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La loi relative à l’économie sociale et solidaire

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Valoriser, organiser, soutenir et développer le secteur de l’économie sociale et solidaire, tel est l’objectif poursuivi par la loi du 31 juillet dernier. Retour sur les principales dispositions de ce texte, dont certaines concernent directement les associations, acteurs historiques de ce secteur.

Depuis la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (ESS), ce secteur dispose d’un cadre légal lui assurant, selon l’exposé des motifs du texte, « une meilleure visibilité et une plus grande sécurité juridique ». Apparue au XIXe siècle dans les pays occidentaux, principalement sous la forme d’associations, de coopératives et de sociétés de secours mutuels, l’économie sociale apporte des réponses collectives aux besoins sociaux, distinctes de l’entrepreneuriat capitaliste. Déjà à l’époque, elle se fondait, comme aujourd’hui, sur le principe « une personne = une voix » – et non pas sur celui de la proportionnalité entre le droit de vote et le nombre de parts sociales détenues –, sur une lucrativité limitée et sur l’absence de spéculation sur les parts sociales de l’entreprise. Par la suite, l’économie sociale a évolué, particulièrement en direction de « publics vulnérables et de territoires délaissés », selon l’exposé des motifs. Cette évolution a d’ailleurs conduit à enrichir la dénomination du secteur en « économie sociale et solidaire » et à voir le profil de ses acteurs se diversifier avec notamment les entreprises d’insertion et les entreprises adaptées. L’ESS regroupe ainsi les acteurs historiques de l’économie sociale (associations, mutuelles, coopératives et fondations), mais aussi de nouvelles formes d’entrepreneuriat social : les sociétés commerciales qui poursuivent un objectif d’utilité sociale, désormais défini par la loi, et qui font le choix de s’appliquer à elles-mêmes les principes de l’ESS. Tous ces acteurs sont désormais regroupés par la loi sous l’appellation « entreprises de l’économie sociale et solidaire ».

En plus d’être un modèle sachant concilier exigences de solidarité et performances économiques, ce mode d’entreprendre spécifique crée plus d’emplois que l’économie classique. En effet, d’après le secrétariat d’Etat chargé de l’ESS, « depuis 2000, tandis que l’emploi privé dans l’économie classique (hors ESS) progressait de 4,5 %, les entreprises de l’ESS, qui représentent 10 % du PIB, créaient 24 % d’emplois supplémentaires ». C’est la raison pour laquelle le gouvernement a souhaité, avec la loi du 31 juillet 2014, « encourager un changement d’échelle de l’ESS dans tous ses aspects, afin de construire avec les entreprises de l’ESS une stratégie de croissance plus robuste, plus riche en emplois, plus durable et plus juste socialement ». La loi donne ainsi un cadre légal au secteur, l’objectif étant d’encadrer le périmètre de l’économie sociale et solidaire et de contribuer à orienter davantage de financements, publics et privés, en direction de ses différents acteurs.

I. LE PÉRIMÈTRE DE L’ESS

A. La définition de l’ESS (art. 1 de la loi)

La loi définit l’économie sociale et solidaire comme un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé qui respectent, de façon cumulative, les grands principes suivants :

→ un but social autre que le seul partage des bénéfices ;

→ une lucrativité encadrée avec, notamment, l’obligation de consacrer majoritairement les bénéfices à l’objectif de maintien ou de développement de l’activité ;

→ une gouvernance démocratique et participative.

Selon la loi, l’ESS regroupe donc les personnes morales de droit privé constituées sous la forme d’associations, de mutuelles, de coopératives et de fondations. Mais le législateur a adopté une approche inclusive pour reconnaître que, au-delà de ces acteurs historiques, les sociétés commerciales ont aussi leur place au sein de cette famille. « L’inclusivité, c’est la possibilité d’inclure dans le champ de l’ESS toute entreprise qui en respecte les principes exigeants. Il n’y a ni exclusive ni exclusion a priori », a expliqué la secrétaire d’Etat chargée de l’ESS, Carole Delga, lors des débats à l’Assemblée nationale. La définition retenue « vise à placer des barrières autour de l’ESS, mais des barrières pouvant s’ouvrir à la demande de ceux qui le souhaitent », a-t-elle précisé (J.O.A.N. (C.R.) n° 70 du 4-07-14, page 5114). Ainsi, une entreprise peut aussi relever du secteur de l’ESS dès lors qu’elle en respecte les grands principes ci-dessus mentionnés, recherche une utilité sociale (voir ci-dessous) et applique les règles de gestion suivantes :

