Dans une volumineuse circulaire, la caisse nationale des allocations familiales (CNAF) détaille les conditions de mise en œuvre, entre 2014 et 2017, du fonds de rééquilibrage territorial – doté de 125 millions d’euros sur la période – au regard de l’élaboration des schémas départementaux des services aux familles(1). L’objectif : « réduire les disparités territoriales en matière d’accueil du jeune enfant en adaptant les modalités d’utilisation du fonds de rééquilibrage lorsque la caisse d’allocations familiales [CAF] s’engage dans la mise en œuvre d’un schéma départemental ».
Les CAF doivent identifier les territoires prioritaires sur lesquels il existe un déficit d’offre d’accueil de jeunes enfants sur la base de trois critères définis sur le plan national. Sont ainsi considérés comme tels les territoires dont :
→ le taux de couverture en accueil des jeunes enfants est inférieur à la moyenne nationale (54 %);
→ le potentiel financier de la commune par habitant est inférieur au potentiel moyen national (978 €);
→ le revenu net moyen déclaré par foyer fiscal n’excède pas la moyenne nationale (21 197 €).
Dans tous les cas, souligne la circulaire, « le ciblage des territoires doit être effectué en cohérence avec les diagnostics territoriaux servant de base à l’élaboration du contrat pluriannuel d’objectifs et de gestion ». Les CAF doivent ensuite « croiser » les territoires ainsi identifiés avec ceux qui sont retenus dans le cadre de la politique de la ville afin d’« affiner l’identification des besoins à un niveau infracommunal que les indicateurs nationaux ne peuvent pas atteindre », explique-t-elle(2).
Le ciblage effectué, il convient de classer les territoires prioritaires en respectant les trois étapes suivantes :
→ déterminer le périmètre des territoires, à savoir la commune, l’établissement public de coopération intercommunale ayant une compétence légale « petite enfance » et, éventuellement, l’arrondissement, voire le quartier lorsque la compétence légale « petite enfance » relève d’une métropole ;
→ classifier les territoires selon trois rangs de priorité : les zones prioritaires (ZP) de niveau 1 – les plus prioritaires – qui cumulent les trois critères, les ZP2 qui répondent à deux critères sur trois et les ZP3, seulement caractérisées par un taux de couverture en accueil inférieur à la moyenne nationale ;
→ sélectionner les projets pouvant être financés via le fonds de rééquilibrage(3). Ce financement « ne présente aucun caractère systématique même si le projet est situé sur un territoire ciblé en zone prioritaire », précise la circulaire, soulignant qu’il convient de « prioriser les projets de qualité, respectueux des règles fixées par la CNAF quant à la prestation de service unique [PSU] et particulièrement adaptés aux problématiques du territoire concerné ». « L’implication des familles dans la vie de l’établissement ainsi que la mise en œuvre d’actions de soutien à la parentalité prévues dans le projet pédagogique de la structure constituent également des préalables sur lesquels il convient d’être attentif. » En tout état de cause, précise la caisse, devront être notamment privilégiés les projets situés en ZP1 et ceux « proposant une offre particulièrement adaptée à des besoins spécifiques » (fonctionnement en horaires élargis, projets en zones urbaines sensibles…).
Tous les établissements d’accueil de jeunes enfants situés sur un territoire prioritaire – qu’ils soient gérés par une collectivité territoriale, une association, une entreprise ou une mutuelle – peuvent prétendre à un financement du fonds de rééquilibrage. Ne sont en revanche pas éligibles au fonds les maisons d’assistantes maternelles, les relais d’assistantes maternelles, les lieux d’accueil enfants-parents, les accueils de loisirs et les équipements relatifs à l’accueil périscolaire, les jardins d’éveil ainsi que les services d’accueil familiaux et les microcrèches dans lesquels les familles bénéficient du complément de libre choix de mode de garde « structure » de la prestation d’accueil du jeune enfant.
