Il y a 40 ans, la loi « Veil » du 17 janvier 1975 dépénalisait l’avortement en France. Depuis cette date, le recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) a d’abord baissé, en lien également avec une meilleure diffusion de la contraception, puis s’est stabilisé, constate l’Institut national des études démographiques (INED) dans une récente étude(1). « Comme les naissances, les IVG sont plus fréquentes aux âges moyens », relève notamment l’INED, dont les données indiquent que, en 2011, les femmes avaient recours à l’IVG à 27,5 ans en moyenne. Entre 1981 – première année pour laquelle on dispose de statistiques complètes – et 1996, « le recours à l’IVG diminue à tous les âges, [tandis qu’entre] 1996 et 2011, il reste stable après 25 ans mais augmente aux âges jeunes ».
Le nombre moyen d’IVG par femme est passé de 0,66 en 1975 à 0,53 au début des années 2010, puis à 0,43 au milieu des années 1990, avant de remonter pour atteindre 0,53 en 2011. Certaines femmes subissant plusieurs fois un avortement, l’INED estime ainsi que 33 % des femmes ont recours à l’IVG au moins une fois dans leur vie. L’institut « observe toutefois des mouvements de fond durant toute cette période, liés à la modification des parcours de vie des femmes ». A titre d’exemple, si les grossesses aux âges jeunes sont de moins en moins fréquentes, elles sont de plus en plus souvent interrompues. De fait, pour l’INED, « l’augmentation des taux d’IVG des adolescentes, observée à la fin des années 1990 et au début des années 2000, peut se lire non pas comme une plus grande fragilisation des adolescentes, mais comme la plus grande volonté de choisir d’interrompre des grossesses non prévues ou mal programmées, dans un contexte de diminution de l’âge aux premiers rapports sexuels et de retard de l’âge à la première maternité ».
Il ressort également que si « une part moins importante des femmes ont recours à l’IVG, [celui-ci] est plus souvent répété ». Depuis 1975, la proportion d’IVG répétées augmente ainsi « de façon continue » même si la proportion de femmes y ayant recours plus d’une fois « reste faible » : deux fois pour 9,5 % d’entre elles et trois fois ou plus pour 4,1 %. « Depuis les années 1970, la diffusion des méthodes efficaces de contraception a permis de diminuer la fréquence des grossesses non souhaitées, mais lorsqu’elles surviennent, le recours à l’IVG est plus fréquent, et finalement le nombre total d’IVG n’a pas baissé », constate l’étude.
L’allongement de 10 à 12 semaines de la durée maximale de grossesse pour une IVG, prévu par la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, n’a, pour sa part, pas entraîné « un allongement durable de la durée moyenne de grossesse » au moment de l’avortement, ni une augmentation du recours à l’IVG. Et si la part des premières IVG poursuit sa baisse, la probabilité d’y recourir à nouveau après un premier avortement, augmente. « Cela traduit sans doute la diversification croissante des [parcours de vie] des femmes et, pour une part d’entre elles, au quotidien, l’usage de méthodes contraceptives insuffisamment adaptées à leurs situations de vie, malgré la large couverture contraceptive », analyse l’INED, qui conclut : « le choix d’interrompre (ou non) une grossesse est devenu un droit plus qu’un dernier recours ».
(1) Population et sociétés n° 518 – Disp. sur