→ le prélèvement d’une fraction, qui sera définie par arrêté et au moins égale à 20 % des bénéfices de l’exercice, affectée à la constitution d’une réserve statutaire obligatoire, dite « fonds de développement », tant que le montant total des diverses réserves n’atteint pas une fraction, définie par arrêté, du montant du capital social. Cette fraction ne peut excéder le montant du capital social. Le cas échéant, les bénéfices sont diminués des pertes antérieures ;

→ le prélèvement d’une fraction, définie par arrêté et au moins égale à 50 % des bénéfices de l’exercice, affectée au report bénéficiaire ainsi qu’aux réserves obligatoires. Le cas échéant, les bénéfices sont diminués des pertes antérieures ;

→ l’interdiction pour la société d’amortir le capital et de procéder à une réduction du capital non motivée par des pertes, sauf lorsque cette opération assure la continuité de son activité, dans des conditions prévues par décret. Le rachat de ses actions ou parts sociales est subordonné au respect des exigences applicables aux sociétés commerciales.

La loi prévoit que les personnes morales de droit privé qui répondent aux conditions posées pour faire partie de l’ESS peuvent faire publiquement état de leur qualité d’entreprise de l’économie sociale et solidaire et bénéficier des droits qui s’y rattachent. S’agissant des sociétés commerciales, elles doivent, en outre, être inscrites au registre du commerce et des sociétés avec la mention de la qualité d’entreprise de l’ESS.

Un décret doit préciser les conditions d’application de ces règles, notamment celles qui concernent les sociétés commerciales.

B. La définition de l’utilité sociale (art. 2)

Selon la loi, sont considérées comme poursuivant une utilité sociale les entreprises dont l’objet social satisfait à titre principal à l’une au moins des trois conditions suivantes :

→ apporter un soutien à des personnes en situation de fragilité soit du fait de leur situation économique ou sociale, soit du fait de leur situation personnelle et en particulier de leur état de santé ou de leurs besoins en matière d’accompagnement social ou médico-social. Ces personnes peuvent être des salariés, des usagers, des clients, des membres ou des bénéficiaires de ces entreprises ;

→ contribuer à la lutte contre les exclusions et les inégalités sanitaires, sociales, économiques et culturelles, à l’éducation à la citoyenneté, notamment par l’éducation populaire, à la préservation et au développement du lien social ou au maintien et au renforcement de la cohésion territoriale ;

→ œuvrer en faveur du développement durable dans ses dimensions économique, sociale, environnementale et participative, de la transition énergétique ou de la solidarité internationale, sous réserve que leur activité soit liée à l’un des deux objectifs susmentionnés.

II. LA STRUCTURATION ET LA PROMOTION DE L’ESS

A. Les instances représentatives

1. LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE L’ESS (ART. 4)

La loi donne une assise législative au Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire (CSESS), institué par voie réglementaire en 2006. Un décret doit préciser sa nouvelle composition, ses modalités de fonctionnement et de désignation, ainsi que ses nouvelles missions notamment en direction de la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la promotion de l’ESS auprès de la jeunesse(1).

A Composition

La loi indique que le CSESS doit comprendre, notamment :

→ des représentants désignés par l’Assemblée nationale, le Sénat, le Conseil économique, social et environnemental et les associations représentatives des collectivités territoriales au niveau national ;

→ des représentants des différentes formes juridiques d’entreprises de l’ESS (associations, mutuelles, coopératives…), proposés par celles-ci ;

→ des représentants des organisations représentatives de salariés et d’employeurs des entreprises de l’ESS, proposés par celles-ci ;

→ des représentants du Conseil national des chambres régionales de l’ESS (voir ci-dessous) ;

→ des représentants d’autres organismes consultatifs nationaux compétents pour traiter des questions relatives notamment à la vie associative et à l’insertion par l’activité économique ;

→ des représentants des services de l’Etat qui contribuent à la préparation ou à la mise en œuvre de l’économie sociale et solidaire ;

→ des personnalités qualifiées choisies parmi les experts de l’ESS.

