« Les propositions du CSTS [Conseil supérieur du travail social] vont dans le bon sens, estime Geneviève Colinet, chargée de mission à la FNARS (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale). Il faut en effet sortir d’une intervention qui pointe les manques pour construire l’accompagnement avec la personne concernée en s’appuyant sur ses potentialités et en s’adaptant à ses aspirations au-delà des dispositifs cloisonnés. Cela requiert un professionnel ouvert, capable d’expérimenter de nouvelles formes d’intervention. » Raoul Dubois, résident d’un CHRS diffus à Lille et membre du conseil consultatif des personnes accueillies/accompagnées, partage cet avis : « Le travailleur social ne doit plus être le seul maître à bord ; la participation doit déboucher sur une coconstruction avec l’idée qu’il faut non plus faire “pour” mais “avec”. » « Cheminer avec les personnes et prendre en compte leur avis au lieu de décider à leur place va dans le sens de l’histoire, avance aussi Fabienne Quiriau, directrice générale de la CNAPE (Convention nationale des associations de protection de l’enfance). Il n’est pas besoin d’une nouvelle loi pour avancer encore, celle de 2002-2 notamment est riche en outils. En revanche, la balle est désormais dans notre camp : si les professionnels sont concernés au premier chef, l’encadrement et la gouvernance des associations doivent donner l’impulsion en favorisant les espaces et les temps d’expression avec les personnes accompagnées. »
La démarche suppose des financements. Aussi la préconisation du CSTS qui vise à « identifier des lignes budgétaires pour faciliter la participation » est-elle saluée. « Pour permettre aux personnes aidées de participer, encore faut-il rembourser leurs frais de déplacement, ce qui est encore très rarement le cas », relève Raoul Dubois. Geneviève Colinet revendique plus globalement « une ligne budgétaire interministérielle qui ne soit pas assujettie à un budget spécifique ».
Quant à la proposition de proscrire le terme « usager » quand il n’est pas référé à un dispositif, elle va dans le sens voulu par les personnes aidées, se réjouit Raoul Dubois : « Nous avons certes besoin d’un accompagnement social mais nous ne nous vivons pas comme des “usagers” du travail social. »
La préconisation visant à « élargir la représentation des personnes directement concernées par les politiques sociales dans les instances officielles, nationales et locales, notamment au sein du CSTS », est également accueillie favorablement : « La FNARS avait fait des propositions en ce sens lors des journées du travail social qu’elle avait organisées à Valence en 2013 »(1), rappelle Geneviève Colinet. « Aujourd’hui, les personnes aidées sont représentées dans quelques instances nationales comme le CNLE [Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, à travers le 8e collège], mais il faudrait généraliser leur représentation à tous les niveaux en étant attentif à ne pas les cantonner à un rôle d’alibi », prévient Raoul Dubois. Pour Isabelle Bouyer, représentante d’ATD quart monde, ce type de participation ne peut toutefois être envisagé « que dans les instances convaincues de la plus-value de l’apport de connaissances des plus pauvres à partir d’un cahier des charges qui fixe précisément les conditions de cette participation : préparation collective en amont, animation spécifique, travail sur des sujets précis en lien avec la vie des personnes…[2] ».
(1) Voir ASH n° 2853 du 28-03-14, p. 12.
(2) Selon la démarche du croisement des savoirs et des pratiques mises en place par ATD quart monde – Disp. sur