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Droit au séjour : la fraude ne prive pas un étranger du droit au respect de sa vie privée et familiale

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Lorsqu’un préfet envisage de retirer à un étranger le titre de séjour qu’il a obtenu à la suite de manœuvres frauduleuses, il doit, afin de vérifier que ce qu’il décidera ne portera pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale, tenir compte des « circonstances propres à la vie privée et familiale » de l’intéressé… y compris celles qui sont postérieures à la fraude.

Dans cette affaire, un ressortissant algérien avait obtenu en 2002 un certificat de résidence de un an à la suite de son mariage avec une ressortissante française. Deux ans plus tard, sans informer l’administration de la procédure de divorce qu’il avait engagée, il avait obtenu un autre certificat, valable dix ans, avant de se remarier avec une compatriote. Ayant constaté qu’il avait obtenu son certificat de résidence par fraude, le représentant de l’Etat lui avait, par un arrêté, retiré son titre de séjour et avait assorti sa décision d’une obligation de quitter le territoire français.

L’affaire est allée jusqu’à la cour administrative d’appel de Bordeaux, qui a annulé l’arrêté du préfet, estimant qu’il portait au respect de la vie privée et familiale de l’intéressé une atteinte disproportionnée au but poursuivi. Après avoir relevé que le certificat de résidence avait été obtenu à la suite d’une dissimulation frauduleuse, les juges d’appel avaient en effet pris en considération plusieurs éléments, comme la durée de présence en France de l’intéressé – supérieure à dix ans – ou bien encore le fait qu’il s’était remarié et avait eu avec sa nouvelle épouse trois enfants qui étaient nés en France, y avaient toujours vécu et, pour deux d’entre eux, y étaient scolarisés. La cour d’appel avait également relevé que de nombreuses attestations témoignaient de la bonne insertion de la famille en France.

C’est ainsi que le préfet avait porté le litige devant le Conseil d’Etat. A ses yeux, en effet, les juges d’appel auraient dû, comme il l’avait fait, ne pas tenir compte des circonstances relatives à la vie privée et familiale de l’intéressé postérieures à l’obtention du certificat de résidence. Mais la Haute Juridiction n’a donc pas suivi ses arguments. « S’il appartient à l’autorité administrative de tenir compte de manœuvres frauduleuses avérées qui, en raison notamment de leur nature, de leur durée et des circonstances dans lesquelles la fraude a été commise, sont susceptibles d’influer sur son appréciation, elle ne saurait se dispenser de prendre en compte les circonstances propres à la vie privée et familiale de l’intéressé postérieures à ces manœuvres au motif qu’elles se rapporteraient à une période entachée par la fraude. »

A noter : cette décision peut être rapprochée d’un autre arrêt – rendu le même jour par le Conseil d’Etat – portant sur un étranger qui, pour prouver la durée de son séjour et ses liens familiaux en France, avait produit plusieurs documents au nom d’une identité usurpée(1). La Haute Juridiction y considère que, pour apprécier la réalité du séjour de l’étranger et sa situation personnelle et familiale, le juge administratif est tenu d’apprécier l’ensemble des pièces produites, y compris celles qui sont entachées par l’usurpation d’identité.

[Conseil d’Etat, 17 octobre 2014, n° 358767, disponible sur www.legifrance.gouv.fr]
Notes

(1) Conseil d’Etat, 17 octobre 2014, n° 365325, disponible sur www.legifrance.gouv.fr.

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