B Rôle

Placé auprès du Premier ministre et présidé par le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire, le CSESS est chargé d’assurer le dialogue entre les acteurs de l’ESS et les pouvoirs publics nationaux et européens. Il est consulté notamment sur tous les projets législatifs et réglementaires communs au secteur. Il veille également à améliorer l’articulation entre les réglementations et les représentations assurées par l’ESS aux niveaux national et européen. Il peut aussi se saisir de toute question relative au secteur, en particulier de tout projet de directive ou de règlement européens le concernant. Et, tous les 3 ans, il doit publier un rapport sur l’évolution de la prise en compte de l’ESS dans le droit de l’Union européenne et ses politiques.

Le CSESS doit par ailleurs contribuer à définir, tous les 3 ans, une stratégie nationale de développement de l’ESS. Il doit également définir une stratégie tendant à promouvoir l’ESS auprès des jeunes. Enfin, tous les trois ans, il doit établir un rapport sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, et formuler des propositions permettant entre autres une meilleure articulation entre la vie personnelle et professionnelle des salariés de l’ESS ou encore garantissant la parité entre les femmes et les hommes dans toutes les instances élues des entreprises de l’ESS.

2. LA CHAMBRE FRANÇAISE DE L’ESS (ART. 5)

La loi prévoit la mise en place d’une Chambre française de l’économie sociale et solidaire (CFESS). Cette association d’utilité publique, officiellement créée le 24 octobre dernier, a vocation à assurer la représentation des acteurs du secteur auprès des pouvoirs publics. Elle est présidée par Roger Belot, président d’honneur de la MAIF, et de deux vice-présidents : Nadia Bellaoui, présidente du Mouvement associatif, et Jean-Claude Detilleux, président de Coop FR (pour les coopératives). Elle est composée de ses sept membres fondateurs (2) et « s’ouvrira ensuite à des membres actifs représentatifs de la diversité et du dynamisme de l’ESS », d’après un communiqué de son président. La chambre, qui a vocation à se substituer au Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l’économie sociale (CEGES), devrait être opérationnelle au début de l’année prochaine, précise le communiqué.

3. LES CHAMBRES RÉGIONALES DE L’ESS (ART. 6)

La loi conforte l’existence des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CRESS), qui représentent l’économie sociale et solidaire au niveau local, et harmonise leurs missions. Constituées en associations d’utilité publique, elles réunissent les entreprises de l’ESS ayant leur siège social ou un établissement situé dans leur ressort et les organisations professionnelles régionales de celles-ci. Les CRESS ont un rôle de représentation auprès des pouvoirs publics, d’appui aux entreprises et à la formation de leurs dirigeants et de leurs salariés, de collecte et de consolidation des données économiques et sociales relatives aux entreprises de l’ESS, d’information des entreprises sur la dimension européenne de l’ESS et de développement de la coopération internationale des collectivités territoriales en matière d’ESS. Elles assurent aussi la mise à jour et la publication, dans des conditions qui doivent être définies par décret, de la liste des entreprises de l’ESS. Enfin, afin de coordonner leurs activités et faire remonter, au niveau national, les données économiques et qualitatives qu’elles ont récoltées, les chambres sont regroupées au sein d’un Conseil national.

B. Un guide de bonnes pratiques (art. 3)

Le Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire doit adopter, d’ici à la fin de l’année 2015, un « guide définissant les conditions d’amélioration continue des bonnes pratiques » des entreprises de l’ESS. Ces conditions doivent tenir compte des spécificités de chacune des différentes formes juridiques d’entreprise (associations, mutuelles…). Les « bonnes pratiques » concernent notamment :

→ les modalités effectives de gouvernance démocratique ;

→ la concertation dans l’élaboration de la stratégie de l’entreprise ;

→ la territorialisation de l’activité économique et des emplois ;

→ la politique salariale et l’exemplarité sociale, la formation professionnelle, les négociations annuelles obligatoires, la santé et la sécurité au travail et la qualité des emplois ;

→ le lien avec les usagers et la réponse aux besoins non couverts des populations ;

→ la situation de l’entreprise en matière de diversité, de lutte contre les discriminations et d’égalité réelle entre les femmes et les hommes en matière d’égalité professionnelle et de présence dans les instances dirigeantes élues.

Le CSESS suit l’application du guide de bonnes pratiques et doit publier tous les 3 ans un rapport d’évaluation du dispositif.

