Quartier chaud interactif

Montez en voiture avec un journaliste et plongez-vous dans l’ambiance de l’avenue du Peuple-Belge, connue pour être le lieu principal de la prostitution de Lille. Le webdocumentaire Anatomie d’une avenue propose d’aller à la rencontre des prostitués et des riverains de cette artère pour découvrir leur quotidien, leurs expériences, leurs inquiétudes. Ce reportage interactif offre la possibilité, à chaque rencontre, de s’arrêter afin de « parler » au travers d’un extrait vidéo, ou bien de continuer son chemin jusqu’au prochain interlocuteur. La musique est un peu pesante, appuyant sur l’ambiance sordide du lieu qui, la nuit, n’invite pas à la flânerie. On y croise donc, au hasard, Nawal, qui arpente le trottoir depuis 2010 et se plaint de « la concurrence des Roumaines » et de « la baisse de fréquentation des clients depuis 2011 ». Elle s’expose à visage découvert et se sert du webdoc comme d’une tribune. Autre témoignage original, celui de Diamond Girl, une prostituée mineure dont on n’entendra que la voix. Celle-ci lutte pour ne pas avoir de proxénète et refuse « les clients avec un siège bébé à l’arrière de la voiture ». Dans l’avenue, il y a aussi Saïd, qui tient La Fenêtre du Vieux-Lille, l’un des seuls commerces ouverts quand la nuit tombe. A ces heures-là, il vend surtout « des cigarettes et des capotes », mais il n’apprécie pas beaucoup cette clientèle. On aurait aimé rencontrer plus de personnages, et notamment on regrette que le véhicule ne s’arrête pas devant le camion de l’association Entr’Actes, pour entamer le dialogue avec l’équipe éducative et médicale qui distribue des denrées alimentaires et des préservatifs aux prostitués. Quant aux habitants, « ils se sont montrés fuyants face à la caméra », expliquent les deux jeunes journalistes à l’origine de ce projet – dont l’un habitait sur l’avenue à l’époque du tournage. Bien qu’ils aient filmé pendant une semaine, Yannick Sanchez et Magali Judith admettent que les témoignages recueillis ne constituent « qu’une partie de la réalité de l’avenue ».