Remis le 5 novembre à la ministre des Affaires sociales et de la Santé et à la secrétaire d’Etat chargée des droits des femmes, le – court – rapport sur la définition d’un protocole national pour l’amélioration de la prévention et de la prise en charge des femmes victimes de violences(1) doit permettre de préparer la mise en œuvre de l’une des mesures phares du quatrième plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes, présenté il y a un an(2). « L’objectif de ce protocole est de créer un parcours continu pour les victimes de ces violences en encourageant la mise en réseau des professionnels chargés de les accompagner et en simplifiant leur prise en charge », expliquent Marisol Touraine et Pascale Boistard dans un communiqué, précisant qu’elles allaient étudier les propositions du rapport « pour présenter des mesures volontaristes le 25 novembre, journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes ».
Sans « minimiser » l’étape de la plainte ni « l’intervention des forces de la puissance publique », les propositions formulées dans le rapport essaient « de contribuer à déplacer le curseur pour donner une plus grande place et, ce faisant, une plus grande responsabilité aux acteurs de santé et d’accompagnement social, pour privilégier le “prendre soin”, qui inclut la bienveillance, la protection, l’accompagnement des femmes victimes de violence », rappellent en introduction les trois membres de la mission, Marie Fontanel, directrice générale adjointe de l’agence régionale de santé (ARS) d’Alsace, Patrick Pelloux, médecin urgentiste au SAMU de Paris, et Annie Soussy, cheffe de l’unité médico-judiciaire du centre hospitalier intercommunal de Créteil (Val-de-Marne). S’ils se sont inspirés d’expériences de terrain, ces derniers n’ont cependant pas souhaité « identifier une organisation idéale et unique qu’il serait vain de vouloir répliquer en tous points du territoire ». Ils ont en revanche « essayé d’identifier les prérequis et les passages obligés pour que chaque mode d’organisation […] garantisse aux femmes victimes de violences un parcours de prise en charge facilité, plus précoce, sans rupture, pluridisciplinaire et coordonné ».
En premier lieu, l’objet de l’élaboration d’un protocole local est « d’identifier formellement les ressources et le rôle de chacun et de rendre lisibles les choix d’organisation du parcours de prise en charge sur un territoire ». Ce document doit donc recenser les acteurs, services et/ou institutions qu’un professionnel de santé ou un travailleur social de première ligne pourra « rapidement » identifier. Il doit par ailleurs permettre de définir quelle orientation choisir pour une femme victime de violences, en distinguant les prises en charge en « situation aiguë » (une femme se présentant en urgence pour une prise en charge de violences physiques évidentes ou de viol, que ces violences soient le fruit d’actions répétées ou inédites) ou en « situation chronique » (une femme victime de violences régulières se présentant à un professionnel de santé en dehors d’une phase d’urgence). Le rapport prévoit, pour chacune de ces situations, trois niveaux de recours : de « repérage et de prise en charge », d’évaluation médico-légale et de suivi. Le protocole doit par ailleurs « s’attacher à proposer une formation et des outils destinés à favoriser le repérage des violences et une meilleure prise en charge ».
Autre dimension à prendre en compte : simplifier la prise en charge des femmes et leur garantir un suivi systématique, en privilégiant « autant que possible l’unité de lieu de prise en charge » – plusieurs expériences locales organisent, par exemple, le déplacement des policiers dans les lieux de soins –, en facilitant les constats qui pourront servir de preuves judiciaires « dès l’intervention de première ligne » (photos, généralisation des certificats médicaux, des kits de prélèvement en cas de viol…) et en se préoccupant du suivi médical, social et psychologique des femmes victimes de violences.
S’agissant de l’élaboration du protocole et de son déploiement, la mission propose deux options : la première est de confier cette responsabilité aux ARS, une solution jugée « intéressante en ce qu’elle est cohérente avec l’affirmation que la santé des femmes victimes de violences est une priorité de santé publique », mais avec un bémol qui est que, « sur le terrain, et sous réserve d’une instruction interministérielle conjointe des ministres de la Santé, de la Justice et de l’Intérieur, il n’est pas acquis que la légitimité des ARS suffise à emporter l’adhésion des services de police et de justice ». La deuxième option consiste à placer ce pilotage à un niveau interministériel, en s’inspirant par exemple des Codamups (comité de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires), qui dépendent conjointement des préfets et des directeurs généraux d’ARS. « Dans tous les cas, le rôle du réseau départemental des chargés de mission des droits des femmes […] est incontournable dans la préparation du protocole », insistent enfin les trois membres de la mission.
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