Les entreprises de l’ESS devront, à l’occasion de leur assemblée générale annuelle, présenter des informations sur l’application des pratiques définies par le guide au plus tard 2 ans après sa publication pour les entreprises de moins de 250 salariés et au plus tard un an après sa publication pour celles de 250 salariés et plus.

C. Les politiques territoriales

1. L’ACTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES (ART. 7 et 8)

Afin d’assurer le déploiement de l’économie sociale et solidaire, les régions doivent élaborer, en concertation avec les CRESS et les organismes et entreprises du secteur, une stratégie régionale de l’ESS et peuvent contractualiser avec les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre pour la mise en œuvre de stratégies concertées.

Le représentant de l’Etat dans la région et le président du conseil régional doivent en outre organiser, au moins tous les 2 ans, une conférence régionale de l’ESS au cours de laquelle seront débattus les orientations, les moyens et les résultats des politiques locales de développement du secteur.

Les politiques publiques des collectivités territoriales et de leurs groupements en faveur de l’économie sociale et solidaire peuvent s’inscrire dans des « démarches de coconstruction » avec l’ensemble des acteurs concernés. Les modalités de cette coconstruction s’appuient notamment sur la mise en place d’instances associant les acteurs concernés ou de démarches associant les citoyens au processus de décision publique.

2. LA RECONNAISSANCE DES PTCE (ART. 9)

Dans un objectif de création d’emplois, la loi donne un cadre juridique aux pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) afin de favoriser leur multiplication. Il s’agit de regroupements, sur des territoires donnés, d’entreprises classiques et de structures de l’économie sociale et solidaire associés à des collectivités locales, des centres de recherche, des organismes de formation, des établissements d’enseignement supérieur ou toute autre personne physique ou morale qui concourent à la mise en œuvre d’une stratégie commune et continue de coopération, de partenariat ou de mutualisation au service de projets économiques innovants de développement local durable. Un décret, qui devrait paraître en décembre selon Carole Delga, fixera la procédure et les critères de sélection des projets, qui se fait par appels à projets.

III. LES DISPOSITIFS CONCOURANT AU DÉVELOPPEMENT DE L’ESS

A. L’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » (art. 11 et 97)

La loi opère la refonte de l’agrément « entreprise solidaire », défini à l’article L. 3332-17-1 du code du travail et désormais dénommé agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS), tout en conservant certaines de ses conditions d’octroi et en maintenant de droit dans le nouveau dispositif certaines catégories d’entreprises.

Auparavant, une entreprise qui souhaitait se voir délivrer cet agrément, nécessaire pour accéder aux fonds d’épargne salariale solidaire, devait soit employer des salariés dans le cadre de contrats aidés ou en situation d’insertion professionnelle, soit remplir certaines règles en matière de rémunération de leurs dirigeants et salariés définies par décret. Désormais, pour obtenir l’agrément « ESUS », il faut remplir les conditions cumulatives suivantes (code du travail [C. trav.], art. L. 3332-17-1 modifié) :

→ l’entreprise doit avoir pour objectif principal la recherche d’une utilité sociale (voir page 52) ;

→ l’objectif d’utilité sociale et la politique de rémunération de l’entreprise doivent figurer dans les statuts ;

→ le résultat de l’entreprise doit être impacté de manière significative par l’objectif d’utilité sociale ;

→ la moyenne des sommes versées, y compris les primes, aux cinq salariés ou dirigeants les mieux rémunérés ne doivent pas excéder un plafond annuel fixé à sept fois le SMIC (121 415,28 € en 2014) ou le salaire minimum de branche si ce dernier est supérieur ;

→ les sommes versées, y compris les primes, au salarié ou dirigeant le mieux rémunéré, ne doivent pas excéder un plafond annuel fixé à 10 fois le SMIC (soit 173 450,40 € en 2014) ou le salaire minimum de branche si ce dernier est supérieur ;

→ les titres de capital de l’entreprise, lorsqu’ils existent, ne doivent pas être négociés sur un marché financier.

