Où vont Lucia et Marussia ? Où dormiront-elles ce soir ? Traînant leur valise dans les rues de Paris, Lucia, 35 ans, et sa fille, âgée de 6 ans, n’ont pas d’endroit pour se poser. Elles ont bien tenté l’église orthodoxe russe, quand le 115 leur a répondu que tous les centres d’hébergement étaient complets. Elles ont été accueillies en foyer quelques nuits, mais en ont été expulsées le jour où elles ne sont pas rentrées en temps et en heure. Elles ont dormi au cinéma, chez des amants de passage de Lucia, dans le canapé de bons samaritains. Au-delà d’un logement pour elles deux, Lucia ne demande rien. Elle refuse les propositions de travail ou des solutions pour accueillir sa fille seule. A aucun prix elle ne s’en séparera. De bonnes âmes sont prêtes à lui payer un billet pour retourner en Russie, mais Lucia en est persuadée : en France, « quelque chose de merveilleux » va lui arriver. Une réflexion enfantine qui permet de dresser un peu mieux le portrait de cet ancien mannequin, veuve d’un homme d’affaires russe, qui garde la tête haute en toutes circonstances et ne présente aucun signe extérieur du sansabrisme. Tout au long du film d’Eva Pervolovici, le spectateur, intrigué par leur itinéraire, se demande qui, de Lucia ou de Marussia, est l’adulte ? Quand la première achète à la petite un lapin d’appartement avec l’argent qui devait servir à payer une nuit d’hôtel, on s’interroge encore plus sur ce personnage désespérant. D’autant que Lucia existe réellement. Eva Pervolovici a choisi, après sa rencontre surprenante avec cette mère et son enfant, de transformer cette histoire vraie en long métrage. Le plus étonnant, dans l’entreprise de la réalisatrice, est que si elle a fait appel à une comédienne professionnelle pour donner corps à Lucia, c’est la vraie Marussia (Marie-Isabelle Shteynman) qui interprète son propre rôle ! Quelques années après avoir été traînée par sa mère de foyers d’hébergement en hôtels, celle-ci rejoue son histoire d’enfant miséreuse mais heureuse.
Marussia
Eva Pervolovici – 1 h 22 – En salles le 21 janvier