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L’Intérieur précise les conditions d’accès des associations humanitaires aux lieux de rétention

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Un droit de regard de la société civile sur les conditions de rétention. C’est en ces termes qu’on pourrait présenter la possibilité offerte par la loi « immigration » du 16 juin 2011 à des associations humanitaires d’accéder aux lieux de rétention. Ce droit de visite ayant connu des premiers pas difficiles en raison d’un cadre réglementaire jugé trop restrictif, un décret, paru en juin dernier, en a assoupli les conditions(1). Le ministère de l’Intérieur précise aujourd’hui les modalités de mise en œuvre du texte dans une « information » très détaillée, adressée aux préfets.

A noter : ce droit d’accès se distingue de l’intervention des associations assurant des missions d’assistance juridique. Ces dernières sont en effet liées par un marché et remplissent une mission strictement encadrée. Comme le rappelle toutefois le ministère en préambule, le Conseil d’Etat a aussi ouvert la possibilité pour ces associations d’accéder aux lieux de rétention dans le cadre du droit de visite(2).

Les autorisations d’accès

Les associations doivent être habilitées par arrêté ministériel pour avoir le droit de désigner des représentants qui pourront entrer dans les lieux de rétention. « Le premier arrêté en ce sens est en cours d’élaboration par la direction de l’immigration », indique le ministère. Chaque association habilitée peut ainsi transmettre au ministre chargé de l’immigration une liste de cinq personnes ayant vocation à accéder à tous les lieux de rétention. A charge pour lui de les autoriser à le faire en leur délivrant une carte d’accès qui leur ouvrira les portes de tous les lieux de rétention du territoire.

Pour l’accès à un seul lieu de rétention, chaque association habilitée peut également transmettre au préfet territorialement compétent une liste de cinq personnes qu’il lui appartient d’autoriser. Si plusieurs lieux de rétention administrative sont placés sous l’autorité d’un seul préfet, ce dernier peut être amené à recevoir plusieurs listes provenant d’une même association. « La liste transmise doit donc renseigner le lieu de rétention pour lequel l’accès est demandé », précise le ministère. Pour être sûr que les personnes proposées représentent bien l’association habilitée, « seules les demandes provenant du siège national ou d’une délégation territoriale pourront faire l’objet d’un accord ».

S’agissant toujours de ces représentants locaux, un régime d’autorisation implicite est prévu, souligne le ministère. Ainsi, en l’absence d’opposition de la préfecture dans un délai de un mois après réception de la liste, les représentants associatifs qui y figurent sont considérés comme étant autorisés à accéder au lieu de rétention concerné. Ce délai de un mois doit permettre aux préfets de « faire les vérifications nécessaires pour s’assurer que les personnes proposées ne représentent ni un trouble à l’ordre public, ni un quelconque risque au sein du lieu de rétention ». Si le préfet veut s’opposer à l’habilitation d’une ou plusieurs personnes, sa décision doit être motivée et transmise à l’association dans un délai de un mois après réception de la demande d’autori

Les préfectures disposent également du droit de retirer un représentant associatif de la liste des personnes autorisées à accéder à un lieu de rétention, mais uniquement pour des motifs d’ordre public, insiste le ministère.

sation.

Au passage, ce dernier revient également sur l’obligation faite aux préfets d’organiser des réunions à intervalles réguliers sur le fonctionnement des lieux de rétention avec les associations ayant des représentants habilités dans leur département. « Vous êtes juges de l’opportunité de la date de ces réunions et de leur régularité », leur écrit-il, mais « il conviendra […] d’en organiser au minimum une par an ». Cette réunion peut concerner un établissement particulier ou être organisée pour l’ensemble des lieux de rétention du département, à charge pour les préfets d’y convier les responsables des structures concernées.

