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L’alternance intégrative décryptée par le Céreq

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Au moment où les modalités de mise en œuvre de l’alternance intégrative sont interrogées dans le cadre de la future refonte de l’architecture des diplômes, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq) vient de publier, dans un Bulletin de recherche emploi-formation(1), les résultats d’une enquête conduite dans trois régions (Alsace, Aquitaine et Rhône-Alpes) entre novembre 2011 et novembre 2012 et portant sur cinq formations(2). Cette parution est accompagnée de la publication d’un Guide de l’alternance intégrative dans les formations préparant aux diplômes de travail social, réalisé avec la direction générale de la cohésion sociale(3).

Peu de « conventions de site qualifiant »

La notion d’alternance intégrative, affirmée depuis la réforme des diplômes du travail social engagée en 2004, dans le prolongement des principes qui existaient de longue date dans le secteur, repose sur « la coconstruction de dispositifs pédagogiques permettant aux apprenants d’opérer [un] retour réflexif sur leur pratique, aussi bien dans le cadre de la formation que dans celui du stage », rappelle le Céreq dans sa synthèse. Cette pratique, distincte de « l’alternance dite juxtapositive et déductive », suppose l’établissement de relations de coopération entre les équipes pédagogiques et les équipes tutorales, ainsi que la reconnaissance des contributions respectives de ces dernières au processus d’apprentissage. Une collaboration qui a donné naissance à la notion de site qualifiant.

Mais, selon le Céreq, « plus que l’existence d’un dispositif institutionnel », ce sont la fréquence et surtout la nature des relations entre l’école et l’établissement d’accueil (visites de stages, rencontres, interventions ponctuelles des professionnels sur des thématiques précises à la demande des écoles, intégration de certains cadres comme enseignants vacataires…) qui permettent de définir un terrain de stage comme site qualifiant. Ses observations de terrain montrent finalement « un assez faible recours aux conventions de site qualifiant », modalité de formalisation qui « n’est pas toujours jugée comme déterminante », même si elle représente un facteur de reconnaissance pour les terrains de stages et, pour les établissements de formation, un moyen d’identifier leurs interlocuteurs et de fixer leurs engagements(4). Cette contractualisation est néanmoins plus fréquente lorsque les tuteurs ont bénéficié d’actions de formation, ajoute le Céreq, précisant que l’évolution des pratiques peut également passer par « l’élaboration d’une charte de l’alternance ou l’organisation de conférences sur les enjeux de l’alternance intégrative ».

Dans sa synthèse, il note également que la distinction entre les fonctions de tuteur et de « référent professionnel » (qui représente le lieu d’accueil auprès des établissements de formation, coordonne l’activité des tuteurs et veille à la cohérence et à la qualité des projets de stage) est parfois ténue, surtout dans les petites structures. La fonction de référent recouvre donc des réalités diverses, et la terminologie utilisée, variable selon les régions et les écoles (« référent de site », « tuteur référent »…), n’est pas non plus « stabilisée ».

Des conséquences sur l’évaluation

Outre l’accueil du stagiaire, son accompagnement peut faire l’objet d’un portage institutionnel : « Dans certains établissements, le travail collectif sur l’accompagnement prend la forme de groupes pédagogiques de soutien qui réunissent l’ensemble des tuteurs pour discuter entre pairs des difficultés ou échecs rencontrés dans la relation tutorale. Dans d’autres, ce sont des rencontres entre un collectif de stagiaires et un collectif de tuteurs qui permettent de débattre de différents thèmes. ». Autre conséquence logique de l’alternance intégrative, les écoles accordent une importance croissante au contenu des bilans de stage dans l’évaluation des étudiants. « En lien avec la refonte des référentiels des diplômes formulés d’abord sous forme de compétences professionnelles à acquérir, les institutions de formation préconisent l’adoption d’une méthode d’évaluation plus analytique, s’appuyant sur des grilles de critères et indicateurs d’évaluation, compétence par compétence. » Si cet exercice délicat est souvent réalisé « de manière plus ou moins collective », le rôle respectif des tuteurs, référents de site ou cadres de direction « est insuffisamment défini par les écoles pour que cette responsabilité s’exerce sans poser de difficulté pour les sites qualifiants », juge le Céreq.

La synthèse insiste bien sûr sur les contraintes qui entraînent un déficit d’offres de stages, la gratification n’en étant « pas la seule raison », même si elle aggrave la situation dans un contexte de restrictions budgétaires. D’autres causes sont liées aux exigences accrues du travail d’accompagnement des alternants et aux coûts qu’elles induisent. Ainsi, du côté des organismes de formation, « la volonté de mettre en place des formes plus avancées de partenariat en signant des conventions de sites qualifiants est fréquemment tempérée par le risque de voir l’offre de stages se réduire », souligne le Céreq. Dans son enquête, conduite avant la loi du 22 juillet 2013 qui a généralisé l’obligation de gratifier les stagiaires à l’ensemble des employeurs et celle du 10 juillet 2014 qui a augmenté le montant de la gratification, il évoque plus précisément les effets de la réforme des diplômes, « qui a conduit, pour chacun d’eux, à définir un référentiel de certification contraignant dont les effets portent non seulement sur les programmes d’enseignement, mais aussi sur l’évaluation des compétences observées lors des stages ».

Au final, face au risque de pénurie, la question se pose souvent, pour les écoles, « de la place à accorder aux exigences de qualité, au regard de la nécessité d’avoir la quantité suffisante d’offres de stages pour respecter la réglementation des diplômes ». Dans son enquête, le Céreq montre qu’« à l’issue du stage, la majorité des étudiants considère que leur perception du métier et de son évolution a changé. Presque tous (90 %) s’estiment bien préparés à accompagner cette évolution. » Plus de la moitié des étudiants perçoivent par ailleurs « une complémentarité dans la construction des compétences » entre l’établissement d’accueil et l’institut de formation, moins d’un tiers évoquent « une volonté commune d’allier théorie et pratique », 16 % « une fracture entre savoirs livresques et savoirs d’expériences ». Au moment de l’enquête, ils étaient déjà 40 % à estimer que leur recherche de stage avait été difficile.

Notes

(1) « L’alternance intégrative, de la théorie à la pratique » – Bref n° 328 – Décembre 2014 – Disponible sur www.cereq.fr.

(2) Celles qui conduisent aux diplômes d’Etat d’auxiliaire de vie sociale, de moniteur-éducateur, d’éducateur spécialisé, d’éducateur de jeunes enfants et d’assistant de service social. L’enquête a été financée par la direction générale de la cohésion sociale et placée sous la responsabilité d’un comité de pilotage représentant les collèges de la commission professionnelle consultative du travail social et de l’intervention sociale.

(3) Le rapport final et le guide sont également disponibles sur www.cereq.fr.

(4) Voir notre reportage sur la mise en œuvre d’une convention « site qualifiant » dans les Pyrénées-Orientales, ASH n° 2888 du 19-12-14, p. 26.

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