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La domiciliation manque de moyens et de coordination, selon l’Unccas

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Une enquête menée auprès des centres communaux d’action sociale montre les tensions qui pèsent sur la domiciliation, surtout dans les grandes villes, où les refus sont plus fréquents. L’Unccas demande un meilleur maillage territorial, Ségolène Neuville promet de remobiliser les préfets.

En donnant la possibilité de recevoir du courrier et d’accéder à des prestations et droits fondamentaux, mais aussi de conserver des relations avec les proches, la domiciliation « occupe une place essentielle » dans la lutte contre le non-recours aux droits, rappelle l’Union nationale des centres communaux et intercommunaux d’action sociale (Unccas) en préambule d’une enquête sur cette pratique au sein des CCAS, menée entre janvier et avril 2014 auprès de ses adhérents(1). De cette étude, présentée le 7 avril dans le cadre d’une journée d’échanges et de restitution, il ressort que « l’impact » de ce dispositif est « très hétérogène » selon les territoires : si les trois quarts (76 %) des CCAS ayant répondu à l’enquête (1 458 sur 3 945) déclarent pratiquer la domiciliation, il y a « une césure nette » entre les CCAS implantés sur un territoire de moins de 5 000 habitants qui ne sont que 59 % à le faire, contre 93 % en moyenne parmi ceux de plus de 5 000 habitants. Compte-tenu de cette diversité territoriale, l’Unccas estime que « le fait qu’un CCAS ne domicilie pas ne doit pas être interprété par défaut comme le signe de son refus de le faire, mais plutôt comme l’effet d’une absence de sollicitation par les personnes de sa commune ».

Neuf CCAS sur dix domicilient dans le cadre du droit au logement opposable (DALO), 44 % dans celui de l’aide médicale de l’Etat (AME) et 15 % dans celui de la demande d’asile. Par ailleurs, si les CCAS domicilient en majorité des personnes isolées, les grandes villes sont davantage confrontées à des demandes de familles. L’obtention d’une prestation ou d’un minimum social constitue le premier motif des demandes de domiciliation, le second motif le plus souvent cité concernant les « autres démarches administratives ou personnelles », tandis que l’obtention d’un document d’identité arrive en troisième position.

Obligations contournées

Les résultats ne masquent pas les « tensions » existantes autour du dispositif, notamment le fait que « certains CCAS contournent leur obligation légale de domiciliation ». L’Unccas souligne « les difficultés que pose le dispositif sur certains territoires fortement impactés, notamment en l’absence de moyens mobilisés par l’Etat pour accompagner la mise en œuvre de cette mission obligatoire ». Certains territoires, en particulier les grandes villes, subissent en effet une pression plus forte en termes de demandes de domiciliation, en raison notamment de la présence plus importante de populations précaires, de structures de soins – avec une répercussion sur les demandes de domiciliation au titre de l’AME ou de la couverture maladie universelle (CMU) – et de structures d’hébergement d’urgence. « Outre l’impact en termes de charge de travail sur le CCAS, ceci peut avoir des effets sur les autres services publics du territoire […] ou encore [sur] le recours aux aides sociales proposées par la commune », analysent les auteurs.

Au cours de l’enquête, 40 % des CCAS domiciliataires ont rapporté avoir déjà notifié des refus de domiciliation. « La taille de la commune d’implantation du CCAS influe clairement, elle-même impactée par la présence d’autres organismes domiciliataires sur le territoire », pointe l’enquête. Les deux principaux motifs invoqués sont l’absence de lien avec la commune – citée par 83 % des CCAS déclarant des refus –, suivie par le fait que la personne ne soit pas sans domicile stable, motif évoqué dans 38 % des cas, cette proportion s’élevant à 51 % dans les grandes villes contre 29 % dans celles de moins de 5 000 habitants. Conformément aux dispositions réglementaires, les CCAS ayant notifié un refus de domiciliation réorientent la personne vers une association agréée ou vers une autre commune. « Néanmoins, un quart (26 %) des domiciliataires affirme pouvoir procéder à des dérogations dans la notion de lien avec la commune, et ceci de manière plus marquée dans les villes de plus de 30 000 habitants (36 %). »

Autre sujet sensible : la question de la non-prise en charge de certains publics, près d’un quart (23 %) des CCAS domiciliant dans le cadre de la loi DALO indiquant exclure certains publics de l’éligibilité à cette domiciliation. Par ailleurs, les gens du voyage et, dans une moindre mesure, les ressortissants étrangers sollicitant ce dispositif pour l’obtention de l’aide juridictionnelle constituent les deux catégories les plus citées parmi les publics pouvant être exclus par les CCAS, en raison notamment de « la difficulté d’évaluer [leur] lien avec la commune ». Ces deux catégories de publics sont par ailleurs plus souvent exclues de la domiciliation lorsqu’il existe d’autres organismes domiciliataires sur le territoire. Et « dans le cas des gens du voyage, cette pratique augmente avec la taille de la commune », les auteurs émettant « l’hypothèse d’une répartition des publics entre les CCAS et les autres organismes domiciliataires ».

Un dispositif à améliorer

En matière de coordination et de gouvernance territoriale du dispositif, 13 % des CCAS domiciliataires disent connaître d’autres organismes agréés pour l’élection de domicile sur leur territoire et « 18 % seulement de ces CCAS déclarent disposer d’un interlocuteur identifié au niveau des services déconcentrés de l’Etat » pour des demandes relatives à cette question. Les auteurs de l’enquête jugent que la coordination dans ce domaine, « nécessaire » notamment en termes de partage des publics, est encore « insuffisamment développée ».

En conclusion, l’Unccas souligne que la charge de travail représentée par la domiciliation pour les CCAS nécessite de faire évoluer le dispositif. Elle recommande ainsi que les acteurs locaux soient mieux soutenus par l’Etat dans cette mission. Il s’agit par ailleurs d’« améliorer la coordination territoriale » en réaffirmant le rôle du préfet comme garant du dispositif, « notamment par une réelle mobilisation autour de la rédaction des schémas de la domiciliation », et en élargissant l’obligation de domicilier à de nouveaux organismes. L’Unccas souhaite également « encourager un meilleur usage du dispositif par les organismes tiers » et plaide pour lui « redonner du sens », notamment en réaffirmant sa « place essentielle » comme porte d’entrée aux droits sociaux et à l’accompagnement.

Intervenant dans le cadre de la journée de restitution de l’enquête, Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, a indiqué que l’amélioration de « la mise en œuvre effective » du droit à la domiciliation, dispositif qui doit être « simplifié, stabilisé juridiquement et mieux animé localement », passe par la publication des textes d’application de la loi sur l’accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR) de mars 2014 – qui a intégré l’aide médicale de l’Etat dans le dispositif de droit commun et élargi le champ des droits couverts par la domiciliation(2) – et par « l’amélioration de la coordination entre les associations, les services de l’Etat et les collectivités territoriales ». La ministre a annoncé la parution prochaine de deux décrets « qui vont pour l’un préciser la définition du lien avec la commune et pour l’autre achever l’harmonisation des dispositifs en les sécurisant juridiquement ». Ségolène Neuville a également indiqué qu’une circulaire était en préparation, afin d’expliciter et de diffuser largement les enjeux et les modalités opérationnelles de la réforme de la domiciliation. La ministre va par ailleurs remobiliser « prochainement » les préfets pour que les schémas départementaux de domiciliation « soient effectifs » dans tous les départements.

Notes

(1) En ligne sur www.unccas.org.

(2) Voir ASH n° 2861 du 23-05-14, p. 41.

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