Les conditions de visite

L’accès leur étant ouvert uniquement pour des missions d’observation des conditions de rétention, les représentants des associations doivent limiter leur visite aux pièces dans lesquelles les personnes retenues peuvent se trouver au cours de leur rétention, indique le ministère. Autrement dit, ils disposent d’un accès pour le réfectoire, la salle de détente, l’espace de promenade, les chambres et sanitaires (à charge pour les chefs d’établissement de s’assurer qu’ils sont inoccupés avant d’y faire pénétrer les visiteurs), la salle de fouille, la salle de mise à l’écart, le local de visite des familles, le local à bagages ou bien encore la salle de visioconférence. D’autres locaux leur sont encore ouverts sous réserve d’avoir obtenu l’accord des intervenants du lieu de rétention : locaux permettant de recevoir les avocats, affectés à l’association assurant une mission d’assistance juridique, affectés à l’Office de l’immigration et de l’intégration, local de visite des autorités consulaires ou bien encore locaux réservés au service médical. L’accès aux bureaux des fonctionnaires de police, au greffe, à la salle de vidéosurveillance, à la cuisine et aux locaux réservés aux entreprises de maintenance leur est en revanche interdit.

Au-delà, les représentants associatifs peuvent procéder à des entretiens. Avec les « personnes contribuant au fonctionnement du lieu de rétention », tout d’abord… mais « cette possibilité n’est pas une obligation », souligne le ministère. L’intervenant peut refuser de s’entretenir avec les visiteurs. Quant au médecin ou aux infirmiers du lieu de rétention, les représentants associatifs peuvent s’entretenir avec eux « si ceux-ci l’acceptent », tout en veillant au respect du secret médical qui s’impose à leur fonction. Les représentants associatifs ont également la possibilité de s’entretenir avec les personnes retenues elles-mêmes. Le responsable du lieu de rétention peut refuser cet entretien dans le seul cas où il en entraverait le bon fonctionnement et les activités qu’y exercent les services de l’Etat, indique le ministère. Concrètement, l’entretien peut ainsi être « refusé ou écourté si, par exemple, il a pour effet d’empêcher l’organisation du départ du retenu amené dans les heures qui suivent à être présenté devant un juge ou devant le représentant consulaire ou à être éloigné, ou encore si la personne retenue peut représenter un danger pour les visiteurs ». En tout état de cause, cet entretien doit être confidentiel. « Les responsables d’établissement doivent donc veiller à ce qu’il puisse se dérouler dans des espaces permettant de préserver sa confidentialité. »

Les conditions d’accès

Dans la mesure où les assouplissements opérés par le décret de juin dernier devraient permettre la délivrance d’un plus grand nombre d’autorisations d’accès aux lieux de rétention, plusieurs règles ont été posées pour aider les responsables de ces lieux à gérer ces visites tout en préservant le bon fonctionnement de leur établissement. Il est ainsi rappelé aux préfets que l’accès au lieu de rétention est limité à cinq personnes au maximum par période de 24 heures. « Si plus de cinq personnes exprimaient le souhait de visiter un même lieu de rétention le même jour », le responsable doit retenir les cinq premières personnes ayant exprimé le souhait de visiter le lieu. Etant entendu que ces dernières peuvent appartenir à des associations différentes. « Un autre jour devra être proposé aux représentants ne pouvant effectuer la visite le jour souhaité », ajoute le ministère.

Les représentants associatifs ont, par ailleurs, l’obligation de prévenir le responsable du lieu de rétention au moins 24 heures à l’avance de leur visite, afin de lui permettre de se rendre disponible ou, en cas d’impossibilité, de désigner un membre du personnel pour accompagner la visite. En outre, ce délai de prévenance permet au chef d’établissement « d’établir un ordre d’arrivée des demandes de visites et ainsi de rendre effective la limitation à cinq personnes par période de 24 heures »(3).

Enfin, le décret permet au responsable du lieu de rétention d’ajourner les possibilités de visite, notamment lorsque la situation dans le centre n’en permet pas le bon déroulement. Ainsi, « en cas de manifestation, d’accident, de dégâts importants ou de tout autre événement exceptionnel », le chef d’établissement peut proposer aux représentants associatifs de reporter leur visite à une date ultérieure, explique le ministère, en rappelant toutefois que « cet ajournement doit être motivé et limité au strict nécessaire ».

[Information du 28 octobre 2014, NOR : INTV1425649N, disp. sur http://circulaires.legifrance.gouv.fr]
Notes

(1) Voir ASH n° 2867 du 4-07-14, p. 56.

(2) Voir ASH n° 2763 du 8-06-12, p. 14.

(3) Rappelons que le délai de prévenance a été ramené à 12 heures dans les locaux de rétention administrative.

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