L ’aventure n’est pas banale : il s’agit de l’organisation par des travailleurs sociaux d’un marché de vendeurs de rue, porte de Montmartre, à Paris. A cet endroit stratégique, situé dans la continuité des puces de Saint-Ouen, quelques dizaines de « biffins » (vendeurs à la sauvette d’objets de récupération) vivaient en bonne intelligence avec la population depuis une trentaine d’années. Mais, la crise aidant, ces biffins étaient 400 en 2008 et près de 1 000 au début 2009, débordant largement de leur emplacement initial, sous le pont du périphérique, vers les rues avoisinantes. Face à cette considérable augmentation du nombre de vendeurs – et à la transformation des trottoirs en dépotoirs, les intéressés, régulièrement chassés par la police, abandonnant tout ou partie de leurs étals dans l’urgence de la fuite –, des riverains mécontents s’organisent en collectif. Parallèlement, « quelques biffins historiques », soutenus par des habitants solidaires et des élus municipaux, se constituent en association. C’est dans ce contexte explosif que l’association d’insertion Aurore est mandatée par la Ville de Paris pour mettre en place et encadrer à partir d’octobre 2009 un marché organisé de vente de produits de seconde main : le Carré des biffins(1). Yvan Grimaldi et Pascale Chouatra, directeur et chef de service du Carré pendant ses trois premières années de fonctionnement, livrent un passionnant récit de cette initiative qui prend place au carrefour du travail social et de la régulation de l’espace public. Un récit sans concession sur les impasses de ce type d’intervention et le découragement qui s’ensuit chez les professionnels.
« De seconde main ». Vendeurs de rue et travailleurs sociaux face à face dans la crise
Yvan Grimaldi et Pascale Chouatra – Ed. L’Harmattan – 25 €