L’affaire est encore dans toutes les mémoires. Un an après la condamnation de l’Etat par la justice administrative à trouver en urgence une place en établissement médico-social pour Amélie Loquet, une jeune femme lourdement handicapée(1), « aucune mesure concrète n’a été prise par le gouvernement pour mettre fin à la situation dramatique de milliers de personnes handicapées sans solution », constate l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei). L’organisation lui adresse donc « un dernier avertissement » avant d’intenter, au besoin, de nouvelles actions en justice, qu’elle avait décidé de suspendre compte tenu des engagements de l’Etat. Une nouvelle procédure a en effet été mise en place pour la gestion des situations critiques(2) et une mission a été confiée au conseiller d’Etat Denis Piveteau, afin d’aboutir à des préconisations « pour mettre fin à la situation de ces personnes handicapées qualifiées de “sans solution” », rappelle l’organisation.
Mais aujourd’hui, « le bilan est édifiant », dénonce l’Unapei : il aura fallu « cinq mois pour qu’Amélie puisse trouver une place dans un établissement qui se situe à plus de 400 km de ses parents, les contraignant à déménager » et, en outre, « les cellules de gestion des situations critiques, lorsqu’elles sont effectivement mises en place dans les départements, ne sont pas en mesure de trouver une solution ». « Sur les huit dossiers que nous avons transmis l’année dernière, six ont trouvé des solutions mais qui ne sont pas toujours adaptées et deux sont toujours en errance », précise Thierry Nouvel, directeur général de l’Unapei, qui pointe qu’« on continue à proposer des places en Belgique ».
Cinq mois après la remise du rapport Piveteau qui a proposé plus de 130 mesures(3), aucune d’entre elles n’a reçu « ne serait-ce qu’un début de mise en œuvre », déplore encore l’association. En mai dernier, la présidente de l’association, Christel Prado, avait d’ailleurs, en vain, mis en garde la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Ségolène Neuville, à la tribune de son congrès.
En réponse à ses attaques, le cabinet de la secrétaire d’Etat présente quelques chiffres mais veut surtout insister sur les projets à venir. Au 21 octobre 2014, 106 situations de personnes handicapées n’ayant pas de solution d’accueil ont été identifiées au niveau national – 65 ont été transmises par les agences régionales de santé (ARS), les autres provenant notamment de la boîte mail créée par la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Parmi cette centaine de cas, 33 ont été considérés comme « critiques » au sens de la circulaire du 22 novembre 2013 qui organisait le dispositif(3). Il s’agit de 21 enfants de moins de 20 ans et de 12 adultes, le plus souvent polyhandicapés ou autistes. Une dizaine d’entre eux ont été orientés vers une structure. Au-delà, un chef de projet doit être nommé dans les jours à venir pour travailler à la mise en œuvre des propositions du rapport Piveteau et ainsi « éviter les cas critiques ». « Les actions qui seront mises en œuvre seront annoncées lors de la conférence nationale du handicap de décembre prochain », précise le cabinet de Ségolène Neuville.