Sous réserve de remplir cette dernière condition et de respecter les grands principes de l’économie sociale et solidaire, bénéficient de plein droit de l’agrément « ESUS » (C. trav., art. L. 3332-17-1 modifié) :

→ les entreprises d’insertion ;

→ les entreprises de travail temporaire d’insertion ;

→ les associations intermédiaires ;

→ les ateliers et chantiers d’insertion ;

→ les organismes d’insertion sociale habilités par le conseil général ;

→ les services de l’aide sociale à l’enfance ;

→ les centres d’hébergement et de réinsertion sociale ;

→ les régies de quartier ;

→ les entreprises adaptées ;

→ les centres de distribution de travail à domicile ;

→ les établissements et services d’aide par le travail ;

→ les organismes agréés exerçant des activités de maîtrise d’ouvrage, d’ingénierie sociale, financière et technique, et d’intermédiation locative et de gestion locative sociale ;

→ les associations et fondations reconnues d’utilité publique et considérées comme recherchant une utilité sociale ;

→ les organismes agréés assurant l’accueil et l’hébergement de personnes en difficulté ;

→ les établissements et services d’enseignement qui assurent, à titre principal, une éducation adaptée et un accompagnement social ou médico-social aux mineurs ou jeunes adultes handicapés ou présentant des difficultés d’adaptation ;

→ les centres d’action médico-sociale précoce chargés de prendre en charge les enfants âgés de 0 à 6 ans présentant un handicap ;

→ les établissements et les services, y compris les foyers d’accueil médicalisé, qui accueillent des personnes adultes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert.

Sont en outre assimilés aux entreprises solidaires d’utilité sociale agréées (C. trav., art. L. 3332-17-1 modifié) :

→ les organismes de financement dont l’actif est composé d’au moins 35 % de titres émis par des entreprises de l’ESS, dont au moins 5/7 de titres émis par des entreprises agréées « ESUS » ;

→ les établissements de crédit dont au moins 80 % de l’ensemble des prêts et des investissements sont effectués en faveur d’une entreprise solidaire d’utilité sociale.

Un décret doit préciser, d’ici à la fin de l’année, les règles applicables à cet agrément.

Les entreprises qui ont obtenu avant le 1er août 2014 l’agrément « entreprise solidaire » sont réputées bénéficier de l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » pour la durée restante de validité de l’agrément lorsque celle-ci dépasse 2 ans et pour une durée de 2 ans dans le cas contraire (art. 97 de la loi).

B. La commande publique (art. 13)

La loi dispose que, au-delà d’un montant annuel d’achats fixé par décret(3), tout acheteur public (collectivités locales, établissements publics…) doit adopter un « schéma de promotion des achats publics socialement responsables ». Ce schéma détermine les objectifs de passation de marchés publics comportant des éléments à caractère social visant à favoriser l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés. L’objectif est de « faciliter l’accès à la commande publique des structures employant des travailleurs handicapés ou défavorisés », explique Yves Blein, rapporteur de la loi à l’Assemblée nationale (Rap. A.N. n° 1891, avril 2014, Blein, page 152).

La loi prévoit, en outre, la conclusion dans chaque région d’une convention entre le représentant de l’Etat et un ou plusieurs organismes qui œuvrent en faveur de l’accès à l’emploi durable des personnes exclues du marché du travail (maisons de l’emploi, gestionnaires de plans locaux pluriannuels pour l’insertion et l’emploi…), notamment en facilitant le recours aux clauses sociales dans les marchés publics concourant à l’intégration sociale et professionnelle de travailleurs handicapés ou défavorisés. L’introduction d’une clause sociale dans une commande publique répond à une exigence du code des marchés publics qui incite à prendre en compte, dans la définition des besoins d’un marché public, des critères liés à l’emploi ou à la lutte contre les exclusions.

C. La définition de l’innovation sociale (art. 15)

La loi définit l’innovation sociale comme un projet d’une ou plusieurs entreprises consistant à offrir des produits ou des services répondant :

→ soit à des besoins sociaux non ou mal satisfaits, que ce soit dans les conditions actuelles du marché ou dans le cadre des politiques publiques ;

→ soit à des besoins sociaux par une forme innovante d’entreprise, par un processus innovant de production de biens ou de services ou encore par un mode innovant d’organisation du travail. Les procédures de consultation et d’élaboration des projets socialement innovants auxquels sont associés les bénéficiaires concernés par ce type de projet ainsi que les modalités de financement de tels projets relèvent également de l’innovation sociale.

