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Le Secours catholique pointe l’intensification de la pauvreté et interpelle le chef de l’Etat

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A l’occasion de la parution de son rapport annuel, l’association propose d’organiser une « conférence nationale de refondation de la protection sociale ».

La publication du rapport annuel du Secours catholique(1), le 6 novembre, devait être l’occasion, pour l’association, d’interpeller le président de la République, invité à s’exprimer le soir même à la télévision pour dresser un bilan de la première moitié de son quinquennat. « Aujourd’hui, 8,5 millions de personnes – dont 3 millions d’enfants – vivent dans la pauvreté. Nous souhaitons savoir quelle initiative compte prendre le chef de l’Etat pour que ces personnes retrouvent une place dans la société », lance Bernard Schricke, directeur de l’action France et Europe du Secours catholique. Dans son appel au chef de l’Etat, l’association propose l’organisation d’une « conférence nationale de refondation de la protection sociale », sur le modèle de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté de décembre 2012, qui a donné lieu à un plan pluriannuel. « Aujourd’hui, notre système de protection sociale n’est plus suffisamment efficace pour permettre aux plus vulnérables de rebondir. Nous voulons lui redonner du sens et repenser la manière dont l’ensemble des revenus et patrimoines contribuent à ce système pour tous et en particulier les plus fragiles », explique Bernard Schricke. L’association devait aussi inviter l’ensemble de la société française à se mobiliser « pour recréer des réseaux d’entraide de proximité pour tous, particulièrement pour les plus vulnérables ».

Dans son dernier rapport, le Secours catholique atteste de l’augmentation de « l’intensité de la pauvreté ». En témoigne le niveau de vie moyen des personnes accueillies, qui s’élève à 515 € par unité de consommation, soit 17 € par jour, ce qui est trop faible « pour faire face aux dépenses sur les postes majeurs comme le loyer, l’alimentation et l’énergie ». 16 % des ménages accueillis (1,5 million au total) ne disposent d’aucune ressource, pour la plupart des étrangers en situation irrégulière ou en attente de statut, mais également des jeunes de moins de 25 ans. Autre fait marquant, la hausse du nombre de personnes qui ont pour la première fois frappé à la porte de ses accueils. En 2013, ce public représentait plus des deux tiers des personnes accueillies par l’association. Ce nouveau public est – plus fréquemment que les ménages déjà connus de l’association – sans ressources, souvent constitué de travailleurs pauvres et dans sa majorité adressé par les services sociaux. Plus globalement, le rapport relève la forte présence d’enfants qui vivent dans des familles monoparentales (180 000 ménages, soit 2,4 % de plus qu’en 2012). En 2013, les couples avec enfants étaient aussi plus nombreux (140 000, soit + 6 % par rapport à 2012). « La crise et ses conséquences ont plongé un certain nombre de familles dans des situations encore plus difficiles », indiquent les auteurs, pour qui « la situation de vie en couple protège de moins en moins de la précarité ». « Quand ces couples avec enfants faisaient jusqu’alors face sans se tourner vers des associations, une dégradation des conditions de vie, même si elle est légère ou ponctuelle, peut les mettre en grande difficulté car l’équilibre était lui-même précaire. » Les auteurs relèvent aussi que les étrangers sont légèrement plus nombreux (leur proportion est passée de 35 à 37 % des personnes se tournant vers l’association) et qu’ils sont plus souvent sans papiers.

Précarité silencieuse

Parmi les plus en difficulté figurent aussi les hommes seuls. Jeunes, migrants, grands exclus, personnes placées sous main de justice, pères seuls, en rupture familiale, ils représentent près du quart des ménages rencontrés par l’association. Frappés par une précarité « silencieuse », ils ont en commun « un isolement qui les met à l’écart de la société ». Ils vivent pour la plupart dans des grandes villes et lorsqu’ils sont français ils sont plutôt âgés de plus de 50 ans. Les hommes seuls étrangers ont majoritairement moins de 40 ans. Une des caractéristiques de ce public est qu’il prend contact avec l’association « de [sa] propre initiative » et non par l’intermédiaire des services sociaux comme la plupart des autres ménages. Ces hommes sont souvent en situation de mal-logement : 45 % d’entre eux vivent chez des proches, en centre d’hébergement, dans des hôtels, des pensions, en caravane ou mobile home. Par rapport à l’ensemble des accueillis, ils sont trois fois plus nombreux à vivre dans des squats, des abris de fortune ou à la rue. Pourtant, « les hommes seuls ne sont pas les premiers à pouvoir accéder à un hébergement d’urgence lorsque c’est nécessaire », pointent les auteurs, qui rappellent que la priorité est donnée aux femmes et aux familles. Les hommes seuls ont le niveau de vie le plus faible des ménages accueillis (28 % n’ont pas de ressources contre 16 % de l’ensemble des ménages accueillis). Ils sont plus souvent en inactivité ou au chômage et sont plus que la moyenne « en inaptitude pour raison de santé ». Ces hommes ont du mal à garder des liens avec leurs enfants et leur famille, soit en raison du poids du regard des autres et de leur propre sentiment d’échec, soit par manque de lieu adéquat, ou encore en raison de « l’éloignement affectif ou géographique ».

La part croissante des personnes âgées

Le rapport du Secours catholique s’intéresse aussi aux personnes âgées : leur part augmente plus vite au sein des accueils de l’association que dans la population générale. Les personnes de plus de 60 ans sont ainsi 8,5 % à s’adresser au Secours catholique – contre 5 % en 2000. Huit seniors sur dix sont adressés à l’association par les services sociaux. Ils vivent plus fréquemment dans des petites villes, sont souvent au chômage et subissent directement l’isolement lié aux modes de déplacement, aux distances qui les séparent des centres-ville. La question de la santé est « vécue comme difficile », en particulier les soins dentaires et ophtalmologiques. Plus de 60 % sont des femmes, le plus souvent seules, dont le revenu moyen est de 772 €, soit de 200 € inférieur au seuil de pauvreté, et dont les demandes en matière de logement sont passées de 18 à 27 %.

Enfin, le Secours catholique veut cette année alerter sur la précarité énergétique qui touche de plus en plus de ménages. En 2013, six ménages sur dix rencontrés par l’association ne pouvaient pas payer leurs factures d’énergie. Entre 2004 et 2012, les aides financières de l’association consacrées à ce poste ont explosé (+ 90 %) et cette augmentation a atteint 23 % entre 2012 et 2013. Pour freiner ce phénomène, elle propose de mettre en place « un bouclier thermique et hydrique » pour les personnes en difficulté. Il couvrirait les dépenses de toutes les formes d’énergie (dont le fioul, le bois et l’eau) et serait financé par la solidarité de tous les clients.

Notes

(1) Disponible sur www.secours-catholique.org.

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