C’était il y a un an. Martin, étudiant en journalisme, s’inquiétait du sort des sans-domicile fixe à la fin de l’hiver, et regrettait que ceux-ci deviennent subitement « invisibles ». Il lance alors un « média associatif » en ligne dédié à ce public précaire. Depuis, le site web Sans A, alimenté par des bénévoles et les sans-abri eux-mêmes, s’est bien étoffé. Sans A pour « sans abri », « sans argent », « sans avenir », « sans attention ». Mais pas sans humour, ni espoir ou humanité. Le site Internet mêle photos, textes, sons et dessins pour informer de façon large sur la vie à la rue. La mise à jour est de plus en plus régulière, informant les visiteurs sur les chiens des SDF ou les migrants de Calais. Mais en dehors de ces actualités, la richesse de Sans A, ce sont ces superbes témoignages au long cours, portraits léchés de sans-abri. Ainsi, avec Jean-Marc, qui vit depuis deux ans et demi sous les arcades de la gare Saint-Lazare, à Paris, on est très loin du micro-trottoir, on sent qu’un rapport de confiance s’est instauré avec l’équipe avant qu’il confie son histoire. Les images en noir et blanc du photographe Agy mettent particulièrement en valeur son regard profond. Gilles, lui, vit depuis dix ans à la rue mais réfute le terme de sans-abri – il se considère comme un dandy urbain qui passe ses nuits dehors et se sert occasionnellement du centre d’hébergement d’urgence. Pour cet hyperactif, impossible de fixer l’objectif. Brigitte, elle, s’est « perdue dans la bouteille ». A 41 ans, elle a le visage marqué et plus beaucoup d’espoir : depuis trois ans, elle se bat contre le sida. Il faut également cliquer sur l’onglet « Coup de crayon » pour ne pas rater les dessins d’actu, cyniques et drôlissimes, de Rodho et de Fabb, qui dénoncent la bêtise humaine.
Culture
Invisibles en lumière
Article réservé aux abonnés