L’entreprise concernée peut prétendre à des financements publics au titre de l’innovation sociale uniquement si le caractère innovant de son activité engendre des difficultés à en assurer le financement intégral aux conditions normales du marché. Cette condition ne s’applique pas aux financements accordés au titre de l’innovation sociale par les collectivités territoriales. C’est le Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire qui est chargé de définir les orientations permettant d’identifier un projet ou une activité économique socialement innovant.

IV. LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES AUX ASSOCIATIONS

A. La simplification des démarches (art. 62)

Dans le cadre du « choc de simplification » voulu par le président de la République, la loi autorise le gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification des démarches des associations auprès de l’administration, notamment en adaptant les modalités d’enregistrement, d’agrément et de reconnaissance d’utilité publique et les conditions d’obtention de financements. Ces ordonnances devront être prises d’ici au 1er août 2015.

B. La reconnaissance du Haut Conseil à la vie associative (art. 63)

La loi donne une reconnaissance législative au Haut Conseil à la vie associative, créé en 2011 par décret. Défini comme une instance consultative placée auprès du Premier ministre, il est saisi à chaque fois qu’un projet de loi ou de décret comporte des dispositions spécifiques relatives au financement, au fonctionnement ou à l’organisation des associations, et peut se saisir de toute question relative aux associations. Il a également pour mission de proposer toutes mesures utiles au développement de la vie associative et de formuler des recommandations en vue d’améliorer la connaissance des réalités du secteur associatif. Le Haut Conseil doit aussi établir tous les 2 ans un bilan de la vie associative. La fixation de sa composition et celle de ses modalités de fonctionnement sont renvoyées à un décret.

C. Le renforcement des financements

Certaines mesures de la loi visent à développer les modes de financement des associations qui subissent une diminution des subventions depuis quelques années.

1. LA DÉFINITION LÉGALE DE LA SUBVENTION (ART. 59)

La loi clarifie le régime juridique de la subvention qui constitue la ressource de base du secteur associatif. Partant d’une étude qui montrait que les collectivités territoriales avaient, pour faire face à leurs obligations de service public, de plus en plus tendance à recourir à la procédure des appels d’offres (+ 73 % des sommes investies entre 2005 et 2011) plutôt qu’à l’attribution de subventions (– 17 % pendant la même période), le gouvernement a décidé d’introduire dans la loi des dispositions d’ordre technique visant à sécuriser les subventions que les élus versent aux associations de leur territoire.

Le texte définit ainsi la subvention comme l’ensemble des « contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l’acte d’attribution », allouées par les autorités administratives à des personnes morales de droit privé pour la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, le développement d’une activité ou le financement global de l’activité de l’organisme bénéficiaire. Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités administratives qui les accordent, précise la loi (loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, art. 9-1 nouveau).

2. L’EXTENSION DES DONS ET DES LEGS AUX ASSOCIATIONS D’UTILITÉ GÉNÉRALE (ART. 74)

Auparavant, seules les associations qui avaient pour but l’assistance, la bienfaisance, la recherche scientifique ou médicale, ainsi que les associations et fondations reconnues d’utilité publique pouvaient percevoir des libéralités (legs, dons…). La loi étend cette capacité de percevoir des dons et des legs à toutes les associations déclarées depuis 3 ans au moins et qualifiées d’intérêt général au plan fiscal (loi du 1er juillet 1901, art. 6 modifié).

D. Le développement de l’engagement associatif

1. LE VOLONTARIAT ASSOCIATIF (ART. 64)

Afin de valoriser l’engagement dans les associations des personnes de plus de 25 ans, le législateur rebaptise le volontariat de service civique, réservé aux plus de 25 ans et différent du service civique destiné aux 16-25 ans, volontariat associatif. Sans changement, ces contrats de volontariat, qui donnent lieu à une indemnisation, peuvent être proposés par les associations et fondations reconnues d’utilité publique agréées, et sont souscrits pour une durée de 6 à 24 mois. La durée cumulée des contrats de volontariat associatif pour un même individu ne peut désormais excéder 36 mois, précise la loi (code du service national, art. L. 120-1 et L. 120-18 modifiés).

