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Individualisation des peines et efficacité des sanctions pénales : un décret précise les dispositions de la loi

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Un décret précise les modalités d’application de la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales(1), entrée en vigueur le 1er octobre dernier. Il revient en particulier sur les dispositions relatives à la contrainte pénale, à la libération sous contrainte, à la libération conditionnelle et à l’obligation de soins des condamnés atteints de trouble mental. Sauf exceptions, ces dispositions s’appliquent depuis le 27 décembre.

Exécution de la contrainte pénale

Pour mémoire, la contrainte pénale – dont les modalités d’application ont été explicitées par la chancellerie(2) – peut être prononcée pour une durée comprise entre six mois et cinq ans lorsque la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de son auteur justifient un accompagnement socio-éducatif individualisé et soutenu. Dans ce cadre, l’intéressé est astreint à des mesures d’assistance et de contrôle. Cette nouvelle peine alternative à l’emprisonnement s’applique depuis le 1er octobre aux délits punis d’une peine d’emprisonnement n’excédant pas cinq ans et concernera l’ensemble des délits punis d’une peine de prison à compter du 1er janvier 2017.

A l’issue de l’audience au cours de laquelle la contrainte pénale a été prononcée, le condamné doit comparaître devant le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) afin qu’il procède à une évaluation approfondie de sa personnalité et de sa situation matérielle, familiale et sociale. Le décret indique que, lorsque le condamné est présent à l’audience, une convocation à comparaître devant le SPIP doit lui être remise dans les huit jours. S’il est absent de l’audience, cette convocation doit lui être transmise lors de la notification de sa condamnation ou dans les meilleurs délais après cette notification. Par ailleurs, lorsque le condamné est détenu pour une autre cause lors du prononcé de la contrainte pénale, il appartient au SPIP situé dans le ressort de l’établissement pénitentiaire où il est incarcéré de lui remettre ou lui faire remettre un avis de convocation à comparaître devant le SPIP territorialement compétent pour suivre la mesure au plus tard dans les huit jours à compter de la libération de l’intéressé(3). Dans tous les cas, la convocation doit l’informer que, s’il ne se présente pas devant le SPIP, le juge de l’application des peines (JAP) en sera informé et prendra les mesures qui s’imposent (modifier ou compléter les obligations ou interdictions, mettre à exécution tout ou partie de l’emprisonnement encouru…).

Durant l’exécution de la contrainte pénale, le SPIP doit assurer un suivi soutenu du condamné, dont l’intensité est individualisée et proportionnée aux besoins de la personne, à la sanction et à la mesure prononcée, et évolue au fur et à mesure de l’exécution de la contrainte pénale, précise le décret. Ajoutant que le SPIP doit réévaluer la situation de l’intéressé au plus tard un an après le prononcé de la condamnation ou, si le prévenu n’était pas présent à l’audience, un an après sa notification. Le SPIP adressera alors un rapport de synthèse au JAP sur les conditions d’exécution de la mesure.

Enfin, lorsque le condamné à une mesure de contrainte pénale a l’obligation de s’abstenir de paraître dans un lieu ou une zone désignés afin d’éviter tout contact avec la victime ou la partie civile, ou l’obligation de s’abstenir d’entrer en relation avec elle, le JAP peut décider d’informer cette dernière directement ou via son avocat de la date de la fin de la mesure. De son côté, qu’elle se soit ou non constituée partie civile lors de la procédure, la victime peut demander à être informée de la fin de la contrainte pénale. Pour ce faire, elle doit, par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR), faire connaître ses changements d’adresse – qui peuvent, à sa demande, demeurer confidentiels – auprès du procureur de la République ou du procureur général de la juridiction qui a prononcé la condamnation.

Conditions de la libération anticipée

La loi du 15 août 2014 a instauré une procédure d’examen obligatoire de la situation des personnes condamnées à une peine maximale de cinq ans lorsqu’elles ont exécuté les deux tiers de leur peine. L’objectif étant d’apprécier s’il y a lieu qu’elles bénéficient ou non d’une mesure de sortie encadrée. Cette procédure s’applique depuis le 1er janvier 2015 mais ne concerne pas les personnes sous écrou bénéficiant d’un aménagement de peine, indique le décret. En pratique, cet examen est effectué par la commission de l’application des peines(4). Sur la base de son avis, le JAP doit décider ou non de prononcer une mesure de libération sous contrainte. Dans l’affirmative, sa décision met fin à l’incarcération du condamné qui effectuera son reliquat de peine sous le régime de la semi-liberté, de la surveillance électronique, du placement à l’extérieur ou de la libération conditionnelle. Si, à compter du jour où la durée de la peine accomplie est égale au double de la durée de la peine restant à subir, le JAP n’a pas rendu de décision à l’expiration d’un délai fixé à deux mois lorsque le reliquat de peine à subir est supérieur à un an et à un mois lorsque ce reliquat est inférieur à un an, le premier président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel peut, d’office ou sur saisine du procureur de la République ou de la personne condamnée, ordonner la libération sous contrainte. Une décision qui doit intervenir dans le mois de sa saisine.

