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Le gouvernement présente son plan pour l’égalité et la citoyenneté

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Il ne s’agit pas d’un énième plan pour les banlieues mais d’une réponse globale au « profond malaise, social et démocratique » auquel la France est confrontée et dont les attentats récents ont « révélé l’intensité » : Manuel Valls a présenté le 6 mars les pistes arrêtées le jour même par le gouvernement au cours d’un comité interministériel intitulé « égalité et citoyenneté ». Un « plan » composé d’une soixantaine de mesures volontaristes, mais sans grands moyens financiers, reprenant pour beaucoup des annonces déjà faites depuis quelques semaines par les différents ministères, voire par le Premier ministre lui-même ou le président de la République(1).

Au milieu d’un long catalogue de mesures allant du renforcement de la formation des jeunes en service civique « en matière de citoyenneté, laïcité et lutte contre le racisme et l’antisémitisme » à l’affirmation de la laïcité dans les services publics, en passant par le renforcement de l’apprentissage du français à l’école ou pour les immigrés primo-arrivants, la lutte contre les contournements de la carte scolaire ou bien encore le lancement d’une Agence de développement économique des territoires, on retiendra plus particulièrement les annonces faites en matière de logement (sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 19), d’emploi des jeunes et de prévention de la délinquance, ainsi que celles en direction des associations.

Logement : des outils pour « faire plus de mixité sociale »

Manuel Valls l’avait déjà dit : en matière de logement, il veut « faire plus de mixité sociale », « casser » les « logiques d’enfermement et de ségrégation ». « Il ne peut plus y avoir des villes qui concentrent tous les logements sociaux et d’autres qui, par égoïsme, les refusent », a-t-il martelé. Concrètement, dans les communes ne respectant pas la loi « SRU » et son quota de 25 % de logements sociaux – « 216 recensées à ce jour » –, les préfets devront faire des propositions « avant le mois de juin 2015 » pour produire des logements sociaux en délivrant au nom de la commune des permis de construire dans certains secteurs identifiés et en préemptant du foncier, des logements ou des immeubles existants qui seront transformés en logements sociaux. Un délégué interministériel – Thierry Repentin, qui fut par le passé président de l’Union sociale pour l’habitat – sera nommé « dans les prochains jours » pour appuyer les préfets. A l’inverse, des instructions seront données aux préfets pour limiter la construction de logements sociaux dans les 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville dès lors que le taux de logement social y dépassera 50 %. Le gouvernement promet par ailleurs que, dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain, l’offre de logements sociaux démolis sera reconstituée en priorité en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Et que le logement intermédiaire et l’accession à la propriété seront favorisés dans ces quartiers.

Le gouvernement entend par ailleurs revoir la politique des loyers dans le parc social pour diversifier les habitants de ces immeubles. Ces loyers ne devraient plus être fixés en fonction du financement d’origine de l’immeuble, mais des revenus des locataires. « Le bailleur social pourra désormais fixer le loyer d’un logement qui se libère à un niveau compatible avec les revenus d’un demandeur plus modeste », indique Matignon. « Cette possibilité permettra de minorer le loyer d’un logement dans une zone favorisée pour l’attribuer à un ménage à faibles ressources. » Parallèlement, « afin de ne pas fragiliser son équilibre économique, le bailleur social sera autorisé, en compensation, à pratiquer un loyer plus élevé dans un autre secteur ».

Dans le collimateur du gouvernement, également : les mécanismes d’attribution des logements sociaux. « Arrêtons d’ajouter de la pauvreté à la pauvreté », a affirmé Manuel Valls, qui demande à « tous ceux qui attribuent des logements » de ne plus reloger dans les quartiers prioritaires des personnes dont les ressources se situent au-dessous du seuil de bas revenus (2), en particulier celles dont le logement relève des préfectures au titre du DALO (droit au logement opposable). « Des solutions alternatives de logement devront être prioritairement trouvées hors de ces quartiers », a indiqué le Premier ministre en assurant que ces nouvelles pratiques d’attribution « commenceront à se mettre en œuvre dès 2015 ».

Emploi : un nouveau contrat aidé pour les jeunes décrocheurs

Manuel Valls a également annoncé de nouveaux dispositifs pour améliorer l’insertion professionnelle des jeunes décrocheurs. Une population qui « accède peu aux contrats aidés du secteur marchand alors qu’il s’agit de dispositifs efficaces pour leur permettre d’occuper un premier emploi ». « Le taux d’aide auquel le recrutement des jeunes donne droit n’est pas suffisamment incitatif par rapport au recrutement de publics ayant déjà une première expérience professionnelle », expliquent les services de Matignon. « Dès le deuxième trimestre 2015 », un nouveau contrat aidé – intitulé « starter »  – devrait donc être mis en œuvre dans le secteur marchand, ciblé sur les jeunes décrocheurs. Le taux de l’aide financière qui sera versée à l’entreprise devrait être porté à 45 %. Objectif affiché par le gouvernement : 13 000 contrats de ce type prescrits dès cette année.

Les « dispositifs de 2e chance » pour les jeunes décrocheurs seront par ailleurs développés, prévoit le plan. Un dispositif « réussite apprentissage » devrait être, par exemple, mis en place cette année« au profit de 10 000 jeunes décrocheurs en difficulté d’insertion ». Ses bénéficiaires « seront accompagnés avant l’entrée en apprentissage et lors des premières semaines du contrat pour prévenir la rupture » de ce dernier.

