Sept mois après la conférence sociale, lors de laquelle le chef de l’Etat avait érigé le chômage de longue durée en « cause nationale », le plan présenté le 9 février par le ministre du Travail (voir ce numéro, page 7) a douché les espoirs du secteur associatif. Le MNCP (Mouvement national des chômeurs et précaires) déplore ainsi « un plan à courte vue », qui ne s’attelle pas à la création d’emplois et à la lutte contre les inégalités, estimant que « lutter contre le chômage ne peut se limiter à créer des emplois précaires pour les chômeurs et des réductions de cotisations pour les entreprises ».
Lors de la feuille de route définie en octobre dernier, le gouvernement avait déjà balayé l’idée de l’accord national interprofessionnel réclamé par le collectif Alerte, qui remonte au créneau pour demander la mobilisation des partenaires sociaux et des branches, « meilleur moyen de répondre aux enjeux » de l’emploi des personnes en difficulté, défend François Soulage, président du collectif. Sur le fond, les associations jugent insuffisantes les annonces faites sur le compte personnel de formation, qui devra assurer, selon le ministre, « un droit réel à une formation gratuite pour les demandeurs d’emploi » en mobilisant le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels. Pour le collectif, qui insiste sur la nécessité de financer le dispositif par d’autres acteurs de la formation professionnelle, dont les régions, « l’abondement du compte personnel de formation devrait être proportionnel au degré d’éloignement de l’emploi ». Il demande par ailleurs que « soient rapidement précisés les critères qui vont permettre d’accéder » aux deux nouvelles formes de contrats de professionnalisation annoncées, dont le contrat « nouvelle chance », destiné aux plus éloignés de l’emploi, qui pourra permettre d’acquérir dans un premier temps un « socle de compétences » puis une qualification professionnelle, et pourra durer plus longtemps que le dispositif actuel. Là encore, « sa mise en œuvre risque d’être problématique, faute d’un engagement clair des entreprises et des branches », craint le collectif.
Alors que le gouvernement prévoit 5 000 mises en situation professionnelle dans de grandes entreprises via la Fondation agir contre l’exclusion, « nous pensons que ces immersions seraient plus efficaces dans de petites entreprises locales qui connaissent bien les réseaux d’insertion », ajoute François Soulage. Au cours des négociations sur le plan d’action, les associations avaient par ailleurs demandé, en vain, que l’accompagnement dont bénéficient les salariés en contrat d’insertion ne soit pas interrompu pendant ces mises en situation professionnelle.
La préoccupation est la même pour la prestation de suivi du retour dans l’emploi annoncée par le ministère. « C’est une mesure intéressante car elle permet de proposer à un employeur de l’aider à intégrer une personne en insertion, ce qui va le sécuriser et l’inciter à prendre le pari du recrutement », se félicite le collectif Alerte. Mais, pour éviter des ruptures dans l’accompagnement, « il faut permettre aux structures de l’insertion par l’activité économique ou du handicap qui accompagnent un demandeur d’emploi de longue durée de poursuivre elles-mêmes l’accompagnement dans l’entreprise ordinaire », estime-t-il. Or « le ministère nous dit que le financement de cette prestation doit passer par un appel d’offres. Il y a là un blocage qui n’a pas raison d’être », poursuit François Soulage. Afin d’éviter « les dérives des opérateurs privés de placement », le collectif souhaite que les associations d’aide aux chômeurs puissent facilement répondre à ces appels d’offres.
De son côté, la Fédération française des GEIQ (groupements des employeurs pour l’insertion et la qualification) se félicite du plan de développement annoncé pour son réseau, qui devrait notamment se traduire par une revalorisation des aides à l’accompagnement, dans le cadre du contrat de professionnalisation, et par « une meilleure mobilisation du dispositif dans les actions du service public de l’emploi ». Pour autant, « je suis prudent sur les effets d’annonces sur une nouvelle prestation visant la sécurisation dans l’emploi », nuance Didier Piard, secrétaire général de la fédération, qui insiste également sur la nécessité de renforcer d’abord les dispositifs existants.
Au-delà, le collectif Alerte salue « la prise en compte de la nécessité de lever les freins sociaux à l’emploi et sera attentif à son effectivité dans le cadre de la deuxième phase du plan de lutte contre la pauvreté ». Ses représentants devraient être reçus le 19 février à Matignon pour présenter leurs propositions sur cette nouvelle étape du plan pluriannuel, qui pourrait être dévoilée le 3 mars.