Annoncée par le Premier ministre le 3 mars dernier dans le cadre du plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale(1), la prime d’activité se précise. Le ministre du Travail a en effet dévoilé, le 22 avril en conseil des ministres, son projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi(2) qui trace les contours de cette prime, censée remplacer, à partir du 1er janvier 2016, le revenu de solidarité active (RSA) « activité » et la prime pour l’emploi. Inspirée du rapport « Sirugue » de juillet 2013(3), la prime d’activité est conçue comme un complément de revenu mensuel destiné aux travailleurs à ressources modestes afin de soutenir leur pouvoir d’achat et de favoriser le retour et le maintien dans l’emploi. Elle vise également, selon l’exposé des motifs du projet de loi, à accompagner « l’insertion professionnelle des jeunes actifs, souvent marqués par les contrats précaires et le temps partiel, synonymes de rémunérations modestes », incluant ainsi les jeunes de moins de 25 ans – exclus actuellement du RSA. La prime concernerait plus de 5,6 millions d’actifs, parmi lesquels 1,2 million de jeunes actifs, pour une dépense annuelle de près de 4 milliards d’euros.
Selon le projet de loi, pour pouvoir bénéficier de la prime d’activité, il faut :
→ être âgé de plus de 18 ans ;
→ percevoir des revenus tirés d’une activité professionnelle ou des revenus assimilés (rémunération sous forme de chèque emploi-service universel, indemnités journalières de sécurité sociale, rémunération perçue par les travailleurs en établissements et services d’aide par le travail…). Les indemnités de chômage ne sont en revanche pas assimilées à des revenus d’activité, à l’exception des indemnités de chômage partiel qui ont vocation à soutenir le temps partiel subi ;
→ être de nationalité française ou être titulaire depuis au moins cinq ans d’un titre de séjour autorisant à travailler. Des exceptions sont toutefois prévues (ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne, réfugiés, étrangers titulaires de la carte de résident…).
En revanche, la prime d’activité ne devrait pas s’appliquer aux travailleurs détachés temporairement en France. Et, si le texte du projet de loi prévoit que les étudiants salariés et les apprentis n’en bénéficieront pas non plus, la ministre des Affaires sociales a toutefois déclaré, à l’issue du conseil des ministres, que « la prime d’activité sera élargie, par voie d’amendement gouvernemental présenté à l’Assemblée nationale, aux apprentis et aux étudiants qui travaillent dans des conditions qui leur permettent d’obtenir une rémunération au moins égale à 0,8 SMIC », soit l’équivalent d’un peu plus de 900 € net par mois pour un travail à temps plein (sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 17). Une déclaration qui met fin à la confusion qui régnait sur ce point depuis l’intervention du chef de l’Etat, le 19 avril dans le magazine « Le Supplément » de Canal +, au cours duquel il avait évoqué son souhait de voir la prime étendue aux jeunes « qui acceptent les petits boulots, des stages, quelques fois des contrats qui durent un mois », sans être plus précis.
Selon le projet de loi, la prime d’activité sera versée mensuellement sous conditions de ressources du ménage. Elle se déclenchera dès le premier euro de revenu d’activité. Son montant sera étroitement lié aux revenus d’activité des bénéficiaires. Et, afin de ne pas diminuer le montant de la prestation versée aux actuels bénéficiaires du RSA « activité », la prime d’activité devrait comprendre une part « familialisée ». A cette part s’ajouterait une bonification liée aux revenus d’activité individuels, en vue d’aider particulièrement les personnes rémunérées entre 0,8 et 1,2 SMIC.
Plus précisément, le calcul de la prime d’activité devrait tenir compte, pour chaque foyer :
→ d’un montant forfaitaire, dont le niveau variera en fonction de la composition du foyer et du nombre d’enfants à charges. Ce montant pourra faire l’objet d’une bonification qui sera établie pour chaque travailleur, membre du foyer, compte tenu de ses revenus professionnels ;
→ des ressources ayant le caractère de revenus professionnels ou qui en tiennent lieu ;
→ des revenus de remplacement des revenus professionnels ;
→ de l’avantage en nature que constitue la disposition d’un logement à titre gratuit, déterminé de manière forfaitaire ;
→ des prestations et aides sociales, à l’exception de certaines d’entre elles en raison de leur finalité sociale particulière ;
→ des autres revenus soumis à l’impôt sur le revenu.
Le barème de la prime envisagé par l’étude d’impact du projet de loi, susceptible d’évoluer et qui sera précisé par voie réglementaire, est, pour un célibataire sans enfant, le suivant :
185 € par mois pour un quart-temps (soit 0,25 SMIC) ;
246 € pour un mi-temps (0,5 SMIC) ;
188 € pour un 3/4-temps (0,75 SMIC) ;
132 € pour un temps plein.
Le montant de la prime devrait diminuer jusqu’à 1,3 SMIC.
Par ailleurs, la mise en œuvre de la prime d’activité, décrite par l’exposé des motifs du projet de loi comme étant d’une « grande simplicité », reposera sur des démarches allégées. Ainsi, une fois inscrits à la caisse d’allocations familiales (CAF), les bénéficiaires devront déclarer tous les trois mois, par voie dématérialisée (ou par courrier s’ils ne disposent pas d’un accès Internet), leurs revenus d’activité et de remplacement perçus au cours du trimestre précédent. Avant chaque déclaration, l’échéance sera rappelée aux bénéficiaires (par mail ou SMS). En outre, un simulateur des droits permettra d’évaluer directement le montant de la prime, sur le fondement de données réelles si le salarié est déjà allocataire. A compter de 2017, pour plus de simplicité, les données seront directement récupérées par les CAF via la déclaration sociale nominative des entreprises.
(2) Les ASH reviendront dans un prochain numéro sur le volet du projet de loi relatif à la modernisation du dialogue social.