En 2013, 29 960 personnes se sont rendues dans les 20 centres d’accueil de soins et d’orientation (CASO) de Médecins du monde, tandis que les équipes mobiles de l’association ont établi plus de 30 000 contacts auprès des publics en situation de grande précarité (vivant à la rue, en squat ou dans des bidonvilles, personnes se prostituant, usagers de drogues, migrants en transit). C’est ce que révèle le rapport 2014 de l’Observatoire de l’accès aux soins et aux droits des plus démunis en France, présenté le 16 octobre, à la veille de la journée internationale du refus de la misère(1).
Parmi ces usagers, principalement des hommes (62 %) jeunes (33 ans en moyenne), on trouve plus de 146 nationalités différentes. Ainsi plus de 95 % des personnes reçues sont des ressortissants étrangers, principalement originaires d’Afrique subsaharienne (27 % des patients), du Maghreb (26,5 %) et de l’Union européenne (15 %). Ils souffrent, le plus fréquemment, de pathologies respiratoires (27 %), digestives (26 %), ostéoarticulaires (20 %) et dermatologiques (16 %). Les troubles de la santé mentale, notamment des troubles anxieux et des syndromes dépressifs, ont été repérés chez 11 % des consultants. Quant à la couverture vaccinale, elle est très inférieure aux recommandations nationales. L’enquête montre, enfin, que plus de deux tiers des personnes reçues ne connaissent pas leur statut sérologique concernant les hépatites B et C et le VIH.
Dans la majorité des cas, les personnes rencontrées cumulent difficultés financières et conditions de logement précaires : 97 % de celles qui sont venues en consultation au CASO vivent sous le seuil de pauvreté, plus d’un tiers vit en squat, bidonville ou est sans domicile fixe. Depuis 2011, le nombre de mineurs isolés accueillis a quadruplé. Une hausse qui s’explique, en partie, selon l’association, par les difficultés accrues pour ces jeunes à obtenir une prise en charge par les services dédiés.
Parmi les consultants, 36 % présentent un retard de recours aux soins et 20 % ont même renoncé à se soigner au cours des douze derniers mois. Médecins du monde y voit la conséquence de la « complexité administrative » pour bénéficier d’une couverture maladie, à laquelle viennent s’ajouter, fréquemment, des pratiques abusives (refus d’adresse déclarative, demandes de pièces justificatives non obligatoires) ou des dysfonctionnements dans les administrations qui « découragent les demandeurs et menacent directement leur état de santé ». Par ailleurs, les seuils imposés pour pouvoir bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), « bien qu’augmentés sensiblement en juin 2013, excluent encore un grand nombre de personnes qui vivent pourtant sous le seuil de pauvreté ». Afin de simplifier l’accès aux droits et aux soins, l’association demande, de nouveau, la fusion entre l’aide médicale de l’Etat et la CMU, le renforcement des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) et des dispositifs de proximité. Elle a également constaté que les étrangers craignent de se déplacer dans les structures sanitaires en raison de la barrière de la langue. « Ce constat met en lumière l’importance de l’accompagnement et de la médiation sanitaire et la nécessité de développer le recours à l’interprétariat professionnel au sein de ces structures », avance-t-elle.
Autre problème : plus de trois patients sur dix présentent une pathologie chronique ou aiguë en lien possible avec une mauvaise alimentation. Face à ce constat, Médecins du monde propose que soient « développés des dispositifs d’aide alimentaire adaptés et ouverts tout au long de l’année, des actions sur les déterminants sous-jacents de la malnutrition (accès au logement, aide financière…) et des actions de prévention et de promotion de la santé ciblées auprès de ces populations. »
(1) Rapport disponible sur le site