Près de cinq mois après leur démarrage, les négociations sur la formation professionnelle dans la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (BASS) achoppaient encore, lors de la dernière commission paritaire de branche, le 13 janvier, sur la part des fonds mutualisés. En septembre dernier, l’Unifed (Union des fédérations et syndicats nationaux d’employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social) avait ouvert les négociations visant à transposer la loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle et préalablement dénoncé les accords en vigueur. Les syndicats avaient alors fait valoir une position unanime : le maintien du taux actuel de la cotisation due par les employeurs de la branche, soit 2,30 % de la masse salariale, alors que la loi a instauré un taux de contribution légale de 1 % pour les entreprises de plus de dix salariés, en remplacement des taux obligatoires antérieurs (1,6 % à partir de 20 salariés).
A l’issue de la dernière séance de négociation, les cinq fédérations syndicales présentes – la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC, la CGT et FO – ont dénoncé « un recul important de la mutualisation au niveau de l’OPCA Unifaf » dans les propositions des employeurs. « Alors que les négociations ont commencé avec une proposition patronale d’une cotisation formation de 1,7 % de la masse salariale brute […], l’Unifed annonce aujourd’hui une cotisation mutualisée réduite à 1,3 % au mieux ! », déplorent-ils. Les organisations, qui ont quitté la séance, y voient une manière de « sacrifier la formation professionnelle sur l’autel de l’austérité » et dénoncent le « désengagement des employeurs ». Le 13 janvier, ces derniers « sont revenus avec une proposition de cotisation à hauteur de 1,9 %, c’est-à-dire le taux légal auquel s’ajoute 0,9 %, dont 0,3 % en taux conventionnel mutualisé et 0,6 % en versement volontaire non obligatoire », détaille Joëlle Loussouarn Peron, membre dirigeante de la CGT Santé et action sociale. D’où le calcul des syndicats : seuls « 1,3 % remonterait à l’OPCA, voire 1,10 % si le 0,2 % fléché par la loi vers le compte personnel formation n’est pas versé à l’OPCA mais gardé au sein de l’entreprise ». Et leur crainte que « ce qui n’est pas mis au pot commun serve de variable d’ajustement pour la trésorerie des établissements ».
Analyse que réfute Thierry Mathieu, président de l’Unifed, également viceprésident de la Fegapei (Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées et fragiles). « Tout d’abord, nous avons avancé sur certains points essentiels, notamment sur l’équilibre entre professionnalisation et qualification », explique-t-il soulignant que les employeurs « font des contenus de formation une question prioritaire ». Quant aux chiffrages, « il nous a semblé nécessaire de fixer un taux de 0,3 % pour la qualification et la professionnalisation, auquel on ajoute une part volontaire en faisant en sorte qu’elle aille vers l’OPCA, explique-t-il. L’investissement se situe bien à hauteur de 1,9 %, sachant que le taux de 0,6 % serait opposable s’il était inscrit dans un accord de branche. Les syndicats ont-ils si peu confiance dans les employeurs, les négociateurs et en la capacité incitative de l’OPCA ? » Le président de l’Unifed, selon qui « lorsque l’on bouge 0,1 % dans la branche, cela représente 17 millions d’euros », souligne que l’objectif des employeurs est d’« être en conformité avec l’esprit de la loi ». Il « faut davantage de contractualisation car l’investissement formation est lié à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences », précise-t-il. A ses yeux, « la démarche des employeurs a été pragmatique, loyale et au plus près de la réalité ».
Malgré ces divergences de taille, l’Unifed souhaite qu’un texte soit soumis à la signature à l’issue de la prochaine commission paritaire, le 9 février. Selon la procédure de dénonciation, les accords en vigueur sur la formation professionnelle bénéficient d’un « délai de survie » jusqu’à la fin 2015. Sans nouvel accord, « le risque est ensuite de se retrouver avec le taux légal de 1 %, et ce n’est pas nous qui en porterons la responsabilité », avertit Joëlle Loussouarn Peron. « Si nous n’arrivons pas à un accord, il ne pourra pas y avoir non plus de nouvel accord sur l’OPCA », prévient de son côté Thierry Mathieu. En tout état de cause, un échec serait lourd d’enjeux pour l’avenir de la branche. SUD Santé sociaux, qui avait quitté les négociations dès septembre face à la première proposition des employeurs, « appelle l’ensemble des organisations syndicales à mettre en œuvre les conditions d’une mobilisation massive des salariés de la BASS pour la défense de la formation continue dans les entreprises du secteur, la défense des qualifications et des métiers ».