Dans une décision rendue le 23 décembre dernier, le Conseil d’Etat valide la recommandation « Autisme et autres troubles envahissants du développement : interventions éducatives et thérapeutiques coordonnées chez l’enfant et l’adolescent » – adoptée par la Haute Autorité de santé (HAS) et par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) en mars 2012(1) – mais annule, pour un motif de procédure, son application dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux. Cette recommandation de bonnes pratiques reste donc valable pour les professionnels de santé, mais elle doit être renouvelée en bonne et due forme pour les structures relevant du secteur social et médico-social.
La Haute Juridiction administrative avait été saisie d’une requête en annulation pour excès de pouvoir déposée en août 2012 par l’Association lacanienne internationale, dont un premier recours gracieux auprès du directeur de la HAS, tendant au retrait de la recommandation, avait été rejeté. Cette requête intervenait dans un climat tendu entre les tenants des différents courants, la recommandation donnant en effet la priorité aux méthodes éducatives et comportementales sur l’approche psychanalyste, sans toutefois complètement exclure cette dernière. Or le gouvernement s’était largement appuyé sur cette recommandation pour élaborer son troisième plan autisme, présenté en mai 2013(2), et dont le président de la République a promis, en octobre dernier, de maintenir les moyens budgétaires(3).
Alors que l’organisation requérante attaquait la recommandation tant sur le fond que sur la forme, le Conseil d’Etat constate d’emblée son illégalité à l’égard des établissements et services sociaux et médico-sociaux dans la mesure où « le conseil scientifique de [l’ANESM] n’a pas été consulté préalablement à [son] adoption », contrairement à ce que prévoit le code de l’action sociale et des familles. « L’Agence fait certes valoir l’impossibilité de réunir le conseil scientifique entre la date d’expiration du mandat de ses membres, nommés pour trois ans par un arrêté du 5 octobre 2007, et les nouvelles nominations auxquelles il a été procédé par arrêté du 28 mars 2012 », relèvent les sages du Palais-Royal, qui écartent néanmoins cet argument en estimant « qu’il appartenait à l’Etat [...] de procéder en temps utile à la nomination des membres du conseil et de permettre ainsi sa consultation ».
L’Association lacanienne internationale est donc « fondée à soutenir que l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux a adopté la recommandation attaquée au terme d’une procédure irrégulière », car « ce défaut de consultation, qui a privé d’une garantie les établissements et services auxquels la recommandation peut être opposée, a constitué une irrégularité de nature à entacher sa légalité, en tant qu’elle concerne les établissements et services sociaux et médico-sociaux ».
Ce qui n’est pas le cas pour les professionnels de santé, la HAS ayant respecté, selon le Conseil d’Etat, la procédure prévue par la loi pour la consultation de ses membres et pour l’élaboration conjointe de cette recommandation avec l’ANESM. Ce, y compris au sein de groupes de travail – un groupe de pilotage, chargé de rédiger l’argumentaire scientifique et des propositions de recommandations, et un groupe de cotation, responsable de la sélection des propositions faisant l’objet d’un consensus – dont il n’apparaît pas que la composition « aurait été manifestement déséquilibrée » dans la mesure où ils « comprenaient des partisans des diverses approches existant dans le traitement de l’autisme, y compris psychanalytique ».
Ce qui n’est pas le cas pour les professionnels de santé, la HAS ayant respecté, selon le Conseil d’Etat, la procédure prévue par la loi pour la consultation de ses membres et pour l’élaboration conjointe de cette recommandation avec l’ANESM. Ce, y compris au sein de groupes de travail – un groupe de pilotage, chargé de rédiger l’argumentaire scientifique et des propositions de recommandations, et un groupe de cotation, responsable de la sélection des propositions faisant l’objet d’un consensus – dont il n’apparaît pas que la composition « aurait été manifestement déséquilibrée » dans la mesure où ils « comprenaient des partisans des diverses approches existant dans le traitement de l’autisme, y compris psychanalytique ».
En outre, au vu des pièces du dossier, le Conseil d’Etat relève « que les approches thérapeutiques faisant intervenir la psychanalyse et la psychothérapie institutionnelle dans le traitement de l’autisme et des troubles envahissants du comportement n’ont pas réuni, lors de l’élaboration de la recommandation attaquée, un accord suffisant des membres du groupe de cotation pour qu’elles soient qualifiées d’interventions recommandées, ni d’ailleurs de méthodes non recommandées ». Aussi, selon lui, l’association requérante ne pouvait-elle pas soutenir que, « au regard de la position d’une majorité des professionnels de santé, et notamment des pédopsychiatres, la recommandation attaquée serait entachée d’inexactitude matérielle en ce qu’elle qualifie ces approches d’interventions globales non consensuelles ». De même, les Sages du Palais-Royal rejettent les autres critiques portant sur le fond du texte qui n’est, selon eux, et contrairement à ce que prétendait l’association requérante, ni entaché d’une « erreur manifeste d’appréciation », ni « inintelligible et équivoque ».