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L’Union européenne demande à la France d’accueillir un peu plus de 9 000 migrants

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La Commission européenne a détaillé, le 27 mai, son plan de répartition par pays des migrants ayant besoin d’une protection internationale, présenté 15 jours auparavant dans son « Agenda pour la migration »(1). Elle charge ainsi la France d’accueillir temporairement 9 127 migrants, sur les 60 000 prévus pour l’ensemble de l’Europe. Ce chiffre résulte d’une clé de répartition fondée sur la taille de la population (40 %), le produit intérieur brut total (40 %), le nombre de demandes d’asile reçues et de places de réinstallation déjà offertes ces cinq dernières années (10 %), et le taux de chômage (10 %). L’objectif, a assuré la haute représentante de l’Union européenne (UE) pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, est de « sauver rapidement des vies et [d’]assurer aux personnes ayant besoin d’asile une protection dans l’UE, qu’elles se trouvent en mer, sur le territoire de l’Union ou dans un pays tiers ».

Le « paquet » de mesures annoncées s’articule autour d’un projet de décision portant sur un mécanisme temporaire de relocalisation, d’une recommandation créant un programme de réinstallation, d’un plan d’action 2015-2020 contre le trafic de migrants, d’une série de lignes directrices sur le relevé d’empreintes digitales et d’une consultation publique sur le devenir de la directive « carte bleue ». Sans surprise, ce sont les documents relatifs à la relocalisation(2) et la réinstallation(3) de réfugiés qui ont suscité le plus de réactions.

Relocalisation et réinstallation des réfugiés

Le mécanisme d’intervention d’urgence en matière de relocalisation porte sur le transfert de demandeurs d’asile depuis la Grèce et l’Italie vers les autres Etats membres. Concrètement, il devrait s’appliquer pour une durée de deux ans aux ressortissants syriens et érythréens ayant besoin d’une protection internationale et qui sont arrivés en Italie ou en Grèce après le 15 avril ou qui y arriveront après l’activation du mécanisme. La Commission n’exclut pas de lancer « un programme du même type si d’autres Etats membres, tels que Malte, doivent également faire face à un afflux soudain de migrants ». D’après la proposition de l’exécutif européen, quelque 40 000 migrants pourraient être concernés, ce qui correspond à « 40 % du nombre de personnes qui ont eu un besoin clair de protection internationale et qui sont rentrées de manière irrégulière en Europe en 2014 ». La France, elle, serait spécifiquement chargée d’accueillir 16,88 % de la charge globale, soit 4 051 migrants en provenance d’Italie et 2 701 autres en provenance de Grèce. Tout comme les 21 autres Etats participants(4), elle devrait recevoir 6 000 € par personne relocalisée sur son territoire. Avant d’être effective, cette décision doit d’abord être validée par le Conseil de l’UE, à la majorité qualifiée, après consultation du Parlement européen.

L’autre mesure phare proposée par la Commission européenne est l’établissement d’un programme de réinstallation, qui recommande aux Etats membres de réinstaller, sur une période de deux ans, 20 000 personnes provenant de pays tiers et dont le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a reconnu qu’elles ont manifestement besoin d’une protection internationale. A l’heure actuelle, seuls 15 Etats membres de l’UE, dont la France, ont des programmes de réinstallation, trois pratiquent ponctuellement la réinstallation et les autres ne participent pas à ce mécanisme. La Commission demande à la France d’offrir des places de réinstallation à 2 375 personnes (11,87 %) dès septembre 2015. Les Etats membres qui participent au programme auront droit à une aide financière, l’UE mettant 50 millions d’euros à leur disposition sur la période 2015-2016.

Un mécanisme qui ne satisfait pas la France

Dans un communiqué commun du 1er juin, les ministres de l’Intérieur français et allemand, Bernard Cazeneuve et Thomas de Maizière, indiquent qu’ils sont prêts à « examiner » un mécanisme « temporaire et exceptionnel » de transfert des demandeurs d’asile dans la perspective du prochain Conseil « affaires intérieures » du 15 juin. Mais ils exigent une clé de répartition qui prenne mieux en compte les efforts déjà consentis et les autres formes d’assistance déjà mises en place, telles que l’admission humanitaire. « Actuellement, rappellent les deux ministres, cinq Etats membres se partagent 75 % des demandeurs d’asile : la France et l’Allemagne, la Suède, l’Italie et la Hongrie. Cette situation n’est plus soutenable », estiment-ils.

Pour Bernard Cazeneuve et Thomas de Maizière, « des discussions approfondies seront nécessaires au niveau européen » pour parvenir à un mécanisme temporaire de relocalisation respectant les principes de responsabilité et de solidarité. Dans ce contexte, ils avancent des propositions. Selon eux, les migrants arrivant dans les pays de première entrée doivent être dirigés vers des centres d’attente (« hotspots ») situés à proximité des points de débarquement où il sera procédé à leur identification et à leur enregistrement. Ils feront ensuite l’objet d’une procédure adaptée à leur situation, indiquent les deux ministres. A partir de là, une partie des demandeurs d’asile en besoin manifeste de protection sera relocalisée dans les autres Etats membres, selon la clé de répartition qui aura été agréée. Quant aux migrants irréguliers, ils « devront rapidement faire l’objet de mesures de retour ou d’éloignement », estiment Bernard Cazeneuve et Thomas de Maizière. Pour cela, le soutien de l’Agence Frontex aux opérations de retour « devra être étendu, particulièrement lorsque les Etats membres feront face à un flux exceptionnel de migrants irréguliers d’Etats tiers. Les contacts avec les pays d’origine devront également être renforcés, afin d’assurer le retour de ces migrants », expliquent les ministres.

Pour Bernard Cazeneuve et Thomas de Maizière, les migrants n’appartenant à aucune de ces deux catégories devront voir leur situation examinée dans le cadre des procédures de droit commun de l’asile, dans les pays de première entrée.

Notes

(1) Voir ASH n° 2911 du 22-05-15, p. 9.

(2) La relocalisation est le transfert de personnes ayant demandé ou bénéficiant déjà d’une protection internationale d’un Etat membre de l’UE vers un autre Etat membre qui lui accordera une protection similaire.

(3) La réinstallation est le transfert de ressortissants de pays tiers ou d’apatrides, identifiés comme ayant besoin d’une protection internationale, vers un Etat de l’UE où ils sont admis soit pour des raisons humanitaires, soit du fait de leur statut de réfugiés.

(4) Les traités européens octroient un opt-in (droit d’option) au Royaume-Uni et à l’Irlande, qui peuvent décider de participer ou non au mécanisme. Le Danemark, lui, bénéficie d’un opt-out, qui exclut sa participation.

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