Selon le rapporteur de la loi à l’Assemblée nationale, à l’initiative de ces modifications, le dispositif du volontariat de service civique « a rencontré peu de succès ». Et le volontariat associatif créé par la loi pourrait, selon ses vœux, « s’étendre aux jeunes âgés de 16 à 25 ans, ce qui serait une façon cohérente d’encourager l’investissement dans les associations en dehors du seul bénévolat ». Selon lui, « le gouvernement finira […] forcément par devoir aborder la question de l’extension de ce volontariat aux moins de 25 ans dans la mesure où le groupement d’intérêt public qui soutient le service civique [l’Agence du service civique] s’éteindra dans les mois à venir[4]. Il faudra alors offrir des formes nouvelles à l’engagement des jeunes de 16 à 25 ans » (Rap. A.N. n° 1891, avril 2014, Blein, pages 303 et 305).

2. LA RECONNAISSANCE DES COMPÉTENCES DES BÉNÉVOLES (ART. 65)

La loi prévoit que, lorsqu’une demande de validation des acquis de l’expérience (VAE) émane d’un membre bénévole d’une association, le conseil d’administration de l’association ou, à défaut, l’assemblée générale, peut émettre un avis pour éclairer le jury sur l’engagement du membre bénévole (code de l’éducation, art. L. 335-5 et L. 613-3 modifiés). Cela permet aux instances d’attester d’un engagement particulier auprès du jury sans remettre en cause la neutralité de ce dernier.

3. L’ÉVALUATION DES DISPOSITIFS DE CONGÉS D’ENGAGEMENT (ART. 67)

D’ici au 31 janvier 2015, le gouvernement doit remettre au Parlement un rapport sur l’évaluation des dispositifs de congés existants pour favoriser le bénévolat associatif, sur la création d’un congé d’engagement pour l’exercice de responsabilités associatives bénévoles, ainsi que sur l’évaluation du congé pour validation des acquis de l’expérience et, plus généralement, sur les modalités d’accès des bénévoles à la VAE.

4. L'ENGAGEMENT DES JEUNES (ART. 66)

La loi étend le Fonds d’expérimentation en faveur de la jeunesse, jusqu’à présent orienté vers le développement de projets destinés à favoriser la réussite scolaire et à améliorer l’insertion sociale et professionnelle des jeunes de moins de 25 ans, aux initiatives favorisant l’engagement des jeunes au service de causes d’intérêt général (loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008, art. 25 modifié).

5. LA FORMATION DES DIRIGEANTS (ART. 79)

La loi prévoit la possibilité pour les organismes paritaires collecteurs agréés de créer des fonds de formation des dirigeants bénévoles financés par les associations à but non lucratif. Ces fonds ont pour mission de financer et d’organiser la formation des dirigeants bénévoles de ces associations.

Ce qu’il faut retenir

Définition de l’ESS. L’économie sociale et solidaire comprend les acteurs historiques du secteur (associations, mutuelles, coopératives et fondations) ainsi que les sociétés commerciales respectant un mode de gouvernance démocratique, une gestion à but lucratif limité, et la poursuite d’un objectif d’utilité sociale, également défini par la loi.

Agrément « ESUS ». Appartenir à l’ESS permet de demander l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS), nécessaire pour accéder aux fonds d’épargne salariale solidaire. Cet agrément remplace l’agrément « entreprise solidaire ».

Subvention. Le législateur définit, pour la première fois, la subvention afin de donner aux associations et aux ollectivités publiques une plus grande sécurité juridique. La subvention est ainsi l’ensemble des contributions allouées par les autorités administratives à des personnes morales de droit privé, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, au développement d’une activité ou au financement global de l’activité de l’organisme bénéficiaire.

Consécration du dispositif local d’accompagnement (art. 61)

Créé en 2002 par l’Etat et la Caisse des dépôts, le dispositif local d’accompagnement (DLA) s’adresse à des structures qui développent des activités et services d’utilité sociale créatrices d’emplois (associations, coopératives, structures d’insertion par l’activité économique…). Dans chaque département, un ou plusieurs organismes assurent cette fonction. Ils réalisent un diagnostic des structures concernées, élaborent avec elles un plan d’accompagnement, financent des prestations de conseil et en assurent le suivi. D’après des études menées en 2010 et en 2012, le nombre d’emplois pourvus dans les structures accompagnées par un DLA a augmenté de 3,3 % par an. Ces résultats ont mené le législateur à reconnaître légalement ce dispositif.