Pour les personnes condamnées à exécuter une ou plusieurs peines d’une durée totale de plus de cinq ans, la loi a prévu que, lorsque la durée de la peine accomplie est au moins égale au double de la durée de la peine restant à subir, leur situation doit être examinée par le juge ou le tribunal de l’application des peines à l’occasion d’un débat contradictoire afin qu’il soit statué sur l’octroi d’une libération conditionnelle(5). Le décret précise que, à partir du 1er janvier 2015, deux mois au moins avant la date prévue de cet examen, le SPIP doit convoquer le condamné pour savoir si celui-ci s’oppose à toute mesure de libération conditionnelle. Information qui, sans délai, doit être transmise au JAP, de même que les rapports le concernant. Si le débat contradictoire n’intervient pas dans un délai de quatre mois à compter du jour où la durée de la peine accomplie est égale au double de la peine restant à subir, le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel peut, d’office ou sur saisine du condamné par LRAR ou du procureur de la République, tenir ce débat.

A noter : ces dispositions ne s’appliquent pas aux personnes sous écrou bénéficiant d’un aménagement de peine. Et, si la condamnation de la personne fait l’objet d’une période de sûreté, elles ne s’appliquent qu’à l’issue de cette période.

Obligation de soins en cas de trouble mental

Lorsque la juridiction de jugement a retenu l’atténuation de la responsabilité pénale de la personne condamnée pour cause de trouble mental ou d’altération du discernement mais n’a pas prononcé à son encontre de suivi socio-judiciaire, le JAP peut ordonner, à la libération de cette personne, si son état le justifie et après avis médical, une obligation de soins pendant une durée qu’il fixe et qui ne peut excéder cinq ans en matière correctionnelle ou dix ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d’emprisonnement. Plus précisément, souligne le décret, cette obligation de soins ne peut être ordonnée que si elle apparaît nécessaire pour prévenir le renouvellement des actes commis par la personne condamnée, pour la protéger, ou pour protéger la victime ou sa famille.

Selon le texte, l’avis médical est, lui, constitué d’au moins une expertise psychiatrique, demandée par le JAP. Ce dernier peut toutefois, avec l’accord du procureur de la République, décider par ordonnance motivée qu’il n’y a pas lieu d’effectuer une nouvelle expertise psychiatrique préalablement à une décision ordonnant une obligation de soins dès lors que figure au dossier du condamné une expertise datant de moins de deux ans, y compris si celle-ci a été réalisée avant la condamnation.

Il appartient au JAP du ressort dans lequel la personne soumise à une obligation de soins a sa résidence, assisté du SPIP, d’en contrôler le respect. En cas de non-respect de l’obligation, ce magistrat doit en informer le parquet qui décidera de l’opportunité de poursuivre la personne condamnée, qui s’expose, dans l’affirmative, à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 € d’amende

Signalons enfin que cette obligation de soins ne peut pas être ordonnée si l’intéressé fait l’objet ou est susceptible de faire l’objet d’une obligation ou d’une injonction de soins dans le cadre d’un aménagement de peine, d’une libération conditionnelle, d’une libération sous contrainte, d’un suivi sociojudiciaire, d’une contrainte pénale, d’un sursis avec mise à l’épreuve, d’une surveillance judiciaire ou d’une surveillance de sûreté.

Notes

(1) Voir ASH n° 2869-2870 du 18-07-14, p. 34 et n° 2871 du 22-08-14, p. 48.

(2) Voir ASH n° 2878 du 10-10-14, p. 46.

(3) Une copie de la convocation est adressée au juge de l’application des peines et au SPIP territorialement compétent pour suivre la mesure.

(4) La commission réunit le JAP, le SPIP, le chef de l’établissement pénitentiaire et le procureur de la République.

(5) Si l’intéressé a été condamné à une peine de réclusion à perpétuité, cet examen interviendra à l’issue de sa 18e année de détention.

[Décret n° 2014-1582 du 23 décembre 2014, J.O. du 26-12-14]

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