Dans le secteur social et médicosocial, la fonction de « chef de service » évolue, comprenant davantage de « tâches à dimension gestionnaire au détriment du travail de “terrain” », les cadres intermédiaires étant de plus en plus « amenés à participer au management de projet » et à être en mesure de « mobiliser leurs équipes sur des évolutions professionnelles liées aux transformations fréquentes des politiques publiques et des modes de financement des secteurs social et médico-social ». Partant de ce constat, le Céreq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) analyse, dans une étude qualitative menée auprès de directeurs et de cadres de quatre grandes associations présentes sur plusieurs champs du secteur, les pratiques d’accompagnement et de professionnalisation de cette catégorie de salariés(1).
Les chefs de service interrogés par le Céreq détiennent, pour la plupart, un diplôme ou une expérience d’éducateur spécialisé et ont parfois exercé au sein de différentes structures. C’est le plus souvent en cours d’emploi qu’ils ont obtenu un diplôme de niveau II – certificat d’aptitude aux fonctions d’encadrement et de responsable d’unité d’intervention sociale (Caferuis), master 1 d’économie et gestion des établissements sanitaires et sociaux (EGESS) – ou de niveau I – diplôme d’études d’ingénierie sociale (DEIS) –, qui leur a permis de se porter candidat à une fonction de chef de service. « En règle générale, il est de plus en plus rare aujourd’hui de voir les établissements recruter des cadres ou des cadres intermédiaires qui n’ont pas le diplôme correspondant », relève le Céreq. Selon les résultats de son étude, « le Caferuis reste pour l’instant la référence première pour exercer la fonction de cadre intermédiaire, mais ce n’est pas non plus sans compter sur l’arrivée de masters orientés vers le management dans le secteur social ». Plus globalement, les critiques émises sur l’un ou l’autre type de formation « se rapportent plus particulièrement à la structure du système de formation », c’est-à-dire l’articulation entre apports « intellectuels », méthodologiques et en matière d’apprentissage du métier, souligne le Céreq. Qu’ils privilégient les ressources internes ou les candidatures extérieures, les établissements du secteur recrutent en effet des profils aux « exigences de plus en plus fortes », présentant à la fois une bonne pratique du terrain, la capacité de manager, « c’està– dire savoir organiser tout en prenant du recul », et de maîtriser la dimension économique de l’activité.
Dans son étude, le Céreq passe en revue plusieurs initiatives visant la professionnalisation des cadres intermédiaires : repérage des « potentiels » et possibilité d’accès à une formation diplômante pour anticiper les besoins en matière d’évolution de carrière et de mobilité, formations internes (méthodologie de projet, recrutement…), ou encore groupes de travail thématiques. Quant à la transmission des savoirs, qui fait plutôt partie de la culture d’entreprise, elle reste dans le secteur fondée sur « l’imitation et l’identification », sans s’opérer de façon « formalisée, délibérée et explicite », poursuit le Céreq. Citant néanmoins des expériences de « plans de transmission » à l’aide d’un tutorat ou d’autres dispositifs mis en place dans le cadre d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, il souligne que cette « réflexion reste à poursuivre et à développer ». Une volonté qui a d’ailleurs conduit certaines structures à « s’intéresser progressivement aux pratiques de management des ressources humaines en entreprise ».
Plus globalement, conclut le Céreq, les évolutions de la fonction de chef de service invitent à s’interroger sur le positionnement que les cadres intermédiaires sont amenés à adopter. « L’enjeu réside ni plus ni moins dans la capacité des structures à fabriquer, sinon à inventer un nouveau modèle de management, qui est en mesure d’emprunter intelligemment à d’autres sphères professionnelles (relatives en particulier au secteur marchand, mais sans doute pas seulement), tout en sachant garder son style propre, adapté à la nature spécifique des activités et des engagements individuels au sein des secteurs social et médico-social dans leur ensemble ».
(1) La fabrique des cadres au sein des organisations du travail social – Modalités d’intégration et de professionnalisation – Samira Mahlaoui – Disponible sur