Le Premier ministre a également indiqué qu’un dispositif d’apprentissage « zéro coût » pour l’employeur sera expérimenté sur certains territoires en faveur de jeunes décrocheurs de moins de 18 ans pendant la première année de leur contrat d’apprentissage.

Autre annonce : une circulaire sera adressée ce mois-ci aux préfets de région pour définir des objectifs chiffrés aux principaux dispositifs de la politique de l’emploi, afin d’en assurer l’accès effectif aux résidents des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Des taux d’accès devraient ainsi être fixés à 13 % pour le contrat initiative-emploi et pour le contrat d’accompagnement dans l’emploi, 30 % pour les emplois d’avenir, 21 % pour la garantie jeunes…(3).

Politique de la ville : un « New Deal » pour les associations

Depuis la mi-janvier, les associations engagées auprès de la jeunesse et dans les champs de la politique de la ville, de l’éducation populaire, du sport et de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme ont été réunies, au niveau national et dans chaque département par les préfets, « afin de remobiliser autour des valeurs de la République et de la citoyenneté ». Ces démarches convergeront, selon le plan, dans une grande réunion nationale au printemps. L’objectif, a indiqué le Premier ministre, est de « mettre en place un “New Deal” du mouvement associatif », avec à la clé la mobilisation de « 100 millions d’euros supplémentaires » pour « conforter » le tissu associatif. Il s’articule autour de six points :

→ favoriser le déploiement d’actions d’éducation populaire dans les territoires prioritaires ;

→ soutenir et généraliser la présence des mouvements et actions d’éducation populaire dans les territoires fragiles ;

→ transformer les lieux accueillants du public en « fabriques » d’initiatives citoyennes impliquant les habitants et développant l’engagement bénévole ;

→ développer des réponses innovantes, notamment à destination des adolescents, sur l’éducation à la citoyenneté et aux médias et réseaux sociaux, les valeurs de la République, la mixité sociale… via le sport, les pratiques culturelles, les démarches d’éducation populaire ;

→ proposer des colonies de vacances « nouvelle génération » aux enfants et adolescents pour faire l’expérience de la mixité sociale ;

→ faire bénéficier les associations du « choc de simplification » pour apporter de la visibilité sur leurs financements dans la durée et alléger les procédures. Il s’agit de « consacrer plus de temps à l’action et moins aux démarches administratives ».

Délinquance : un « Pack 2e chance » pour les jeunes en voie d’exclusion

Autre domaine d’action du plan présenté le 6 mars : la sécurité. Le gouvernement a notamment indiqué vouloir généraliser dès 2015, dans les 80 zones de sécurité prioritaire (ZSP), un dispositif de suivi renforcé de jeunes en voie d’exclusion, appelé « Pack 2e chance ». Un dispositif qui s’adresse plus précisément aux 18-25 ans sans emploi, diplôme ou formation se trouvant en risque de basculement dans la délinquance, et dont l’objectif est de « remettre du cadre dans les parcours » et « apporter des solutions globales et adaptées à la situation de chacun ». Concrètement, des cellules restreintes chargées du suivi actif de jeunes (12 au maximum) devraient être créées dans les ZSP. Elles assureront pour chacun d’entre eux une fonction de « coaching », explique le plan. Composées d’agents des administrations de l’Etat ou des collectivités territoriales « dans un format qui devra s’adapter à chaque territoire » et coordonnées par le préfet, ces cellules devraient être plus précisément chargées de proposer au jeune un parcours d’insertion vers l’emploi tout en accélérant l’entrée dans les autres dispositifs d’aide. Expérimenté depuis un an dans les cinq ZSP de la métropole lyonnaise, ce dispositif « s’appuie sur un principe d’engagement réciproque : la cellule se mobilise pleinement pour amener le jeune à l’emploi tandis que le jeune met tout en œuvre pour favoriser son insertion (ponctualité, se rendre aux entretiens avec son référent, etc.) ».

On signalera enfin que, entre autres mesures, le plan prévoit encore de développer les partenariats avec les associations ainsi que les entreprises privées et publiques pour faciliter la mise en œuvre des mesures de travaux d’intérêt général (TIG) et de réparation pénale. Devraient être prioritairement ciblées :

→ les personnes mineures condamnées à une peine de TIG ou devant exécuter une mesure de réparation pénale ordonnée par le procureur de la République ou par le juge des enfants ;

→ les personnes majeures condamnées à une peine de TIG ou devant exécuter une mesure de travail non rémunéré ;

→ les personnes majeures détenues, dans le cadre d’un aménagement de peine.

« Une attention particulière sera portée aux tribunaux de grande instance dont les ressorts comprennent une zone de sécurité prioritaire et plus généralement ceux qui concentrent des quartiers prioritaires de la politique de la ville », indiquent les services de Matignon. « Dès 2015, les contrats de ville déclineront ces objectifs. » Une instruction conjointe des ministres de la Justice, de l’Intérieur, de la Ville et de la Jeunesse et des Sports sera adressée à ce sujet aux procureurs de la République et aux préfets.

Notes

(1) Voir ASH n° 2895 du 30-01-15, p. 9 et n° 2897 du 13-02-15, p. 12.

(2) Il s’agit de l’une des mesures relatives au logement que préconise France stratégie dans une récente note d’analyse intitulée Favoriser l’insertion économique des jeunes issus de l’immigration – Disponible sur www.strategie.gouv.fr.

(3) S’agissant des contrats aidés, ces objectifs chiffrés figurent déjà dans la circulaire de programmation pour le premier semestre 2015-Voir ce numéro, p. 40.

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