse d’un licenciement. Ce montant variera selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise et la taille de cette dernière (moins de 20 salariés ou au moins 20 salariés). Par exemple, dans une entreprise de 7 salariés, un salarié ayant 10 ans d’ancienneté percevra au minimum 2 mois de salaire et au maximum 6 mois de salaire. Dans une entreprise de 150 salariés, ces montants s’élèveront respectivement à 4 et 10 mois de salaire. En outre, « le vice de forme ne remettra plus en cause le caractère réel et sérieux du licenciement et fera l’objet d’une indemnisation du salarié forfaitaire d’un mois de salaire ». Ces mesures s’appliqueront aux ruptures de contrat de travail survenues après l’entrée en vigueur de la loi « Macron ».
Enfin, le gouvernement entend mettre en place un plan visant, dès le second semestre 2015, à :
→ doubler le nombre de demandeurs d’emploi accompagnés par Pôle emploi et porteurs d’un projet de création/reprise d’entreprise – qui passera de 35 000 à 70 000 – et à augmenter le nombre de créateurs accompagnés dans le programme « nouvel accompagnement à la création ou la reprise d’entreprise », dit « NACRE » ;
→ créer un partenariat global avec les régions pour structurer des parcours d’appui à la création d’entreprise pour les demandeurs d’emploi et les jeunes en recherche d’insertion, et préparer le transfert du dispositif « NACRE » aux régions en 2017.