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« Rencontrer ses parents biologiques a des effets positifs »

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Quel impact sur la vie peut avoir la rencontre d’un enfant né sous X avec ses parents de naissance ? La direction générale de la cohésion sociale et le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) ont demandé au Laboratoire épidémiologie, biostatistique et santé publique du CNRS de mener une étude(1). Michel Duyme, directeur de recherche émérite, en commente les résultats.
Quel était l’objectif de cette étude ?

Nous avons répondu à un appel d’offres du CNAOP qui désirait savoir si, globalement, la rencontre des enfants adoptés et/ou pupilles de l’Etat avec leurs parents biologiques avait été bénéfique. Depuis que la loi du 22 janvier 2002 relative à l’accès aux origines personnelles permet la levée du secret(2), 5 500 personnes ont entrepris cette démarche. Mais l’étude ne concerne que les « demandeurs » et leurs mères de naissance qui se sont rencontrés – le plus souvent avec un accompagnement du CNAOP – et qui ont donné leur autorisation pour être sondés. Nous avons reçu 200 questionnaires complets d’enfants adoptés, 46 de parents de naissance et 44 de parents adoptifs. Il a été demandé aux répondants d’autoévaluer leur « vitalité », leur relation avec les autres, leur santé psychique, leur satisfaction de vie… selon des critères validés par l’Organisation mondiale de la santé.

Quels sont les principaux résultats ?

L’étude, menée sur quatre ans, permet de confirmer qu’effectivement la qualité de vie de ces personnes a été améliorée. Pour les enfants nés dans le secret, les changements positifs se situent sur l’augmentation de la satisfaction et de la fierté et la diminution de la colère et de la tristesse. Avant la rencontre, leurs indices de satisfaction de vie étaient inférieurs à ceux de la population générale et, après la rencontre, ils étaient égaux voire supérieurs à ceux-ci. Mais l’enquête ayant été menée plusieurs années après la rencontre, cette perception n’est basée que sur des souvenirs. Pour les parents de naissance, toutes les émotions positives augmentent également, surtout l’affection et la joie, tandis que les émotions négatives diminuent, sauf la culpabilité. Quant au taux de satisfaction générale de vie des parents adoptifs, il passe de 74 % avant la rencontre à 80 % après !

Vous attendiez-vous à ces conclusions ?

Non, je m’attendais à l’inverse compte tenu du stress pour les parents de naissance de voir leurs enfants faire irruption dans leur vie ! Il faut tout de même noter que, pour 18 % des personnes interrogées, la rencontre a eu un impact « plutôt négatif » sur leur vie. Contactés par téléphone, certains adoptés nous ont dit avoir encore du ressentiment quant à l’abandon, et des parents biologiques ont évoqué un sentiment de culpabilité persistant. Autre information : 16 % des répondants n’ont eu qu’une seule rencontre avec leur parent de naissance. Cette étude est la première menée en France sur ce thème, mais deux recherches similaires ont été conduites récemment en Oregon (Etats-Unis) et en Grande-Bretagne, qui ont donné des résultats identiques : un mieux-être général(3). Cette étude doit être approfondie de façon longitudinale car une hypothèse souvent faite est que les personnes qui désirent rencontrer leur parent biologique seraient plus en difficulté psychologique que la moyenne et que la rencontre avec ledit parent relève d’un aboutissement, d’où la très grande satisfaction.

Quelle est l’opinion sur le CNAOP ?

Si l’étude ne répond pas à la question de la pertinence de la levée du secret, elle montre l’utilité du CNAOP, puisque 80 % des usagers ont apprécié le service offert par cet intermédiaire entre parents et enfants. Ce n’est pas étonnant étant donné que l’étude reste limitée au public le plus à même d’être satisfait puisqu’il y a eu identification, localisation et rencontre avec le parent de naissance. Il ne faut pas oublier qu’environ la moitié des parents biologiques contactés par le CNAOP ont refusé de rencontrer leur enfant adopté… L’étude montre aussi que ce service est méconnu : seuls 20 % des parents de naissance le connaissent et les enfants ont expliqué avoir cherché les informations sur la demande d’accès aux origines sur Internet. Il conviendrait donc de diffuser davantage d’informations sur le CNAOP aux travailleurs sociaux.

Notes

(1) Qualité et satisfaction de vie des personnes pupilles de l’Etat ou enfants adoptés ayant rencontré leurs parents de naissance à l’âge adulte et qualité de vie des parents adoptifs et des parents de naissance – Disponible sur www.cnaop.gouv.fr.

(2) Voir ASH n° 2250 du 15-02-02, p. 21.

(3) La fédération Enfance et famille adoption organise à Paris le 4 et 5 juin un colloque sur « Le devenir des adoptés » où seront présentés l’ensemble de ces travaux – www.adoptionefa.org.

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