« Dans la limite des enveloppes budgétaires limitatives disponibles », les structures d’accueil qui s’implantent sur un territoire prioritaire peuvent ainsi prétendre à une bonification au titre du fonctionnement via le fonds de rééquilibrage en plus de la PSU, de la prestation de service « enfance-jeunesse ? » et des crédits du fonds « publics et territoires »(4). Au final, la prise en charge peut ainsi atteindre 80 % du coût de fonctionnement de l’offre d’accueil. « Afin d’être incitative au développement de l’offre, l’aide est ciblée sur les places d’accueil nouvelles ouvrant au public sur la période de la [convention d’objectifs et de gestion 2013-2017] », indique la circulaire. En pratique, les CAF peuvent attribuer une aide d’un montant de 1 400 € par place pour les projets situés en ZP1, de 700 € pour ceux en ZP2 et de 300 € pour ceux en ZP3. Il leur appartient en outre d’apprécier l’opportunité de maintenir ou de suspendre le versement de l’aide si l’activité de la structure (heures réalisées) ne participe pas au développement d’une offre d’accueil nouvelle sur le territoire (diminution significative et/ou répétée de l’activité…), souligne la circulaire. Dans tous les cas, précise-t-elle encore, « l’ensemble des recettes (financements octroyés par la branche famille, y compris l’aide relative au rééquilibrage, participations familiales, autres subventions) ne peut excéder 100 % du coût annuel de fonctionnement de la structure ».
« Des adaptations peuvent être apportées aux critères nationaux de ciblage » pour mieux prendre en compte la spécificité de certains territoires n’entrant pas dans les zones prioritaires définies au niveau national, indique la caisse nationale des allocations familiales. Adaptations qui « doivent être étayées sur la base d’un diagnostic partagé, être justifiées de manière objective et s’appliquer à l’ensemble des communes du département ». A ce titre, les caisses d’allocations familiales disposent de trois leviers d’actions pouvant être mis en œuvre tous à la fois :
→ renforcer la coordination à l’échelon départemental pour favoriser le partenariat institutionnel et les interactions entre les différentes politiques sectorielles. Et, dans ce cadre, les caisses peuvent solliciter le fonds national « parentalité » qui finance, entre autres, la fonction d’animation recouvrant un volet « coordination »(5);
→ modifier les seuils de priorisation. Cette démarche, laissée à la libre appréciation des CAF, doit être justifiée au regard du diagnostic partagé à l’échelon départemental et favoriser une meilleure articulation avec la réalité locale s’il y a accord entre les partenaires dans le cadre du schéma ;
→ moduler à la hausse le montant forfaitaire par place.
Par ailleurs, la caisse nationale des allocations familiales précise que des crédits supplémentaires peuvent être octroyés aux départements qui s’engagent dans le dispositif préfigurateur des schémas départementaux des services aux familles. En plus de l’enveloppe qui leur a été notifiée en juin dernier, les CAF peuvent aujourd’hui compter sur une dotation annuelle « schéma » de 75 000 € cette année, portée à 100 000 € à partir de 2015. « Des campagnes de redistribution sont prévues dont les modalités seront communiquées ultérieurement. Les fonds non utilisés seront réaffectés aux CAF ayant fait remonter des besoins non couverts », indique la circulaire.
Enfin, le document détaille les modalités de suivi et de gestion du fonds de rééquilibrage. Pour mesurer la réduction des disparités territoriales, les caisses peuvent s’appuyer sur deux indicateurs :
→ le nombre de solutions nouvelles d’accueil collectif créées dans les zones prioritaires rapporté au nombre total de solutions d’accueil, l’objectif étant d’atteindre 75 % d’ici à la fin 2017 ;
→ l’évolution de l’écart entre le taux de couverture des zones prioritaires et celui des zones les mieux couvertes, le premier devant « progresser deux fois plus vite que le taux de couverture des territoires au-dessus de la moyenne nationale ».
(2) En effet, explique la CNAF, « un territoire peut être identifié comme quartier politique de la ville du fait de problématiques socio-économiques, mais ne pas avoir de problématique en matière de petite enfance ».
(3) La liste des projets retenus doit figurer dans le schéma départemental des services aux familles lorsque la CAF est engagée dans les départements préfigurateurs et être publiée. Dans les autres départements, cette liste doit être portée à la connaissance des partenaires de la caisse.