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Une enquête décrypte le rôle des délégués mandataires auprès des malades d’Alzheimer

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Menée par la Fondation Médéric Alzheimer, elle dépeint notamment les relations de ces professionnels avec les personnes protégées, leur famille et les autres intervenants auprès des malades.

La Fondation Médéric-Alzheimer en avait déjà fait le constat : une part non négligeable de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer fait l’objet d’une mesure de tutelle ou de curatelle (entre 10 et 20 % à domicile et entre 30 et 40 % en établissement), et ces mesures sont fréquemment (dans 35 à 60 % des cas) exercées par un délégué mandataire judiciaire à la protection juridique des majeurs, salarié d’un service mandataire ou d’une association tutélaire. La fondation vient de rendre publics les résultats d’une enquête menée en 2014(1), en partenariat avec la CNAPE, la FNAT, l’UNAF et l’Unapei(2), afin de mieux connaître les pratiques de ces professionnels et la complexité de leurs missions (voir aussi sur le sujet notre « Décryptage », ce numéro, page 24).

Déterminer les attentes du malade

Selon les 546 questionnaires exploités(3), les délégués mandataires exercent en moyenne 56 mesures de protection juridique, dont environ 13 % visent des malades d’Alzheimer. Ces personnes vivent en établissement dans 84 % des cas et la grande majorité d’entre elles sont âgées de plus de 75 ans, voire de plus de 85 ans (46 % du total). Elles sont pour la plupart placées sous tutelle (86 %), les mesures de curatelle renforcée concernant 12 % des cas examinés dans le cadre de cette enquête. « Quel que soit le lieu de vie, les mesures de tutelle concernent, dans 98 % des cas, à la fois les biens et la personne », précise le document, selon lequel les missions « ne se réduisent pas à la gestion des comptes ». Pour 82 % des délégués interrogés, la mesure répond toujours à un besoin d’aide « pour gérer l’argent ou le budget », mais le soutien à l’organisation de la vie quotidienne « est également décrit comme un motif systématique ou fréquent par la majorité des délégués ».

Selon 69 % des professionnels interrogés, le document individuel de protection des majeurs (DIPM) prévu par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection juridique des majeurs, élaboré avec la personne protégée, est formalisé ou en cours de formalisation pour toutes les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer dont ils assurent la protection. Les répondants évoquent plusieurs obstacles à sa réalisation : les difficultés de communication ou de compréhension des malades (78 % estiment avoir plus de difficultés à communiquer avec ces publics), le manque d’adaptation du document aux troubles cognitifs, ou le manque de temps. Pour élaborer le DIPM d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, 39 % des délégués mandataires déclarent toujours solliciter la personne elle-même, 23 % disent le faire souvent. Ils interrogent aussi les autres professionnels (43 % le font toujours), un peu moins la famille et les proches (24 % les consultent toujours et 46 % souvent). Plus d’un mandataire sur deux (58 %) déclare n’avoir connaissance que parfois ou rarement de projets personnalisés établis par ailleurs par l’établissement d’hébergement ou par les services d’aide à domicile. Dans le cas de la maladie d’Alzheimer, les deux tiers des mandataires indiquent remettre aussi les documents relatifs au fonctionnement du service et à l’exercice concret de la mesure à la famille ou à un proche. 41 % déclarent les remettre à la personne malade.

Médiation et signalements

Comment les relations s’organisent-elles ensuite ? Les rencontres entre mandataires et personnes protégées dépendent du lieu de vie : elles sont moins espacées à domicile – où elles ont lieu le plus souvent une fois par mois (37 %) ou tous les trois mois (49 %) – qu’en établissement (respectivement 10 et 59 %). Dans ce dernier cas, 28 % des mandataires interrogés ne rencontrent la personne protégée que deux fois par an. Autre enseignement : un tiers des répondants a déclaré avoir constaté, au cours de l’année 2013, des restrictions de liberté (d’aller et venir, d’exercice du droit de vote, du respect de l’intimité) visant les personnes malades, le plus souvent en établissement. 13 % ont été confrontés à des situations de maltraitance ou de négligence (manque de soins ou d’attention) à leur égard et 14 % ont déclaré être intervenus en médiation. 7 % ont même indiqué avoir été amenés à alerter les services sociaux et 8 % avoir procédé à des signalements.

La grande majorité (82 %) des mandataires déclarent rechercher l’assentiment de la personne avant de prendre une décision la concernant. Interrogés sur la façon dont ils associent la famille à l’exercice de la mesure, 62 % ont précisé solliciter toujours ou souvent les familles avant de prendre une décision importante et 46 % ont des rencontres régulières avec elles. La plupart (92 %) des professionnels demandent préalablement à la personne protégée s’ils peuvent entrer en contact avec ses proches et 83 % lui demandent si elle souhaite être présente lors de ces échanges. Mais 34 % soulignent qu’un refus est pris en compte lorsque « cela ne compromet pas l’exercice de la mesure ».

En demande de formation

L’enquête s’est également penchée sur les relations des délégués mandataires avec les intervenants sociaux et médico-sociaux. La moitié indique rencontrer souvent les professionnels qui interviennent auprès de la personne protégée lorsqu’elle vit à son domicile. Ils sont 39 % dans ce cas quand la personne est en établissement. Quant aux questions de confidentialité, seuls 34 % des délégués interrogés ont mentionné disposer de règles claires sur les informations qu’ils sont autorisés à communiquer à d’autres intervenants. A défaut, compte tenu de leurs troubles cognitifs, de recueillir le consentement éclairé des malades, 60 % les préviennent avant d’entrer en contact avec d’autres professionnels et 84 % les informent, dans la mesure du possible, du contenu de ces échanges.

Enfin, 90 % des professionnels enquêtés ont indiqué pouvoir bénéficier d’un soutien au sein de leur service lorsqu’ils rencontrent des difficultés dans l’exercice de la mesure de protection, mais la majorité (88 %) estiment que des formations spécifiques pourraient les aider à mieux appréhender les difficultés rencontrées dans l’exercice de leurs missions auprès des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

UNE MAJORITÉ ISSUE DE FORMATIONS SOCIALES

Les délégués mandataires ayant répondu à l’enquête ont suivi divers cursus avant la formation qualifiante rendue obligatoire par la loi du 5 mars 2007. La formation initiale la plus fréquente est celle de conseiller en économie sociale et familiale (39 %). En deuxième position viennent les formations juridiques (25 %), suivies des formations d’éducateur spécialisé (15 %) et d’assistant de service social (11 %). D’autres études sont représentées dans le domaine social, de même que celles de psychologie ou de gestion.

Notes

(1) « La protection juridique des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer : le rôle des délégués mandataires » – La Lettre de l’Observatoire des dispositifs de prise en charge et d’accompagnement de la maladie d’Alzheimer n° 33-34 – Octobre 2014 – Disponible sur www.fondation-mederic-alzheimer.org.

(2) Respectivement Convention nationale des associations de protection de l’enfant, Fédération nationale des associations tutélaires, Union nationale des associations familiales, Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis.

(3) Sur environ 5 500 délégués mandataires présents dans les services des quatre grandes fédérations partenaires au premier trimestre 2014, 824 ont répondu, dont 546, exerçant des mesures de protection auprès des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, ont répondu au questionnaire complet.

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