Avec son système de quota obligatoire de 6 % de la masse salariale des entreprises de plus de 20 salariés, la France pourrait apparaître comme un modèle pour l’emploi des personnes handicapées. Sauf que, faute de soutien durable sur les lieux du travail, son taux de chômeurs en situation de handicap reste aussi l’un des plus élevés des pays riches. Certains de nos voisins européens ont fait d’autres choix, souvent en se dotant d’une législation interdisant la discrimination dans les entreprises pour des raisons de handicap. Les personnes sont donc mises d’emblée en situation de travail et l’accompagnement se fait dans l’entreprise.
En Allemagne, par exemple, cette clause de non-discrimination a été introduite dans la Constitution dès 1994. L’intégration dans l’emploi des travailleurs handicapés est assurée par les services techniques d’intégration professionnelle, assez similaires aux Cap emploi. Toutefois, le suivi y est largement plus développé, puisqu’une personne peut bénéficier d’un entraînement individuel sur le lieu de travail de 24 mois et d’un accompagnement dans l’emploi sans limite de temps. Les jeunes handicapés peuvent, quant à eux, bénéficier d’une mesure individuelle de formation professionnelle en entreprise, avec un accompagnement allant jusqu’à trois ans. La loi oblige également les employeurs qui ont un poste vacant à vérifier en priorité s’il peut convenir à une personne handicapée. Il reste que ces différentes mesures ne sont réservées qu’aux personnes sévèrement handicapées (taux d’incapacité supérieur ou égal à 50 %), même si des atténuations sont possibles en raison de difficultés d’insertion professionnelle.
L’Autriche a défini un quota de 4 % des effectifs pour les entreprises d’au moins 25 salariés. Dans ce pays qui a très peu investi dans le travail protégé (environ 1 500 places), l’emploi accompagné fait l’objet d’un programme national. Sur 32 000 personnes handicapées au chômage, 13 000 sont comptabilisées dans un service d’emploi accompagné. Mais, comme en Allemagne, ces dispositifs ne sont réservés qu’aux personnes présentant un handicap supérieur à 50 %, ou aux jeunes à faible niveau scolaire avec des difficultés « sociales et émotionnelles ».
Dans une autre logique, l’Espagne a voté, en 1982, une loi qui établit comme prioritaire le recrutement d’une personne handicapée lorsque celle-ci peut réaliser le même travail qu’une personne valide. Un quota d’emploi de 3 % pour le secteur public et de 2 % pour les entreprises privées d’au moins 50 salariés est également institué. En 2007, un programme d’emploi accompagné a été mis en place pour les travailleurs présentant au moins 33 % d’incapacité, ainsi que pour les personnes désavantagées sur le marché du travail. L’accompagnement est limité à 30 mois, même si de nombreux projets maintiennent un contact avec le salarié et l’employeur aussi longtemps qu’ils le souhaitent.
Au Portugal, l’accompagnement est surtout développé par les agences de l’emploi locales, qui intègrent dans leurs statuts le soutien à l’insertion des travailleurs handicapés.
Enfin, certains pays ont tenu à rationnaliser leurs dispositifs jusqu’à fournir des repères de coût et d’efficacité très précis. C’est le cas des Pays-Bas, qui ont mis en place un accompagnement modulable selon les besoins individuels d’une personne (besoins très légers, légers, modérés, intensifs). Les publics ciblés doivent pouvoir travailler au moins 12 heures par semaine avec un taux de productivité minimal de 35 %. Le temps dédié des professionnels (job coach) varie selon le besoin des personnes et l’ancienneté dans le dispositif. En totalité, 11 500 personnes sont accompagnées par 350 job coach, pour un coût moyen de 5 300 € par personne et par an (un job coach pour 32 personnes).