Après avoir reçu, le 26 mai, un rapport sur le compte personnel de prévention de la pénibilité corédigé par le député socialiste Christophe Sirugue, le chef d’entreprise Gérard Huot et le conseiller-maître à la Cour des comptes Michel de Virville(1), le Premier ministre a présenté, en présence du ministre du Travail et de son homologue aux Affaires sociales et à la Santé, une série de mesures visant à simplifier ce dispositif. Mis en place par la réforme des retraites de 2014, le compte pénibilité doit permettre aux salariés de droit privé exposés à certains facteurs de pénibilité, quelle que soit la nature de leur contrat de travail, d’accumuler des points sur un compte tout au long de leur carrière, l’idée étant que ces points leur permettent de se former, de travailler à temps partiel ou de partir plus tôt à la retraite(2). Si le rapport « réaffirme l’importance de cette démarche », il identifie néanmoins « plusieurs facteurs de complexité et de risques liés à la mise en œuvre des dix facteurs d’exposition », indique Matignon.
En premier lieu, répondant aux inquiétudes des entreprises, Manuel Valls a annoncé le report de six mois(3), soit au 1er juillet 2016, de la mise en œuvre des six derniers critères d’exposition retenus pour bénéficier du compte pénibilité (port de charges lourdes, postures pénibles, vibrations mécaniques, bruit, températures extrêmes, agents chimiques dangereux), les quatre premiers (travail de nuit, répétitif, en horaires alternants ou en milieu hyperbare) étant déjà en vigueur depuis le 1er janvier 2015. Rappelons que, face à la fronde du patronat, Manuel Valls avait déjà reculé une première fois sur cette question en juillet 2014 et décidé le report partiel de la mise en place du compte pénibilité(4). Afin que le décalage au 1er juillet 2016 ne pénalise pas les salariés concernés, ceux-ci bénéficieront exceptionnellement pour le second semestre 2016 des points équivalant à une année entière, a précisé le Premier ministre.
Le chef du gouvernement a également annoncé que, pour évaluer l’exposition de ses salariés, l’employeur « n’aura plus de mesures individuelles à accomplir » puisqu’il pourra s’appuyer sur un « référentiel de sa branche qui identifiera quels postes, quels métiers ou quelles situations de travail sont exposés aux facteurs de pénibilité ».
En outre, pour simplifier les formalités liées au compte pénibilité, l’obligation d’établir et de transmettre aux salariés des fiches individuelles d’exposition ne reposera plus sur l’employeur, quelle que soit la taille de l’entreprise. Celui-ci se contentera de déclarer en fin d’année à la caisse d’assurance retraite et de santé au travail les salariés exposés. Celle-ci se chargera ensuite d’informer les salariés de leur exposition et des points dont ils bénéficient.
Par ailleurs, parmi les propositions du rapport, le gouvernement reprend celles qui visent à modifier la définition de certains facteurs, à commencer par le facteur de pénibilité « gestes répétitifs ». A cet égard, une mission particulière sur ce facteur sera conduite afin de formuler, d’ici à la fin du mois de juillet, des propositions permettant d’adapter sa définition à la réalité du travail. Matignon indique enfin que le futur plan « santé au travail », en cours d’élaboration, mettra l’accent sur la prévention de la pénibilité.
Ces mesures de simplification feront l’objet d’amendements au projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, en cours d’examen au Parlement.
(1) « Compte personnel de prévention de la pénibilité : propositions pour un dispositif plus simple, plus sécurisé et articulé avec la prévention » – Disp. sur
(3) Signaons que le rapport remis à Manuel Valls ne préconisait pas ce report, mais suggérait simplement que l’adminsitration s’abstienne de tout contrôle les deux premières années d’application.