Missionnée par le ministre du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a récemment publié un rapport d’évaluation des groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (GEIQ)(1). Ces groupements, pour mémoire, sont des associations regroupant des entreprises qui ont pour objet d’organiser des parcours d’insertion et de qualification au profit de personnes rencontrant des difficultés d’insertion professionnelle et en vue de satisfaire les besoins de main-d’œuvre de leurs adhérents. Si « ce dispositif répond utilement à des carences importantes du marché du travail et du système de formation », il demeure néanmoins « d’une portée limitée, notamment au regard de la taille du secteur de l’insertion par l’activité économique, qui a assuré 142 000 recrutements en 2012 contre 5 500 pour les GEIQ », constate l’IGAS. Ainsi, tout en s’inscrivant dans le contexte de la reconnaissance des GEIQ opérée par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale(2), la mission fait notamment des recommandations en vue de les développer.
Les entreprises adhérentes aux GEIQ et les fédérations professionnelles jugent « très favorablement » le rôle d’intermédiation que jouent ces groupements entre les entreprises, les demandeurs d’emploi et les acteurs publics et privés de l’insertion et de la formation professionnelles, relève en premier lieu l’IGAS.
La mission constate également que ce dispositif a obtenu « dans l’ensemble des résultats très satisfaisants en matière d’insertion dans l’emploi » et les publics recrutés sont conformes à sa cible. En effet, 80 % des salariés embauchés sont peu ou pas qualifiés et les deux tiers sont des « publics prioritaires » (chômeurs de longue durée, bénéficiaires de minima sociaux, personnes handicapées…), note le rapport.
En outre, le coût que représentent les GEIQ pour l’Etat est « modeste », estime l’inspection, en raison de leur financement assuré en grande partie par les entreprises. En effet, pour une large part, ces groupements sont financés par les entreprises adhérentes à travers la facturation de la mise à disposition des salariés (72 % de leur financement). Leurs dépenses sont aussi couvertes par les fonds de la formation professionnelle pour les actions de formation et de tutorat (18,5 % de leur financement). Les financements publics – issus principalement de l’Etat et des collectivités territoriales, sous forme de subventions et d’aides financières aux contrats aidés – représentent, quant à eux, 8,5 % de leur financement.
Malgré ce bilan plutôt positif, la mission estime que l’Etat devrait renforcer le suivi au niveau national de l’aide à l’accompagnement versée aux GEIQ dans le cadre du contrat de professionnalisation, subvention versée par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi dans le cadre des conventions pour la promotion de l’emploi (CPE) – leviers d’intervention du ministère du Travail sur les projets innovants portés par les acteurs du territoire. Elle a en effet relevé que le versement de cette aide, qui ne fait pas l’objet d’un pilotage et d’un suivi au niveau central, n’était pas assuré dans des conditions homogènes selon les territoires. La mission suggère donc de mettre en place au niveau de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle un suivi et une programmation nationale annuelle des dépenses consenties au titre de l’aide à l’accompagnement personnalisé réservée aux GEIQ, en isolant ces dépenses des autres interventions menées dans le cadre des CPE, « en vue de satisfaire de manière prioritaire et uniforme les besoins des GEIQ en la matière ».
Par ailleurs, le rapport préconise de substituer aux modalités actuelles d’attribution de l’aide à l’accompagnement personnalisé dans le cadre des contrats de professionnalisation conclus avec les jeunes de moins de 26 ans et les demandeurs d’emploi de 45 ans et plus, un système de modulation. Ce dernier permettrait, indépendamment de l’âge, de verser un montant d’aide plus élevé pour les publics prioritaires et un montant plus faible pour les autres publics. Une revalorisation du montant de cette aide, dont le montant n’a pas évolué depuis 2003, est également suggérée afin de tenir compte de l’augmentation des coûts de main-d’œuvre. Son montant pourrait ainsi passer à « 807 € [sur la base de l’indice des prix à la consommation] et 814 € [sur la base de la hausse du SMIC] », contre 686 € aujourd’hui. L’IGAS recommande, en outre, de supprimer l’exonération de cotisations patronales accident de travail-maladie professionnelle réservée aux GEIQ et de la refondre en renforçant, en contrepartie, l’aide à l’accompagnement personnalisé.
Dès lors que la reconnaissance en tant que GEIQ conditionne, depuis la loi du 5 mars 2014, l’accès à certaines aides publiques, la mission considère que « la procédure de labellisation ne peut pas rester sous la responsabilité exclusive du Comité national de coordination et d’évaluation des GEIQ » (CNCE-GEIQ)(3). Elle recommande de déléguer à ce dernier une « responsabilité importante » dans la mise en œuvre de la procédure de labellisation, dans un cadre qui garantisse le respect des principes d’égalité, de neutralité et d’impartialité dans l’attribution du label, tout en veillant à ce que l’Etat en assure un « contrôle strict ». Pour ce faire, l’Etat pourrait, selon l’inspection :
→ soit intervenir sur le registre du « contrôle d’opportunité » en prenant part aux travaux d’instruction et aux décisions pour chaque groupement candidat à la labellisation ;
→ soit se limiter à un contrôle de conformité ou de légalité de la procédure qui resterait sous la responsabilité principale du CNCE-GEIQ.
(1) « Evaluation des groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification » – Mireille Gaüzère, Antoine Magnier, Emilie Vaysse – Rapport disponible sur
(3) Le Comité national de coordination et d’évaluation des GEIQ s’est transformé le 23 octobre dernier en Fédération française des GEIQ – Voir ASH n° 2880 du 24-10-14, p. 17.