Trois nouveaux outils pour financer les entreprises de l’ESS

Considérant que, au-delà du cadre juridique fourni par la loi du 31 juillet 2014, de « nouveaux outils publics de soutien financier » aux entreprises de l’économie sociale et solidaire sont nécessaires pour un changement d’échelle du secteur, Carole Delga a lancé, le 8 décembre, « trois nouveaux financements gérés ou soutenus par Bpifrance », dont les premiers devraient être opérationnels au premier trimestre 2015.

Le premier outil est le fonds d’investissement dans l’innovation sociale (FISO). Cofinancé à part égale par l’Etat et les régions, il sera géré par la Banque publique d’investissement Bpifrance(5). « Doté d’une capacité publique totale de 40 millions d’euros, il financera sous forme d’avances remboursables des projets socialement innovants, correspondant à des besoins sociaux non satisfaits par le marché ou par les politiques publiques, pour des “tickets d’investissement” d’une taille minimale de 30 000 € ». Dans un premier temps, le FISO sera expérimenté dans huit régions(6) avec une mobilisation des ressources budgétaires de l’Etat à hauteur de 10 millions d’euros. Après avoir évalué les résultats de cette première phase d’expérimentation, une seconde tranche de 10 millions d’euros « pourra être mobilisée, afin d’élargir le FISO à davantage de régions », indique le secrétariat d’Etat chargé de l’économie sociale et solidaire.

Le deuxième mode de financement présenté par Carole Delga consiste en des prêts de 5 ans pour les entreprises sociales et solidaires (PESS), diffusés par Bpifrance auprès des entreprises par l’intermédiaire de partenariats avec les banques classiques et les financeurs solidaires spécialisés. Les montants de ces prêts seront compris entre 20 000 € et 50 000 €, et pourront atteindre 100 000 € en cas d’intervention de la région. « Ce programme est doté d’une capacité d’engagement Bpifrance […] de 50 millions d’euros pour les exercices budgétaires 2015 et 2016, soit plus de 100 millions d’euros de prêts en intégrant les cofinancements », précise le secrétariat d’Etat. En effet, le « PESS accompagne obligatoirement un financement extérieur », et est donc cofinancé par des établissements privés avec un ratio de « un pour un » pour les sommes engagées, explique-t-il.

Enfin, Bpifrance mobilisera via un « fonds de fonds », une capacité d’investissement en fonds propres dans les entreprises de l’ESS et les entreprises recherchant un impact social, pour une capacité totale d’environ 100 millions d’euros.

Autres dispositions intéressant les associations

La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire comporte toute une série d’autres mesures concernant spécifiquement les associations, parmi lesquelles :

• une réforme des titres associatifs visant à faciliter le développement des fonds propres des associations (art. 70) ;

• un éclaircissement du cadre juridique applicable aux opérations de fusions, de scissions et d’apports partiels d’actifs entre associations (art. 71 et 72) ;

• la possibilité de créer des fonds territoriaux de développement associatif pour mener des actions communes, lancer des programmes mutuels de recherche et de développement ou encore des cours de formation (art. 68) ;

• la possibilité de créer des fonds de garantie des apports en fonds associatifs (art. 77).

Notes

(1) En attendant ce décret, un arrêté du 25 novembre 2014 reconduit les membres du CSESS déjà en fonction pour une durée de 6 mois (arrêté du 25 novembre 2014, NOR : EINA1426265A, J.O. du 5-12-14).

(2) Le Mouvement associatif, Coop FR, la Fédération nationale de la mutualité française, le Groupement des entreprises mutuelles d’assurances, le Centre français des fonds et fondations, le Conseil national des chambres régionales de l’ESS et le Mouvement des entrepreneurs sociaux.

(3) Un projet de décret fixe ce montant à 100 millions d’euros hors taxe.

(4) L’Agence du service civique a en effet été créée le 12 mai 2010 pour une durée de 5 ans prolongeable.

(5) Voir ASH n° 2790 du 4-01-13, p. 28.

(6) Franche-Comté, Centre, Picardie, Nord-Pas-de-Calais, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon, Rhône-Alpes et Lorraine. Marie-Guite Dufay et Carole Delga ont signé, le 8 décembre, avec une représentante de Bpifrance, la convention régionale mettant en œuvre le FISO en Franche-Comté. Les autres régions expérimentatrices signeront une telle convention au premier trimestre 2015.

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