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Soins psychiatriques sous contrainte : une étude examine les premiers effets de la loi de 2011

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Une étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES)(1) présente une première analyse des effets de la loi du 5 juillet 2011 relative aux soins sans consentement(2). S’appuyant sur les données du Recueil d’information médicalisée en psychiatrie (Rim-P), les auteurs notent que les soins sans consentement à la demande d’un tiers (SDT) restent la procédure majoritaire (60 000 patients admis en 2012, soit 73 % du total) mais sont en légère baisse par rapport à 2010 (elle concernait 80 % des patients). Cette diminution « est à mettre en relation avec le développement des soins en cas de péril imminent [SPI] », qui ont concerné 11 % des patients hospitalisés sous contrainte en 2012. Introduite par la réforme de 2011, cette procédure facilite l’admission d’une personne qui nécessite des soins en urgence, mais pour laquelle aucun proche ne formule de demande d’hospitalisation. « Réclamée par le corps médical pour pallier les difficultés liées à la signature des décharges de tiers », cette procédure semble « plus fréquemment utilisée dans les services d’urgence où les équipes soignantes connaissent moins la personne ou d’éventuels tiers à contacter, manquent de ressources pour les rechercher, et doivent agir rapidement pour orienter le patient vers des soins adaptés ».

Le profil des patients en SPI est proche des personnes hospitalisées en SDT : 55 % d’entre eux sont des hommes, âgés en moyenne de 44 ans. 39 % souffrent de schizophrénie ou de troubles psychotiques. Leur prise en charge est en revanche plus courte (26 jours) que pour les patients hospitalisés en SDT (40 jours). Pour la moitié, cette hospitalisation représente une première entrée dans les soins et la majorité poursuit un parcours de soins librement consenti. Rappelant que cette procédure « dérogatoire au droit commun […] ne devrait pouvoir être mise en œuvre qu’à titre exceptionnel, notamment dans le cas de personnes désocialisées pour lesquelles aucun tiers n’est trouvé », les auteurs s’interrogent sur la montée en charge de ce dispositif révélée par les premiers chiffres recueillis pour l’année 2013 (15 000 patients, soit près de deux fois plus qu’en 2012). « Une fréquence trop grande pourrait signifier un détournement de procédure », ce qui pose plusieurs questions : « La possibilité des SPI limite-t-elle la recherche d’un tiers pour les équipes soignantes ? Permettent-ils au tiers demandeur de l’admission de se retirer de la procédure de contrainte, renvoyant cette responsabilité aux professionnels ? Ce mode légal représente-t-il un nouvel accès aux soins de personnes qui ne l’auraient pas eu sans cette procédure facilitée ? »

Autre nouveauté de la loi, la prise en charge sous contrainte en ambulatoire via un programme de soins a, en 2012, concerné 26 600 patients (soit 34 % des patients concernés par des soins sous contrainte). Ces programmes visent à inscrire les modalités de soins (consultations médicales, suivi de situation sociale, renouvellement de traitement à domicile…) à l’extérieur de l’hôpital dans le cadre d’un contrat conclu entre le patient et le médecin. Les données récoltées montrent que 91 % des établissements hospitaliers accueillant des personnes sans consentement ont utilisé cette nouvelle procédure en 2012(3). Ces programmes sont utilisés pour des patients souffrant de troubles schizophréniques et psychotiques, mais peu dans le cas de troubles dépressifs. Les auteurs relèvent que les patients intégrés à un programme de soins ont davantage accès à des modalités de prise en charge alternatives, comme l’hospitalisation à temps partiel, les soins à domicile et les centres d’activité thérapeutique à temps partiel. Ce public a suivi une fois et demie plus d’actes ambulatoires que les patients qui ont consulté librement en amont et en aval de leur hospitalisation contrainte mais n’ont pas fait l’objet d’un programme de soins.

L’étude montre que, en moyenne sur toute l’année, les patients en programme de soins sont hospitalisés plus longtemps (64 jours) que les autres patients non consentants (42 jours), ce qui s’explique par le fait que les premiers connaissent des épisodes d’hospitalisation pluriels au cours de l’année. Au final, avec les programmes de soins qui « représentent des modalités thérapeutiques sur le long terme », la durée de la contrainte augmente, ce qui « devrait mécaniquement faire augmenter le nombre de patients pris en charge sans leur consentement sur les années suivantes ». Une évolution qui pose « des questions éthiques en termes de droits, de respect des libertés individuelles et de réalité pratique de mise en œuvre ».

Notes

(1) « De l’hospitalisation aux soins sans consentement en psychiatrie : premiers résultats de la mise en place de la loi du 5 juillet 2011 » – Questions d’économie de la santé n° 205 – Janvier 2015 – Disponible sur www.irdes.fr.

(2) Voir ASH n° 2716 du 1-07-11, p. 5, ainsi que le numéro juridique des ASH intitulé « Les soins psychiatriques sans consentement » – Mars 2012.

(3) Le Collège national de la qualité des soins en psychiatrie a également réalisé une étude sur les programmes de soins en Ile-de-France – Voir ASH n° 2885 du 28-11-14, p. 25.

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