Mineurs sans âge

Après avoir parcouru seuls 6 000 km depuis l’Afghanistan, Ahmadullah, Nehmat, Jamshid et Ali n’ont rien perdu de leurs rêves et de leurs espoirs. « Je n’ai aucun bon souvenir de mon voyage. Tout était grave », lâche l’un de ces adolescents pris en charge en France en tant que mineurs isolés étrangers. A demi-mot, on comprend qu’il a vu beaucoup de ses compatriotes mourir en chemin… Accueillis dans la région lilloise, les quatre garçons ont appris le français et réussissent brillamment leurs études, alors que, de leur propre aveu, ils n’ont jamais été à l’école dans leur pays. Quel chaos leur a fait quitter l’Afghanistan ? Comment vivent-ils une adolescence qui a commencé en Asie et se termine en Europe, loin de leurs repères ? Surtout, pourront-ils rester dans leur pays d’accueil comme ils le souhaitent, eux qui, au fil des ans, se sont progressivement insérés ? Marine Place, qui s’intéresse depuis plusieurs années au sort des migrants(1), propose dans le documentaire Tout à reconstruire de suivre ces jeunes hommes dans leur quotidien, entourés de bénévoles comme Bruno – « le grand-père des Afghans » –, de leurs professeurs, de leurs éducateurs. Tous ensemble, ils fêtent leur anniversaire le 31 ?décembre, puisque c’est la date de naissance attribuée à tous ceux qui n’ont pas d’acte d’état civil. D’ailleurs, quel âge ont-ils, ces « mineurs » ? Si leur visage accuse les années, les tests osseux censés déterminer leur âge leur donnent tantôt 17 ans, tantôt 19 ans… Ce qui change tout pour leur éventuelle prise en charge. Qu’importe, ils restent des enfants dans leur cœur, à qui leurs parents manquent, qui aiment jouer au foot avec leurs copains et qui rêvent de découvrir le monde, une fois leurs papiers et leurs diplômes en poche.