Il y a trois ans, l’autobiographie de la publicitaire Sylvie Ohayon était récompensée du prix de la Closerie des Lilas. Papa was not a rolling stone(1) racontait son enfance à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), entre un beau-père violent, une mère irresponsable et une bande d’amis résignés. Aujourd’hui, elle l’adapte au cinéma – « une façon de mettre mon histoire à distance », explique-t-elle. Si le roman évoquait son ascension sociale, le film – tout aussi réussi – est davantage centré sur son adolescence dans la cité des 4 000, au milieu des années 1980. « Je voudrais raconter la vie à La Courneuve comme elle n’est jamais montrée à la télévision, ses murs massifs sous lesquels grouille la vie, ses barres en béton imprimées de sacrés souvenirs, évoquer la tchatche comme l’arme du rire qui désamorce la violence, les attitudes, la mixité culturelle, dire la solidarité, la tendresse, les douleurs silencieuses aussi, et exploiter ses lignes graphiques rigoureuses comme ses entremêlements vénéneux », explique la réalisatrice dans sa note d’intention. Elle a appelé son personnage Stéphanie et la représente forte, brillante – elle a sauté une classe, tandis que ses amis redoublent –, passionnée de littérature, de danse et décidée à sortir de son quotidien morose dans la cité. Comme son idole Jean-Jacques Goldman, qui chante : « Envole-moi/ Loin de cette fatalité qui colle à ma peau », sa réussite scolaire lui permettra de s’envoler vers la capitale. Et ce, sans le soutien des conseillers d’orientation, qui lui demandent de ne pas trop rêver, de ses amis, qui lui reprochent de se prendre « pour la Shakespeare des 4 000 », ou de sa famille, qui craint qu’elle se perde dans cette ville « dangereuse » qu’est Paris… Le film raconte aussi une histoire d’amour avec un petit caïd au cœur tendre, ainsi que la relation impossible de Stéphanie avec sa mère, qui court après l’insouciance et la jeunesse que sa maternité lui a volées. Pour le tournage, Sylvie Ohayon est retournée sur les lieux qui l’ont vue grandir. La Courneuve, dit-elle, « n’a pas beaucoup changé ». C’est un endroit dont elle est fière, car « c’est ici que je suis devenue quelqu’un ».
Papa was not a rolling stone
Sylvie Ohayon – Avec Doria Achour, Aure Atika, Marc Lavoine – 1 h 39 – En salles le 8 octobre